La Presse Anarchiste

Histoire du mouvement anarchiste en Bulgarie

Gueor­gui Bal­kans­ki – et un col­lec­tif – vient d’é­di­ter une bro­chure en bul­gare sous ce titre à Paris en 1980 aux édi­tions « Nas Pat » (Notre Route), 107 pages. Le peu d’in­for­ma­tions publiées sur ce thème ne peut que nous faire accueillir avec plus de plai­sir cette bro­chure qui doit être édi­tée en fran­çais.1Voir la biblio­gra­phie pour les références.

L’au­teur trace en 9 pages l’his­toire du mou­ve­ment, en la divi­sant en sept périodes : pré­cur­seurs et ini­tia­teurs ; le mou­ve­ment révo­lu­tion­naire de libé­ra­tion de Macé­doine ; la créa­tion des pre­miers syn­di­cats ; début de la pro­pa­gande anar­chiste ; anti­mi­li­ta­risme, gué­rilla, ter­ro­risme ; orga­ni­sa­tion du mou­ve­ment anar­chiste du pays ; orga­ni­sa­tion anar­chiste sur la base d’une plate-forme ; période après l’ins­tau­ra­tion de la dic­ta­ture bol­che­vique jus­qu’à nos jours

Viennent ensuite une série de bio­gra­phies avec des por­traits qui d’un point de vue ico­no­gra­phique sont d’une grande rare­té, 47 pages. Puis nous avons une des­crip­tion de la presse liber­taire de 1898 à 1980, avec la repro­duc­tion des titres, 23 pages. Enfin une brève évo­ca­tion des édi­tions de livres et bro­chures de 1889 à nos jours, 5 pages. Enfin, l’ou­vrage se ter­mine par 13 pages insis­tant plus sur le syn­di­ca­lisme, le mou­ve­ment de libé­ra­tion natio­nale et révo­lu­tion­naire, l’ac­tion coopé­ra­ti­viste, les acti­vi­tés cultu­relles, péda­go­giques et théâ­trales, le mou­ve­ment non éta­tique, la lutte contre la monar­chie et la guerre, la gué­rilla, et une par­tie inti­tu­lée : « Face à l’al­ter­na­tive his­to­rique : le fas­cisme ou la révo­lu­tion » divi­sée en une sec­tion géné­rale puis « La lutte étu­diante contre le pro­fes­seur Tsan­kov », « La révo­lu­tion espa­gnole » et « Ensei­gne­ments pour nous et les autres ». Cette der­nière par­tie sou­ligne l’im­por­tance de l’or­ga­ni­sa­tion du mou­ve­ment anar­chiste et le fait que si la Bul­ga­rie est le seul Pays de l’Est où l’a­nar­chisme n’ait pas été anéan­ti, cela est dû aux rap­ports étroits avec le peuple. L’or­ga­ni­sa­tion anar­chiste pour la révo­lu­tion sociale est « étran­gère à l’in­di­vi­dua­lisme et l’ir­res­pon­sa­bi­li­té des gens pour qui les idées sont un sport inno­cent et un objet de confort intel­lec­tuel et esthé­tique ou de spé­cu­la­tion pure­ment phi­lo­so­phique. Espé­rons que ces leçons soient ren­for­cées par l’ex­pé­rience ! »

Cette bro­chure est édi­tée par des membres de l’UAB qui repré­sente la branche en exil de la Fédé­ra­tion Anar­chiste Com­mu­niste de Bul­ga­rie (FACB). Remar­quons que comme toutes les orga­ni­sa­tion d’exi­lés, les rap­ports exil-cama­rades de l’in­té­rieur sont très dif­fi­ciles et qu’a­vec le temps des points de vue dif­fé­rents peuvent appa­raître sur cer­taines ques­tions. De plus, en exil même, des publi­ca­tions dif­fé­rentes naissent qui, tout en étant liber­taires, abordent des aspects dis­tincts de la pro­pa­gande : ain­si « Nas Pat » (Notre Route) se veut plus doc­tri­naire et « Iztok » (en bul­gare) aborde des thèmes variés.

Il est du reste dom­mage qu’une orga­ni­sa­tion ne donne presque rien sur son acti­vi­té contre le régime mar­xiste-léni­niste depuis 1944, mis à part l’aide aux inter­nés anar­chistes au début du régime, un congrès clan­des­tin en août 1946 avec 50 délé­gués repré­sen­tant envi­ron 400 groupes. On cher­che­rait éga­le­ment en vain une vision pré­cise du nombre de cama­rades à telle ou telle époque ou dans les syn­di­cats liber­taires ou les coopé­ra­tives. Sauf le nombre des volon­taires en Espagne, les chiffres manquent. On ne peut que regret­ter aus­si dans les bio­gra­phies l’ab­sence de cer­tains cama­rades comme Ste­fan Manov, Bog­dan Ste­fa­nov, Miliou Iva­nov sur les­quels nous allons reve­nir par un biais « dia­lec­tique ».2Voir aus­si Iztok en bulgare.

Nul n’est plus qua­li­fié qu’un mar­xiste bul­gare pour juger du péril de l’a­nar­chisme bul­gare. L’é­tude pas­sée de Dont­cho Das­ka­lov publiée dans un but de pro­pa­gande anti anar­chiste contient cepen­dant un maté­riel inté­res­sant. Il s’a­git de « L’a­nar­chisme en Bul­ga­rie et la lutte du par­ti contre lui » (en bul­gare), Sofia, Par­tiz­dat, 1973, 224 pages, tirage de 1.300 exem­plaires (offi­ciel­le­ment, mais le livre a été reti­ré de la vente au bout de quelques jours).3On peut consul­ter ce livre à la Biblio­thèque de Docu­men­ta­tion Inter­na­tio­nale Contem­po­raine de Nanterre.

Le pre­mier cha­pitre reprend la posi­tion mar­xiste-léni­niste sur l’a­nar­chisme en 69 pages. Le deuxième aborde l’a­nar­chisme bul­gare comme une créa­tion des anar­chistes étran­gers pour lut­ter contre la révo­lu­tion russe de 1917. Cette démarche est non seule­ment débile his­to­ri­que­ment mais fausse d’un point de vue mar­xiste puisque déjà en 1906 le futur fon­da­teur du PC bul­gare Dimi­tar Bla­goev se plaint de la vision prou­dho­nienne et uto­piste du fon­da­teur spi­ri­tuel de l’É­tat bul­gare, Khris­to Botev.4Voir la repro­duc­tion d’un texte inédit de Chris­to Kakakt­chiev « Dimi­tar Bla­goev et le par­ti des socia­listes étroits », Sofia, 1979 en bul­gare. Mal­gré la fai­blesse his­to­rique du départ, ce cha­pitre de 138 pages donne des ren­sei­gne­ments inté­res­sants : le congrès anar­chiste de Yam­bol en mars 1923 ras­sem­bla 104 délé­gués de 89 orga­ni­sa­tions (atta­qué par l’ar­mée qui tua 26 cama­rades); selon la police vers 1924 il y avait 848 mili­tants anar­chistes et 2500 sym­pa­thi­sants (on était en pleine répres­sion et acti­vi­té de gué­rilla). L’au­teur donne aus­si une cita­tion de Tso­la Dro­goyt­che­va, une sorte de Mau­rice Tho­rez bul­gare : « Dans notre région, les maquis anar­chistes agis­saient dans la mon­tagne de Koprivt­chit­sa. Et la véri­té oblige à recon­naître qu’ils agis­saient avec un cou­rage fou, infli­geant à l’en­ne­mi des coups dou­lou­reux, après les­quels ils dis­pa­rais­saient vite et aucune bat­tue de l’en­ne­mi n’é­tait en mesure de trou­ver leurs traces, les atteindre et les détruire. Les deux meneurs de ce groupe illé­gal, Vas­sil Iko­no­mov et Vas­sil le héros, sont deve­nus presque légen­daires par leur intré­pi­di­té dans le com­bat et par leur sang froid face à la mort.»

Le deuxième cha­pitre de 44 pages traite la période 1925 – 1944 et note un renou­veau de l’a­nar­chisme au niveau de la pro­pa­gande qui culmine dans les années 1931 à 1934 grâce à une libé­ra­li­sa­tion qui tou­cha toute la gauche, avec la publi­ca­tion de 60 titres anar­chistes et plu­sieurs revues. On note un déve­lop­pe­ment de l’a­nar­cho-syn­di­ca­lisme comme suite au renou­veau de la CNT en Espagne à par­tir de 1930. Mais deux posi­tions existent : une pro­pa­gande avec la gauche y com­pris les com­mu­nistes – atti­tude qui se mani­fes­ta déjà pen­dant la gué­rilla des années 23 – 25 – et à l’op­po­sé une ten­dance excluant ce rap­pro­che­ment. Quant aux anar­cho-com­mu­nistes, ils sont cri­ti­qués par les syn­di­ca­listes des deux ten­dances parce que trop intellectuels.

Il faut se repor­ter à l’ar­ticle de P.Svobodin publié en espa­gnol pen­dant la guerre d’Es­pagne pour avoir une vision claire 5«Timon » de Bar­ce­lone, N°5, novembre 1938. Au pas­sage, Svo­bo­din indique que dans les années 20 – 23, l’heb­do­ma­daire « Rabot­nit­ches­ka Mis­sal » (La Pen­sée des Tra­vailleurs) tirait à 12000 exem­plaires et la revue théo­rique men­suelle « Svo­bod­no Obch­test­vo » (Socié­té Libre) avait 4500 abon­nés. En sep­tembre 1933, les 7, 8, et 9, la Fédé­ra­tion Anar­cho-Com­mu­niste Bul­gare (FACB) fut créée avec 5 régio­nales et des grou­pe­ments pay­sans, des coopé­ra­tives de pro­duc­tion et de consom­ma­tion, des com­mu­nau­tés liber­taires, des orga­ni­sa­tions cultu­relles… On le voit, « l’in­tel­lec­tua­lisme » selon le com­mu­niste Das­ka­lov des anar­cho-com­mu­nistes est à nuancer.

Les années 1936 – 1939 furent cen­trées sur la guerre d’Es­pagne, moteur de la pro­pa­gande des anar­chistes et des com­mu­nistes, et reflet des polé­miques entre la tac­tique liber­taire et la tac­tique auto­ri­taire. Le PC bul­gare envoya, plus exac­te­ment obli­gea, une par­tie de ses cadres émi­grés en France à par­ti­ci­per à la guerre dans les Bri­gades Inter­na­tio­nales et des « tech­ni­ciens » bul­gares for­més depuis plu­sieurs années à la lutte armée en URSS furent envoyés là-bas, comme sovié­tiques. L’Es­pagne allait deve­nir un point brû­lant de la lutte entre anar­chistes et mar­xistes en Bul­ga­rie en 1944, comme on va le voir.

En 1939 – 1940, un cer­tain nombre de cama­rades, dont cer­tains reve­nus d’Es­pagne, pro­po­sèrent à un congrès clan­des­tin notam­ment de lan­cer des maquis contre le gou­ver­ne­ment pro-nazi. Ils ne furent pas sui­vis 6Témoi­gnage oral de Ste­fan Manov. Et en 1941, les com­mu­nistes prirent l’i­ni­tia­tive de la gué­rilla avec la rup­ture du Pacte Hit­ler-Sta­line. Pour Das­ka­lov, les anar­chistes furent iso­lés pen­dant les années 1941 – 1944, mis à part la par­ti­ci­pa­tion d’une cin­quan­taine de cama­rades (selon les chiffres de Das­ka­lov). Il n’y a que très peu de chose dans Bal­kans­ki sur ce moment.

Pour la période 1944 – 1953, on peut s’ap­puyer sur Das­ka­lov qui lui consacre son qua­trième et der­nier cha­pitre, 23 pages, com­plé­tée avec les infor­ma­tions publiées en France par les émi­grés. En toute sim­pli­ci­té le cha­pitre en ques­tion s’ap­pelle « l’op­po­si­tion anar­chiste après le 9‑IX et sa liquidation ».

Selon l’au­teur les anar­chistes, bien que peu nom­breux, avaient des « groupes très actifs » qui dif­fu­saient de la pro­pa­gande liber­taire, des livres, des tracts contre le régime, contre la ter­reur dans l’Es­pagne fran­quiste, pour la liber­té de la presse. Ils n’ac­ceptent aucu­ne­ment l’É­tat pro­lé­ta­rien (!). Ils défendent le troi­sième front contre la bour­geoi­sie et le par­ti com­mu­niste. En février 1946, un membre du Comi­té Cen­tral Dimi­tar Ganev déclare qu’il faut limi­ter les anar­chistes, « dévoi­ler leur misère idéo­lo­gique… parce qu’il n’y a pas de théo­ries plus révo­lu­tion­naire que le mar­xisme-léni­nisme ». Dans les villes et les vil­lages où les anar­chistes sont implan­tés, des réunions publiques sont orga­ni­sées. Comme à Doup­nit­sa (depuis Stanke Dimi­trov) à Pavel Bania, à Sofia, à Kili­fa­re­vo « et ailleurs ». À ce pro­pos, Das­ka­lov sou­ligne qu’à Pavel Bania l’or­ga­ni­sa­teur de la réunion avait par­ti­ci­pé à la guerre d’Es­pagne et que « pour lui don­ner la réplique les anar­chistes avaient appe­lé de Sofia un des liber­taires les plus connus, ori­gi­naire de ce vil­lage ». On peut ajou­ter que c’é­tait Ivan Iva­nov Radt­chev et que le mar­xiste n’é­tait autre qu’un ex-offi­cier sovié­tique et membre impor­tant du régime Ruben Levi, qui refit sa confé­rence plu­sieurs fois et qui se retrou­va plu­sieurs fois avec les mêmes « colles » sur mai 1937, les col­lec­ti­vi­sa­tions, etc…

Durant les six pre­miers mois de 1947, vu l’in­ten­si­fi­ca­tion de la pro­pa­gande anar­chiste contre l’É­tat com­mu­niste et les appels à « l’ac­tion directe », le gou­ver­ne­ment « prit des mesures sociales contre elle. À Sofia, Doup­nit­sa, Sli­ven, Nova Zago­ra et ailleurs des arres­ta­tions d’a­nar­chistes ont lieu. » Les anar­chistes libres lancent les slo­gans « au com­bat har­di­ment », « appel contre l’en­ne­mi », « contre les atro­ci­tés des patrons et des par­ti­sans de l’É­tat sur le dos des tra­vailleurs ». Alors le Comi­té Cen­tral du PC décide de liqui­der l’op­po­si­tion bour­geoise et les anar­chistes « les plus connus et de les envoyer en camps de réédu­ca­tion » (tru­do­voiz­pra­vi­tel­ni lague­ri); d’autres émigrent. En effet les anar­chistes obte­naient des résul­tats. Fin 1947 et début 1948 on a connais­sance de deux grèves dans l’in­dus­trie du tabac, à Plov­div et à Has­co­vo. Dans le cas de la grève de Plov­div, les anar­chistes n’y ont pas par­ti­ci­pé par­ti­cu­liè­re­ment mais ils étaient pré­sents. La grève fut vic­to­rieuse et le chef de la Police l’at­tri­bua dans son rap­port aux anar­chistes. À Has­co­vo, la grève fut net­te­ment influen­cée par les anar­chistes 7«Le mou­ve­ment liber­taire bul­gare » G. Bal­kans­li, confé­rence dac­ty­lo­gra­phiée dis­po­nible au CIRA Genève (1958).

En 1953, Das­ka­lov men­tionne un groupe de maqui­sards para­chu­té par la CIA dans la région de Pavel Bania, pro­vince de Kazan­lak, avec un radio-émet­teur qui émit pen­dant quelques mois. Nous pou­vons ajou­ter que cette action consis­tait à se ser­vir du maté­riel et du poten­tiel de la CIA pour la pro­pa­gande anar­chiste. Du reste, dès que les amé­ri­cains com­prirent qu’ils ne pou­vaient manœu­vrer les maqui­sards, ils ne leur four­nirent plus aucune aide Ces cama­rades étaient trois : Bog­dan Ste­fa­nov, Miliou Iva­nov et un autre firent pen­dant six mois leur action anar­chiste de sep­tembre 1953 à mars 1954 où une offen­sive de l’ar­mée les obli­gea à fuir. Les deux pre­miers se sacri­fièrent pour que le troi­sième et sa fian­cée échappent à l’en­cer­cle­ment, puis par des ami­tiés diverses, réus­sissent à pas­ser la fron­tière, ce qui entraî­na bien des arres­ta­tions. Cette action divi­sa l’é­mi­gra­tion mais aujourd’­hui encore elle reste dans les mémoires comme exemple de lutte armée contre le régime, pour la libre orga­ni­sa­tion des masses.

En 1956, le 5 novembre très exac­te­ment, c’est à dire au moment de la seconde inter­ven­tion russe en Hon­grie, la police opère des arres­ta­tions mas­sives, notam­ment dans les milieux anar­chistes, pour pré­ve­nir toute conta­gion 8«Le Monde Liber­taire », février 1957. Enfin en 1962 Das­ka­lov cite un groupe dans la pro­vince de Sta­ra Zago­ra, for­mé par un anar­chiste récem­ment libé­ré de pri­son. « Il réus­sit à influen­cer 7 per­sonnes de la ville et 6 autres d’un vil­lage proche, des anciens anar­chistes, des oppo­sants, des jeunes abu­sés. Ils se don­nèrent un pro­gramme « d’u­nion » qui avait pour tâche d’u­nir « tous les anti­com­mu­nistes » dans la lutte contre l’É­tat par tous les moyens ». Le groupe se munit d’armes, fusils, pis­to­lets, bombes et ronéos. Ils essayèrent d’en­trer en contact avec les anar­chistes de Has­co­vo et Velin­grad. » Nous ne savons pas jus­qu’à quel point ces faits sont authen­tiques, mais un détail a échap­pé à Das­ka­lov : la force de l’in­fluence d’un anar­chiste, même après l’emprisonnement, même seul… On a connais­sance d’un docu­ment qui date de la même année et qui montre aus­si que l’in­fluence anar­chiste est tou­jours vivace à cette date : il s’a­git de la fiche de police de l’a­nar­chiste Alexandre Meto­diev Nakov. À cette époque il se réunit sou­vent avec plu­sieurs anar­chistes de sa région et il pro­fite de ses vacances pour faire un tour de Bul­ga­rie par le train ce qui lui per­met de ren­con­trer d’autres anar­chistes : à San­dants­ki, à Debe­letz, à Kne­ja, à Kolov­grad et à Var­na où il ren­contre « trois anar­chistes actifs ». Quant à son groupe il com­pre­nait sept per­sonnes 9Bul­le­tin de la CRIFA N°28, février 1980.

En 1967 la Sûre­té d’É­tat découvre un groupe conspi­ra­tif. L’a­nar­chiste Taniou Iva­nov Gar­nev fait par­tie de ce groupe et il est condam­né à 15 ans de pri­son 10Tract édi­té en France en 1979 à l’oc­ca­sion d’un pro­cès de droit com­mun fal­si­fié qu’on lui a inten­té en 1977.. En novembre 1969, sept étu­diants sont arrê­tés pour acti­vi­té anti-socia­liste et dis­tri­bu­tion de tracts. L’un d’eux, Ger­mi­nal Tchi­vi­kov, fils d’un mili­tant anar­chiste, avait en sa pos­ses­sion le livre de Gaby et Dany Cohn-Ben­dit « Le gau­chisme, mala­die sénile du com­mu­nisme ». Ils sont condam­nés à de lourdes peines et Chris­to Kolev Jor­da­nov, un vieux mili­tant liber­taire très connu, est éga­le­ment inquié­té à cette occa­sion 11Voir la bio­gra­phie de Jor­da­nov dans la bro­chure « La répres­sion en Bul­ga­rie » de Kiril Yanat­ch­kov. En décembre 1974, nous avons trans­mis l’in­for­ma­tion sur l’ar­res­ta­tion de nom­breux anar­chistes, dont Chris­to Kolev Jor­da­nov et Alexandre Meto­diev Nakov déjà cités, à Kus­ten­dil, Per­nik, Stanke Dimi­trov, Sofia, Sta­ra Zago­ra, Has­co­vo, Plov­div, Var­na et dans des vil­lages et la sai­sie de bro­chures édi­tées il y a trente et qua­rante ans. Vingt-cinq cama­rades avaient été inter­ro­gés et six cama­rades furent condam­nés à cinq ans de dépor­ta­tion sous stricte sur­veillance. D’autres furent obli­gés de rem­plir des décla­ra­tions où ils s’en­ga­geaient à ne pas faire de pro­pa­gande anar­chiste 12Tract d’in­for­ma­tion publié en France sur cette affaire..

En 1978, un cama­rade expli­quait dans une lettre : « après chaque arres­ta­tion cha­cun est sou­mis aux mêmes ques­tions sté­réo­ty­pées : « Êtes vous anar­chiste ? Quels sont les anar­chistes de votre ville, votre arron­dis­se­ment et votre région en géné­ral ? Quels sont à votre avis les condi­tions favo­rables au déve­lop­pe­ment de l’a­nar­chisme en Bul­ga­rie ? Que pen­sez-vous de la détente ? Quel type de contact avez-vous avec les étran­gers ? »13«Indus­trial Defense Bul­le­tin » du syn­di­cat IWW de Toron­to, 1978. En 1979, une semaine avant une aug­men­ta­tion des prix, une tren­taine d’a­nar­chistes sont arrê­tés puis libé­rés après dix jours de déten­tion. Le pou­voir a tou­jours aus­si peur des anar­chistes, même si c’est peut-être pré­su­mer de leur influence pré­sente14Bul­le­tin de la CRIFA N°29 Mars-Avril 1980.

Il n’est pas rai­son­nable de par­ler de la situa­tion actuelle mais on constate que le mou­ve­ment anar­chiste bul­gare a de solides racines de lutte contre l’op­pres­sion fas­ciste et l’É­tat mar­xiste-léni­niste. Et c’est un mou­ve­ment qui a connu des épi­sodes qui méritent d’être connus des cama­rades des autres pays.

Dimi­trov

Bibliographie

Sur l’a­nar­chisme bul­gare, il existe assez peu d’ou­vrages en fran­çais. Il faut signa­ler « Un cen­te­naire bul­gare parle » de Nico­las Stoi­noff (ed. Notre Route, 1963) et « G. Chei­ta­nov » de G. Bal­kans­ki (ed. Notre Route, 1965) qui sont riches de ren­sei­gne­ments sur les débuts du mou­ve­ment liber­taire bul­gare jusque dans les années trente. Pour les per­sé­cu­tions contre la FACB après 1944, il existe une bro­chure « Les bul­gares parlent au monde » (édi­tée par le comi­té d’Aide aux Anti-fas­cistes de Bul­ga­rie, 1949). Ces ouvrages sont deve­nus rares, mais on peut les trou­ver à Paris à la librai­rie Publi­co, 145 rue Ame­lot ou à la librai­rie Le Jar­gon Libre, 6 rue de la Reine Blanche. La bro­chure de Bal­kans­ki « His­toire du Mou­ve­ment Liber­taire Bul­gare », « Esquisse » est annon­cée dans la col­lec­tion « Volon­té Anar­chiste » (V. A., Groupe Fresnes-Anto­ny, 34 rue de Fresnes, 92160 Anto­ny). Enfin la cri­tique la plus viru­lente du régime depuis 1948 a été faite dans une bro­chure « La répres­sion en Bul­ga­rie » (1976) du cama­rade Yanat­ch­kov que nous avons réédi­tée et com­plé­tée en 1978 qui décrit les inter­ne­ments en cli­nique psy­chia­trique et la cam­pagne raciste contre les musul­mans bulgares.

  • 1
    Voir la biblio­gra­phie pour les références.
  • 2
    Voir aus­si Iztok en bulgare.
  • 3
    On peut consul­ter ce livre à la Biblio­thèque de Docu­men­ta­tion Inter­na­tio­nale Contem­po­raine de Nanterre.
  • 4
    Voir la repro­duc­tion d’un texte inédit de Chris­to Kakakt­chiev « Dimi­tar Bla­goev et le par­ti des socia­listes étroits », Sofia, 1979 en bulgare.
  • 5
    « Timon » de Bar­ce­lone, N°5, novembre 1938
  • 6
    Témoi­gnage oral de Ste­fan Manov
  • 7
    « Le mou­ve­ment liber­taire bul­gare » G. Bal­kans­li, confé­rence dac­ty­lo­gra­phiée dis­po­nible au CIRA Genève (1958)
  • 8
    « Le Monde Liber­taire », février 1957
  • 9
    Bul­le­tin de la CRIFA N°28, février 1980
  • 10
    Tract édi­té en France en 1979 à l’oc­ca­sion d’un pro­cès de droit com­mun fal­si­fié qu’on lui a inten­té en 1977.
  • 11
    Voir la bio­gra­phie de Jor­da­nov dans la bro­chure « La répres­sion en Bul­ga­rie » de Kiril Yanatchkov
  • 12
    Tract d’in­for­ma­tion publié en France sur cette affaire.
  • 13
    « Indus­trial Defense Bul­le­tin » du syn­di­cat IWW de Toron­to, 1978
  • 14
    Bul­le­tin de la CRIFA N°29 Mars-Avril 1980

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