La Presse Anarchiste

Laurent Tailhade

Erect et beau cavalier !

Paul Ver­laine


Depuis une génération

Que vous avez rejoint le domaine néantique

Per­sonne ne pro­nonce plus votre nom.

C’est le silence immense qui couvre tous vos livres

« Le Pays du Mufle » pour­suit sa vilaine besogne,

Et les maroufles, les tri­gauds, les obli­vieux, les félins

Dansent leur ronde d’iniquité.

Vous ravis­siez par la culture, l’i­déa­li­té, le style munificent,

Les plus aris­to­crates au coeur riche de bonnes actions…

Et quand cous par­liez d’Es­chyle l’Eleusinien,

De Pétrone, d’Ib­sen. et de jeunes auteurs,

Des ques­tions actuelles étendues

Par la noblesse de la phi­lo­so­phie, la magnanimité,

« L’U­nique et sa Propriété

Suf­fit à parer mon été… »

La salle déli­rait, vous por­tait en triomphe.

L’Es­pagne vous doit des dis­cours parfaits,

Frère de Cer­van­tès et des plus nobles Ibériques.

Le vers ? qui le disait aus­si bien que vous,

Maître, Grand char­meur d’E­douard de Max, royal ensorceleur,

Qui met­tait tant d’é­clat dans l’art du Tragédien

Et sans doute eût tou­ché par sa voix jus­qu’au trachysaure !…

Par­ti d’un seul vocable, poète élé­giaque et aristophanesque,

Oh ! que n’eus­siez-vous fait du mot Nou­ka­hi­va ? qu’un vrai Fils de l’Attique

Sans peur, que dis-je, plus courageux

Vous vous expo­siez au tumulte des meutes,

Presque aus­si­tôt domp­tées par les feux de votre regard.

Votre allure sur­pas­sait celle de cent et cent héros :

Vous avez ter­ras­sé le plus per­vers dragon.

Qu’a­mé­thystes, béryls, sar­doines, émeraude,

Les joyaux pré­cieux du pur Arnaud de Moles

Rutilent à jamais à vos pieds, Altesse.

Des Fleurs d’O­phé­lie qui se réveillera

Pour féter votre verbe avec Rowe­na de Tremaine.

LOUY DE GONZAGUE FRICK. (École poé­tique du Lunain).

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