La
grève aux Ateliers Mécaniques URSUS a commencé
le mardi 1er juillet. Les travailleurs de la deuxième équipe
de quelques sections se sont mis en grève. Le bruit d’une
augmentation des prix en était la cause directe. La tension
augmenta du fait du manque d’informations officielles.
Mercredi,
il n’y avait pas de viande au buffet d’entreprise. Ce jour-là
et les suivants les départements de production se sont mis
l’un après l’autre en grève. Pendant ce temps, seules
deux sections travaillaient : la fonderie qu’une brusque
extinction des fourneaux menace de la destruction et de plusieurs
millions de perte, et le centrale électrique thermique qui
fournit l’énergie à la ville et à l’usine.
Le
déroulement des évènements le 3 juillet était
le même dans tous les départements de production. Les
ouvriers cessaient le travail, débranchaient les machines et
se regroupaient dans leurs « repaires » pour
commencer à formuler leurs revendications. L’étendue de
la grève s’élargissait peu à peu, les
représentants de la direction et les activistes du parti
entrèrent en action. Ils s’approchaient des groupes d’ouvriers
en appelant à la reprise du travail, et dans le cas des
membres du parti à la conscience du parti – sans résultats.
Certains militants se faisaient particulièrement remarquer par
leur activité. Le contremaître Krasniewski du
département des chassis menaça ses subordonnés
de sanctions pénales, et le contremaître Picwierz du
département de montage des moteurs de licenciements
disciplinaires. Simultanément la direction entreprit d’isoler
les grévistes, les Ateliers Mécaniques ont été
isolés du reste du monde et les portes de chaque département
ont été fermées. Le téléphone a
été coupé pour que les départements
n’aient pas la possibilité de s’entendre entre eux.
Les
grévistes du département de montage des moteurs PS ont
élu une délégation de dix membres, de même
qu’au département des chassis PB où la délégation
comptait 20 personnes. Au département réparation-énergie
PR, les ouvriers ont organisé une assemblée générale,
ils ont rédigé des revendications et ils ont élu
un comité de grève de 7 membres.
La
direction essayait de maîtriser la situation en organisant des
réunions de contremaîtres, de chefs
de brigade et de monteurs qui ensuite appelaient les ouvriers à
reprendre le travail. Comme ça n’amenait aucun résultat,
la direction centrale et les directeurs de chaque département
commencèrent à négocier soit avec les
délégations, soit avec tout le personnel. D’abord la
direction crut qu’il suffisait de dire aux travailleurs que les
travailleurs de l’Ouest sont encore plus mal lotis et de promettre
vaguement une augmentation au 1er septembre à ceux qui la
mériteraient.
Dans
la plupart des départements, les deuxième et troisième
équipes se sont jointes à la grève. les jours
suivants la grève s’est poursuivie. la situation se déroulait
un peu différemment au département PR grâce
surtout à l’action adroite du comité de grève
qui avait présenté par écrit les revendications
des grévistes :
1/
Augmentation de la prime pour travail nocif de 0,5 à 1,5
zlotys de l’heure
2/
Fixation d’une prime de 10% pour le travail en deuxième équipe
3/
Augmentation des salaires pour compenser la hausse des prix et
introduction d’une prime de vie chère.
La
direction avait deux heures pour étudier ces revendications.
Après l’écoulement de ce temps, le directeur du
département, le 1er secrétaire de la cellule du parti
de l’entreprise et les chefs de sections apparurent. Ils commencèrent
comme d’habitude par des menaces. « Les travailleurs ne
sont pas irremplaçables, ils doivent s’en souvenir »
dît le secrétaire. Les ouvriers rajoutèrent aux
revendications la garantie signée que personne ne serait
poursuivi pour la grève. Le directeur promit de présenter
les revendications « en haut » et appela à
la reprise du travail. Comme personne ne bougeait, il montra du doigt
les ouvriers qu’il connaissait et les appela par leur nom. Ce fut le
moment décisif : personne ne céda et il était
clair que les grévistes devaient gagner. La direction promit
de répondre aux revendications dans les deux heures. Le
souhait de la direction était que le comité de grève
change de nom pour éviter la malsonnance aux oreilles du mot
grève. Les grévistes acceptèrent que leurs
représentants utilisent pour les négociation le terme
de « commission ouvrière ».
En
attendant la réponse on commença les préparatifs
techniques pour interrompre le travail à la centrale
électrique thermique. On prévint ainsi le directeur de
la fonderie qu’il arrête à temps le processus
technologique car il y aura un arrêt de la fourniture en
énergie.
Après
deux heures de négociation, le directeur général
Szymczak, directeur de l’entreprise, le 1er secrétaire et une
personne inconnue des grévistes arrivèrent. En résultat
de la discussion, la direction s’engagea à satisfaire les
revendications 1 et 2 dans la semaine qui suivrait et la
revendication 3 au 15 août. Elle refusa par contre de signer la
garantie que personne ne serait poursuivi. Les grévistes
votèrent : la grève ne s’arrêtera pas avant
d’avoir obtenu cette assurance. La direction céda à
16h30.
Le
jour suivant le directeur Szymczak vint de nouveau dans le
département et il certifia que toutes les revendications
étaient satisfaites et que l’augmentation des salaires
partirait du 1er juillet. En supplément la prime de rendement
a été augmentée de 10%. Les travailleurs
syndiqués seront payés au tableau V (près de 400
zlotys d’augmentation). On accorda aussi 5% de prime extraordinaire
et une prime fixe d’émulation.
Ce
même jour la direction commença de négocier avec
les autres départements. Au département PS, voulant
empêcher une rencontre avec la délégation du
personnel, la direction prit seule la décision des
augmentations. Cette décision fut communiquée aux
contremaîtres, chefs de brigades et monteurs. Les ouvriers
obtinrent 10% de prime et 150 zlotys de prime d’émulation.
Dans les départements PB et PC on parvint à un accord
avec l’assemblée générale. Les augmentations
furent les mêmes qu’au département PS. Au département
PB on obtint de plus le passage du tableau III au tableau IV. Au
département PC aussi on réussit à obtenir une
concession supp1émentaire.Dans tous les départements on
commença bientôt à reprendre le travail.
« Robotnik »
(l’Ouvrier) du 12 juillet 1980, numéro spécial sur les
grèves