La Presse Anarchiste

Bravo ! Garry Davis

Que l’Or­ga­ni­sa­tion des Nations Unies en son Palais de Chaillot soit une autre « caverne des bri­gands impé­ria­listes », on s’en dou­tait bien.

Ni le bat­tage publi­ci­taire, ni les palabres, ni les tonnes de docu­ments que pro­duisent les poli­chi­nelles ver­beux de cette nou­velle « Table verte » n’ar­rivent à leur confé­rer le moindre crédit.

Encore cette fois n’a­vons-nous pas, comme à l’an­cienne S.D.N., la suprême conso­la­tion d’une per­son­na­li­té de pre­mier plan, tel Briand, sau­vant la repré­sen­ta­tion d’une mau­vaise pièce par les pro­diges d’un excep­tion­nel talent.

Faute d’un acteur qui sur­gisse de la troupe même du théâtre, du moins avons-nous l’im­mense for­tune cette fois d’en saluer un qui sort du public en esca­la­dant les gra­dins et s’empare du plateau.

Il s’a­git de Gar­ry Davis, ce jeune Amé­ri­cain au cœur noble et au geste pré­cis qui s’im­po­sa en récla­mant dès les pre­mières ses­sions de. l’O.N.U. d’être citoyen du monde.

Renié dès l’a­bord par ce jury de frères pape­lards et de faux témoins paten­tés, il vient de les contraindre hier à se déju­ger publi­que­ment, obli­geant ces pseu­do-archi­tectes du temple de la paix, à requé­rir la police pour expul­ser de leur chan­tier le seul maçon authen­tique qui s’y fût jamais présenté.

Mais l’homme est tenace et à son appel répondent des consciences qui ne semblent pas dis­po­sées à ce que l’é­vé­ne­ment fût étouffé.

Albert Camus et Claude Bour­det, par exemple, ont pris leur meilleure plume pour magni­fier le geste de Gar­ry Davis.

Bien sûr, devant ce grand geste, de petits hommes iro­nisent, blaguent avec des sou­rires condes­cen­dants cet uto­piste ou tentent d’ex­ploi­ter à ses dépens leur pré­dis­po­si­tion au calembour.

De même, dans le poème de Ros­tand, Chan­te­cler n’é­lève sa fan­fare géné­reuse, ni le ros­si­gnol la pure­té de son chant sans que s’es­sayent à les déni­grer les contre­pè­te­ries du merle et le cla­bau­de­ment des crapauds.

Uto­pie, peut-être, mais com­bien sublime et propre à sus­ci­ter l’en­thou­siasme, celle de Gar­ry Davis, par oppo­si­tion à l’autre, à la véri­table uto­pie, celle de voir la paix uni­ver­selle être don­née aux peuples par un conglo­mé­rat de diplo­mates retors et de géné­raux en chômage.

Tant mar­qué de can­deur qu’il soit, le geste du jeune Amé­ri­cain arra­chant à ces pha­ri­siens leur faux nez et les souf­fle­tant à la face du monde requiert notre adhésion.

Puisque déjà s’est for­mé un Conseil de Soli­da­ri­té qui groupe des noms hono­rant la pen­sée contem­po­raine, Défense de l’Homme et sa rédac­tion et ses amis croi­raient man­quer à leur idéal s’ils n’y don­naient leur adhésion.

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