La Presse Anarchiste

Les ouvriers de Pékin ont commencé à s’organiser

Un mou­ve­ment qui naît de lui-même, qui n’a pas de chefs ?
Il y a quelque chose là-dessous.
Jean-Paul Sartre
(« Les Com­mu­nistes et la Paix »)

… l’au­to­no­mie ! Tous devez connaître ça, Ving­tras, vous, qui avez fait vos classes ? 
Ça vient du grec, à ce qu’ils disent, les bacheliers!… 
Ils savent d’où ça vient, mais ils savent pas où ça mène !
Et de rire en sen­tant son verre !
Jules Val­lès, l’In­sur­gé

Le 26 avril, l’é­di­to­rial, désor­mais fameux, du Quo­ti­dien du peuple stig­ma­tise « une petite poi­gnée d’in­di­vi­dus » qui a « usur­pé l’é­ti­quette d’or­ga­ni­sa­tion ouvrière pour dif­fu­ser des tracts réac­tion­naires, et mul­ti­plié les contacts afin de sus­ci­ter encore plus de troubles ». Il est ici fait allu­sion, pro­ba­ble­ment, au groupe qui, sous la signa­ture d’«Union des ouvriers de Pékin », a mis en cir­cu­la­tion, quelques jours plus tôt, le 21 avril, deux libelles inti­tu­lés res­pec­ti­ve­ment : « Adresse au peuple de toute la ville » et « Dix ques­tions ». [doc. n° 1 et 2] C’est, en tout cas, de cette manière que l’in­ter­pré­te­ront les signa­taires des dits libelles. Dans une « Adresse aux com­pa­triotes de tout le pays » du 17 mai [doc n°4], qui nous ren­seigne au pas­sage sur la date de la fon­da­tion de cette socié­té, ceux-ci déclarent :

Nous, l’U­nion des ouvriers de Pékin, dans le but de sau­ve­gar­der les inté­rêts des ouvriers, nous nous sommes for­mel­le­ment consti­tués à Pékin, le 21 avril 1989. Le jour même, nous avons publié deux textes : « Adresse au peuple de toute la ville » et « Dix ques­tions » que l’é­di­to­rial du « 26 avril » a salis en les qua­li­fiant de réactionnaires.

Entre la sor­tie des textes incri­mi­nés par l’or­gane du Par­ti com­mu­niste chi­nois et celle de la riposte de leurs auteurs, presque un mois s’é­cou­le­ra sans qu’ap­pa­rem­ment l’U­nion des ouvriers de Pékin se signale à l’at­ten­tion par un nou­vel écrit. En revanche, par la suite, durant la séquence chro­no­lo­gique qui pré­cé­de­ra la nuit tra­gique du 3 juin, pas un jour ne pas­se­ra, ou presque, sans qu’une ain­si nom­mée Union auto­nome des ouvriers de Pékin ne couche sur le papier son sen­ti­ment. En réa­li­té, le 17 mai ne marque pas la date d’ex­tinc­tion totale de l’U­nion des ouvriers de Pékin : tout conduit à conjec­tu­rer que ces deux asso­cia­tions n’en fai­saient qu’une et que les pro­mo­teurs de la deuxième se sont conten­tés d’ad­joindre le qua­li­fi­ca­tif « auto­nome » à l’in­ti­tu­lé de la première.

De la protection des étudiants à une intervention autonome

C’est donc le ven­dre­di 19 mai que l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin a pris nais­sance, lors même que les auto­ri­tés décré­taient la loi mar­tiale. Au bas de son pre­mier mani­feste 1Nous connais­sons un tract, « Adresse aux ouvriers de tout le pays », signé de l’U­nion auto­nome, dont la revue Shiyue pin­glun [cri­tique d’oc­tobre] assure qu’il a été dif­fu­sé au milieu du mois de mai, donc, pro­ba­ble­ment, avant que l’U­nion auto­nome existe for­mel­le­ment., ses fon­da­teurs aler­taient leurs frères du reste du pays : « Les ouvriers de Pékin ont com­men­cé à s’or­ga­ni­ser ! » [doc n°5]. Lorsque les pre­miers ouvriers se sont enga­gés aux côtés des étu­diants, ils ont agi par sym­pa­thie envers la lutte de leurs jeunes conci­toyens. Sym­pa­thie qui se tra­dui­ra tout à la fois par un sou­tien moral et par une aide plus maté­rielle : col­lecte de fonds ou bien encore assis­tance logis­tique — on sait, par exemple, que dès l’ins­tant où les étu­diants ont enta­mé leur grève de la faim sur la place Tian’an­men, soit dès le 13 mai, les ouvriers ravi­taille­ront, en nour­ri­ture et en eau potable, les étu­diants venus encou­ra­ger leurs cama­rades qui jeûnent et près des­quels ils se tiennent en per­ma­nence. Mais cette bien­veillance se tra­dui­ra éga­le­ment par une inter­ven­tion moins imper­son­nelle : après la pro­cla­ma­tion de la loi mar­tiale, le 20 mai, l’U­nion auto­nome agen­ce­ra un ser­vice d’ordre gros de deux mille cinq cents piquets 2Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na » [le rôle des syn­di­cats en Chine conti­nen­tale], Issues and Stu­dies, Tai­pei, vol. 26, n°2, Februa­ry 1990, p. 96. Une autre source fait état de trois mille piquets ouvriers (cf. A. Pino, « Entre­tien avec Yue Wu, vice-com­man­dant en chef de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin », FO Heb­do, Paris, n° 2009, 11 octobre 1989, p. 23). Le 21 mai, un groupe de défense, l’é­quipe des « brave-la-mort » [gan­si dui], com­po­sé de plus de vingt mille ouvriers et étu­diants s’é­tait consti­tué sur la place Tian’an­men. Une autre équipe se for­me­ra le 25 mai (cf. « Beiz­huang de minyun » [le pathé­tique mou­ve­ment pour la démo­cra­tie], Ming­bao chu­banshe, Hong Kong, juin 1989, p.83 et p.96). À pro­pos de cette der­nière, voir : « Entre­tien avec le chef de l’é­quipe des piquets de contrôle ouvriers », Tinan’an­men yi jiu ba jiu [Tan’an­men, 1989], recueil de textes com­pi­lés par la rédac­tion du Lianhe bao [jour­nal union], Lian­jing, Tai­pei, août 1989, pp.406 – 407., des­ti­né tout à la fois « à assu­rer la pro­tec­tion de la vie des étu­diants et à main­te­nir la sta­bi­li­té de l’ordre public à Pékin », et à « garan­tir l’a­che­mi­ne­ment de toutes les res­sources de Pékin et des pro­duits néces­saires à la vie cou­rante des cita­dins […] ain­si que l’a­che­mi­ne­ment de tous les pro­duits de pre­mière néces­si­té » [doc. n° 7]. L’U­nion ira même jus­qu’à s’of­frir d’har­mo­ni­ser le chœur des « équipes char­gées du main­tien de l’ordre social », s’e­nor­gueillis­sant, inci­dem­ment, de la qua­li­té de son ser­vice, et magni­fiant « l’ordre révo­lu­tion­naire par­fait que res­pectent plu­sieurs mil­lions de gens ». Enfin, chaque fois que les cir­cons­tances l’or­don­ne­ront, on aper­ce­vra les ouvriers à la tête des Péki­nois, tout spé­cia­le­ment lorsque la popu­la­tion entra­ve­ra l’a­van­cée des troupes char­gées d’im­po­ser la loi mar­tiale. Comme le résu­me­ra un porte-parole de l’or­ga­ni­sa­tion : «[leur] pre­mière tâche était de pro­té­ger les étu­diants » 3Cf. l’in­ter­view d’un res­pon­sable de l’U­nion réa­li­sée dans la der­nière décade du mois de mai et parue dans la revue Shiyue pin­glun. (Trois entre­tiens, réa­li­sés par « un lec­teur » de la publi­ca­tion dans le der­niers jours du mois de mai, ont été don­nés dans Shiyue pin­glun, qui sont main­te­nant repris dans : Zhong­guo minyun yuan ziliao jingxuan [choix de docu­ments ori­gi­naux rela­tifs au mou­ve­ment démo­cra­tique chi­nois], vol. 2, Shiyue pin­glun chu­banshe, Hong Kong, novembre 1989, pp.32 – 36, 37 – 38, et 39 – 41 [abré­gés par la suite en : SP I, SP II ou SP III].). La cita­tion pro­vient ici de SP I, p.32..

Là ne se bor­ne­ra pas le rôle de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin. Ceux qui la com­posent vont s’ap­pli­quer aus­si­tôt à entraî­ner le pro­lé­ta­riat péki­nois dans le mou­ve­ment mais, cette fois, en tant que sujet et pas uni­que­ment comme une force d’ap­point. Cela, pour deux rai­sons. D’une part — rai­son acces­soire —, parce que les membres de l’U­nion sont per­sua­dés que les étu­diants, aban­don­nés à leurs seules forces, n’ob­tien­dront rien du gou­ver­ne­ment et que seule la coa­li­tion des pro­duc­teurs directs, eux qui détiennent le pou­voir de para­ly­ser le pro­cès de pro­duc­tion, assure quelque chance aux reven­di­ca­tions étu­diantes d’a­bou­tir. D’autre part — et l’on tient là la rai­son fon­da­men­tale —, parce qu’ils sont inti­me­ment convain­cus qu’une par­ti­ci­pa­tion concrète des masses labo­rieuses, et du reste de la popu­la­tion, contri­bue­ra à créer une situa­tion ren­dant tout retour en arrière impos­sible, et, par­tant, « à envoyer la tyran­nie en enfer » [doc. n°3], à « ren­ver­ser la dic­ta­ture et le tota­li­ta­risme » et à « pro­mou­voir la démo­cra­tie » [doc n°9]: pour l’U­nion auto­nome des ouvriers, en effet, — et ses repré­sen­tants pre­naient, en ce sens, le contre-pied de l’o­pi­nion des lea­ders étu­diants —, il n’a jamais fait de doute qu’a­vec la pro­cla­ma­tion de la loi mar­tiale, une nou­velle phase avait débu­té qui reje­tait au deuxième plan les ini­tia­tives étu­diantes. La jeu­nesse des écoles, selon elle, en s’en­gouf­frant dans la coche entaillée par la mort de Hu Yao­bang et en menant les choses aus­si loin qu’elle en avait la facul­té, avait accom­pli sa tâche his­to­rique [doc n°5]. Une pre­mière manche avait été rem­por­tée [doc n°11], s’ou­vrait alors la « bataille déci­sive » dans laquelle les ouvriers avaient leur mot à dire. Les appels de l’U­nion ne prêtent à aucune équi­voque sur ce point [doc n°9, 11, 12, 13, 15]qui déve­loppent presque une morale du sacri­fice [doc. n°3, 5]. Le mou­ve­ment s’é­tant, doré­na­vant, mué en un mou­ve­ment glo­bal de la socié­té 4SP I, pp. 32 – 33., il reve­nait à la socié­té entière de l’as­su­mer, et en tout pre­mier lieu à la classe ouvrière. Le 20 mai, l’U­nion énonce ses objec­tifs : « Lut­ter pour la démo­cra­tie, s’op­po­ser à la dic­ta­ture, sou­te­nir et pro­té­ger les étu­diants qui font la grève de la faim, et accé­lé­rer le pro­ces­sus de démo­cra­ti­sa­tion du pays…» [doc n°6]. Et le len­de­main, elle exté­ro­rise sans ambages la ferme pré­ten­tion de conduire la manœuvre : son but « consiste à diri­ger cor­rec­te­ment ce mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote » [doc n°7]. Les membres de l’U­nion — armés de cette cer­ti­tude que les auto­ri­tés chi­noises leur res­sassent depuis des lustres, et que sti­pule la Consti­tu­tion, à savoir que la classe ouvrière dirige la Chine, et prou­vant qu’à leur tour ils savent jouer du lan­gage qui sanc­ti­fie la dic­ta­ture du pro­lé­ta­riat — esti­me­ront que la « classe ouvrière [étant] la classe la plus avan­cée », il lui revient d’en « incar­ner la force car­di­nale » [doc n°9, 12]. Tout en se plai­gnant que tel ne soit pas le cas dans la socié­té actuelle : « Une réforme radi­cale du sys­tème d’É­tat […] per­met­tra au peuple de deve­nir le maître véri­table » [doc n°17]. L’U­nion rêve, donc, d’ex­pri­mer « véri­ta­ble­ment les aspi­ra­tions des ouvriers » [doc n°8, 16]. Selon toute vrai­sem­blance, l’i­dée du pro­lé­ta­riat inves­ti d’une mis­sion éman­ci­pa­trice, chère à Marx, sous-ten­dait la dia­lec­tique de l’U­nion auto­nome. Tou­te­fois, à dis­tance et vu de l’ex­té­rieur, on a du mal à dis­tin­guer, dans un dis­cours dont les accents tra­hissent tous les dehors de l’a­vant-gar­disme, entre une argu­men­ta­tion pure­ment rhé­to­rique et ce qui relève de l’adhé­sion sin­cère à un pos­tu­lat éthique.

Pour obli­ger les auto­ri­tés à exau­cer les vœux des gré­vistes de la faim 5À savoir : 1) réha­bi­li­ta­tion du mou­ve­ment étu­diant et dénon­cia­tion de l’é­di­to­rial du 26 avril ; 2) ouver­ture d’un dia­logue d’é­gal à égal retrans­mis en direct à la télé­vi­sion., donc, l’U­nion pen­se­ra à user de la menace du débrayage. (Recours à une forme élé­men­taire du com­bat ouvrier qui n’en témoigne pas moins d’une cer­taine audace si l’on songe que la der­nière Consti­tu­tion chi­noise, celle de 1982, dénie à la popu­la­tion le droit de grève 6Depuis 1982, de nom­breux cas de grèves nous sont néan­moins connus. Pour un inven­taire, voir : Chiang Chen-chang, The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na, op. cit., p.90 sq.; J.-L. Dome­nach, « Poli­tique sou­ter­raine et agi­ta­tion sociale dans la Chine post-maoïste », in varii auc­tores, la Socié­té chi­noise après Mao (entre auto­ri­té et moder­ni­té), Fayard, Paris, 1986, pp.91 – 129., et qui ne laisse pas d’être éton­nant si on consi­dère que l’U­nion a mul­ti­plié les pro­fes­sions de foi légalistes[doc n°4, 7, 8, 16] ). Ain­si, le 19 mai, l’U­nion évoque un éven­tuel arrêt de tra­vail total qui dure­rait vingt-quatre heures, à comp­ter du len­de­main, midi [doc n°5]. Et, effec­ti­ve­ment, le 20 mai, à cinq heures huit, très exac­te­ment 7Cf. Beiz­huang de minyun, op. cit., p.78., elle lan­ce­ra un mot d’ordre de grève géné­rale auprès des actifs de la ville, mais pour une durée illi­mi­tée (l’ap­pel ne s’é­tend pas aux agents des sec­teurs de l’élec­tri­ci­té, de l’eau et du gaz, ni à ceux des postes et télé­com­mu­ni­ca­tions) qui ne s’a­chè­ve­ra qu’a­vec le départ des troupes, de Pékin. Quant à appré­cier en toute rigueur les réper­cus­sions de cet appel, la besogne ne se révèle pas aisée. Certes, les auto­ri­tés ne man­que­ront pas d’ar­guer des désordres sur­ve­nus dans la pro­duc­tion et l’a­mé­na­ge­ment du tra­vail pour légi­ti­mer l’in­tru­sion de l’ar­mée, mais cela ne nous ren­seigne nul­le­ment sur l’am­pleur des débrayages. Pour autant que nous puis­sions tran­cher, tout porte à croire qu’ils sont res­tés très mar­gi­naux, les auto­ri­tés n’ayant ces­sé de jouer alter­na­ti­ve­ment de la carotte et du bâton pour dis­sua­der toute ini­tia­tive : les direc­tions des usines ont bran­di l’é­pou­van­tail des licen­cie­ments 8On a par­lé d’é­quipes de com­mis­saires poli­tiques effec­tuant des tour­nées d’ins­pec­tion sur les lieux de tra­vail pour dres­ser des listes noires (cf. R. Frank­lin, « La Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », Libé­ra­tion, Paris, 30 mai 1989, p. 24 [repris main­te­nant dans : Chine, le prin­temps de Pékin de la liber­té au mas­sacre, Libé­ra­tion col­lec­tion numé­ro 1, Paris, juin 1989, p. 72] ). ou pro­mis des « primes de sta­bi­li­té » 9Ain­si à Shan­ghai où des « primes de sta­bi­li­té », de 50 yuans ont été offertes pour res­ter à l’é­cart des mani­fes­ta­tions (AFP, 11 juin).. Même si l’U­nion auto­nome a pu, dans un accès d’op­ti­misme serein, cer­ti­fier que : « per­sonne n’[était] en mesure de […] contraindre [les ouvriers], sous la menace des armes [doc n°12], au tra­vail, qu’elle ait son­gé, le 22 mai, à le réité­rer, nous incline à pen­ser que son appel à inter­rompre la pro­duc­tion n’a­vait pas dû être enten­du 10Cf. « Beiz­huang de minyun », op. cit., p.90. « Nous n’a­vons pas encore les moyens de lan­cer des appels à la grève » admet­tront les membres de l’U­nion (cf. R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit.)..

Notons, éga­le­ment, que l’U­nion ne se tien­dra pas à l’é­cart des démons­tra­tions de rue. Elle para­de­ra, sous son dra­peau et der­rière ses cali­cots, dans les grands cor­tèges de Pékin, et en par­ti­cu­lier dans ceux du 25 et du 28 mai, pro­po­sant, pour l’oc­ca­sion, ses propres slo­gans [doc. n°10 et 15].

L’auto-organisation

À sa fon­da­tion, l’U­nion éta­bli­ra un comi­té per­ma­nent qui dési­gne­ra un com­man­dant en chef. Mais la ques­tion de l’au­to­ri­té ne s’est aucu­ne­ment impo­sée à elle comme une prio­ri­té, l’im­pro­vi­sa­tion conser­vant une part pré­pon­dé­rante : « Au début, nous n’a­vons pas pro­cé­dé à des élec­tions. Nous avons don­né la prio­ri­té à la qua­li­té. Et ceux qui en avaient le désir et le talent, nous leur avons confié le rôle de diri­geants » 11SP I, p. 33. Ensuite, le 21 mai, l’U­nion assi­gne­ra les postes au sein de son comi­té per­ma­nent et com­mu­ni­que­ra son orga­ni­gramme : un col­lec­tif de direc­tion, un secré­ta­riat, un bureau à la pro­pa­gande, un ser­vice d’in­ten­dance et un bureau de liai­son [doc n°7] 12Vers la même époque, un res­pon­sable de l’U­nion révé­lait l’or­ga­ni­gramme sui­vant : secré­ta­riat, bureau de pro­pa­gande, bureau de liai­son, bureau d’ac­cueil, ser­vice d’in­ten­dance, ser­vice d’ordre et bureau de dif­fu­sion [radio] (SP I, p. 33).. Le 25 mai, elle ren­dra public un « Pro­gramme pré­pa­ra­toire », éla­bo­ré, semble-t-il, le 21, où elle se dépeint par-des­sus tout comme une orga­ni­sa­tion auto­nome et indé­pen­dante, que cha­cun rejoint (ou quitte) volon­tai­re­ment. Et, trois jours plus tard, le 28, elle divulgue ses « Sta­tuts pro­vi­soires », plate-forme qui intègre, dans son pré­am­bule, le « Pro­gramme pré­pa­ra­toire ». Mais ces sta­tuts décrivent en fait le fonc­tion­ne­ment interne d’une orga­ni­sa­tion à venir : l’as­sem­blée géné­rale, le comi­té per­ma­nent et la com­mis­sion exé­cu­tive [doc n°16]. Car, par­lant d’elle, l’U­nion auto­nome n’é­vo­que­ra jamais autre chose qu’une com­mis­sion pré­pa­ra­toire [doc n°21]. C’est assez dire que l’U­nion ne s’est jamais consi­dé­rée autre­ment que comme une asso­cia­tion tran­si­toire « adap­tée à la situa­tion » [doc n°7] 13cf. SP I, p. 33, une « orga­ni­sa­tion spon­ta­née pro­vi­soire créée par les ouvriers de la capi­tale dans une période excep­tion­nelle » [doc n°6], et qu’elle avait en vue la for­ma­tion d’une struc­ture stable, aux contours fermes.

L’U­nion auto­nome, quand bien même sa rai­son sociale sug­gé­re­rait le contraire, n’é­tait pas un corps stric­te­ment péki­nois. Elle englo­bait, dès l’o­ri­gine, des tra­vailleurs venus de tous les coins du pays que les mani­fes­ta­tions étu­diantes avaient atti­rés à la capi­tale. Et c’est à bon droit qu’elle aurait pu se pré­va­loir du titre d’«Union auto­nome des ouvriers chi­nois ». Mais, pour des rai­sons qui res­sor­tissent assu­ré­ment à la tac­tique, ses fon­da­teurs lui ont déli­bé­ré­ment sub­sti­tué une déno­mi­na­tion plus modeste, propre à ne pas inquié­ter les auto­ri­tés. On ne sache pas que Deng Xiao­ping soit un fami­lier de la langue d’Ho­mère, mais s’il ignore d’où elle vient, il sait mieux que qui­conque — lui qui pré­side aux des­ti­nées d’un par­ti qui ne comp­tait qu’une cin­quan­taine de sec­ta­teurs lors de sa fon­da­tion, en juillet 1921 et qui est aujourd’­hui le par­ti le plus impor­tant en nombre dans le monde —, où peut conduire l’au­to­no­mie. Et, sous son règne ou sous celui de Mao, chaque fois qu’un cercle quel­conque a fait mine de se consti­tuer sur une base natio­nale, ou regrou­pant toutes les couches de la socié­té, les « Jésuites de l’É­tat », pour para­phra­ser Marx, n’ont eu de cesse de le réduire à néant.

Signa­lons ici l’exis­tence de mul­tiples orga­ni­sa­tions ouvrières libres dis­sé­mi­nées dans tout le pays, dont rien n’au­to­rise à éta­blir avec cer­ti­tude si elles entre­te­naient entre elles des liens orga­niques ou si elles se sont consti­tuées à l’i­mi­ta­tion de celle de leurs homo­logues de Pékin 14Un res­pon­sable de l’U­nion décla­rait à la fin du mois de mai à un inter­lo­cu­teur de Hong Kong : « Quant à la façon de pro­mou­voir ce mou­ve­ment démo­cra­tique, tu me per­met­tras de ne pas abor­der le sujet ici. Je peux seule­ment dire que nous espé­rons construire des orga­ni­sa­tions comme l’U­nion auto­nome des ouvriers. » (SP III, p. 41.). L’é­ten­due du phé­no­mène auto­no­miste, sur lequel nous sommes encore mal ren­sei­gnés, ne s’est d’ailleurs révé­lée qu’à l’heure où les auto­ri­tés ont déclen­ché l’of­fen­sive, les cir­cu­laires sur l’in­ter­dic­tion des « orga­ni­sa­tions illé­gales », les avis de recherche et les comptes ren­dus d’ar­res­ta­tion men­tion­nant des com­pa­gnies dont par­fois nul ne soup­çon­nait l’exis­tence : le Groupe de sou­tien des ouvriers de Wuhan, l’U­nion auto­nome des ouvriers de Shan­ghai, l’U­nion auto­nome des ouvriers de Nan­kin, l’U­nion auto­nome et démo­cra­tique des ouvriers de Xi’an, l’U­nion auto­nome des ouvriers de Chang­sha, l’U­nion auto­nome des ouvriers de Hangz­hou, l’U­nion auto­nome des ouvriers du Guiz­hou, la Soli­da­ri­té de Nan­chang, etc. 15Cf. Ming­bao, Hong-kong, 13 juin 1989, p. 6. Une Union auto­nome des ouvriers de Can­ton a même choi­si de s’é­di­fier au len­de­main des mas­sacres de Pékin [doc n°23]. Mais nous y reviendrons.

L’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin enre­gis­trait les ins­crip­tions, sans dis­tinc­tion de branche ou de sec­teur d’ac­ti­vi­té. Des employés de plus de qua­rante indus­tries de la ville (les­quelles embauchent envi­ron cent mille per­sonnes) s’y seraient ain­si affi­liés 16Cf. Chi­na’s Inde­pendent Labour Move­ment, Hong Kong Trade Union Edu­ca­tion Centre-Asia Moni­tor of Resource Cen­ter, Hong Kong, June 1989, p.10.. Mais des tra­vailleurs de la capi­tale paraissent avoir opté pour une struc­ture ver­ti­cale : une Union auto­nome des ouvriers de la construc­tion urbaine a ain­si été fon­dée le 21 mai [doc n°22].

Res­treinte, au départ, à quelques indi­vi­dus — « Une dizaine d’entre nous se sont ren­con­trés là [place Tian’an­men], et l’i­dée de faire quelque chose ensemble nous a sem­blé très natu­relle. » 17Zhao Lin­pu, menui­sier de trente-cinq ans. Pro­pos recueillis par R. Frank­lin, la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois, op. cit. —, l’U­nion auto­nome reven­di­quait cinq mille cinq cents cartes au bout d’une dizaine de jours (soit au moins un repré­sen­tant dans cha­cune des deux mille usines de Pékin 18Cf. R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit. Les affi­lia­tions étaient pour la plu­part indi­vi­duelles et sanc­tion­nées par la déli­vrance d’une carte (SP I, p. 34 ; Chi­na’s Inde­pendent Labour Move­ment, op. cit., p. 3). Des cartes ont été exhi­bées à la télé­vi­sion de Pékin, le 14 juin 1989 (bul­le­tin des écoutes radio­pho­niques de la BBC, Sumr­na­ry of World Broad­casts [Part 3 : Far East], Londres, [abré­gé par la suite en SWB], FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​10).), et si on adjoint à ce chiffre le nombre des sym­pa­thi­sants pro­cla­més dans les entre­prises, ce sont presque treize mille indi­vi­dus qui se seraient bien­tôt recon­nus dans la pra­tique et les inten­tions de l’or­ga­ni­sa­tion 19Cf. Dépêches AFP, Pékin, 30 mai et 2 juin 1989..

Les res­pon­sables de l’U­nion ne se sont pas conten­tés d’é­crire, ils se sont aus­si beau­coup dépen­sés en harangues : les haut-par­leurs de la radio de l’U­nion, ins­tal­lés sur la place Tian’an­men, égre­naient inlas­sa­ble­ment leurs mots d’ordre, les pré­sen­ta­teurs n’in­ter­rom­pant leur lec­ture que pour dif­fu­ser l’In­ter­na­tio­nale. Des man­da­taires de l’U­nion par­taient, aus­si, sillon­ner nuit et jour, les rues de la cité, ou les alen­tours des éta­blis­se­ments de la région, à bord d’un mini­bus équi­pé de haut-par­leurs, la « voi­ture de pro­pa­gande » 20Cf. SP II, p. 38 ; R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit. La « voi­ture de pro­pa­gande » est évo­quée dans le docu­ment n°10..

Jus­te­ment, quels furent les thèmes de cam­pagne ? L’en­thou­siasme éveillé par les opé­ra­tions étu­diantes chez les ouvriers de la capi­tale jus­ti­fiait leur appui, mais il ne moti­vait pas, à lui seul, leur par­ti­ci­pa­tion. Les ouvriers chi­nois avaient, pour eux-mêmes, des rai­sons de s’en­flam­mer. Ces rai­sons, plu­sieurs des textes que l’U­nion a édi­tés les évoquent, bien que de façon allu­sive. À consi­dé­rer le cor­pus éta­bli (nous lais­sons de côté les exi­gences stric­te­ment conjonc­tu­relles, comme la demande d’une réunion de l’As­sem­blée popu­laire natio­nale), il appert que les doléances gra­vitent com­mu­né­ment autour des thèmes sui­vants : l’é­chec de la réforme éco­no­mique [doc. nos 1, 2, 3, 4, 14, 18], la cor­rup­tion man­da­ri­nale et l’af­fai­risme offi­ciel [doc. nos 1, 2, 3, 4, 14, 18], l’in­suf­fi­sance des salaires [doc. nos 1 et n° 4], l’in­fla­tion [doc. nos 1, 2, 3, 4, 14], l’ex­ploi­ta­tion ou les sanc­tions éco­no­miques [doc. n° 3 et n° 4]. À ces doléances, qui ont été à l’o­ri­gine, dès avant les évé­ne­ments d’a­vril-juin, de conflits col­lec­tifs expli­cites 21Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na », op. cit., p. 90 sq., s’a­joutent des reven­di­ca­tions posi­tives : les droits de l’homme, le res­pect de la digni­té humaine, la démo­cra­tie, le res­pect de la léga­li­té, la réforme, la liber­té [doc. nos 3, 4, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18]. Pour­tant, indé­pen­dam­ment de l’embarras qu’elle a éprou­vé pour expli­ci­ter son pro­jet — et peut-être même, plus tri­via­le­ment, pour le sai­sir —, afin, sub­sé­quem­ment, de le com­mu­ni­quer, c’est cer­tai­ne­ment la ten­ta­tive en soi de s’é­ri­ger de manière auto­nome qui consti­tue­ra l’ap­port pri­mor­dial de l’U­nion à la convul­sion du prin­temps 1989. Cette ten­ta­tive ne tra­hit rien d’ac­ci­den­tel. Sans même s’é­ver­tuer à rat­ta­cher la pra­tique des ouvriers chi­nois à l’ex­pé­rience pro­lé­ta­rienne uni­ver­selle, force est d’ad­mettre que, depuis la fin de la « Révo­lu­tion cultu­relle », chaque fois que les Chi­nois ont eu le loi­sir de res­pi­rer, ils ont for­mu­lé le sou­hait de créer un lieu où ils se ras­sem­ble­raient seuls et sans inter­mé­diaires pour dis­cu­ter de leurs pro­blèmes et envi­sa­ger la façon de les régler 22Des ten­ta­tives nous sont connues, au cours de la décen­nie pré­cé­dente, ayant eu pour but de mettre sur pied des syn­di­cats libres. Voir : Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na », op. cit.; J.-L. Dome­nach, « Poli­tique sou­ter­raine et agi­ta­tion sociale dans la Chine post-maoïste », op. cit.. Les efforts déployés par l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin visaient, avant tout, à l’or­ga­ni­sa­tion, à une auto-orga­ni­sa­tion. Et l’ob­jur­ga­tion lan­cée, par l’U­nion, à cha­cune des couches de la socié­té, et avant tout à la classe ouvrière 23Cf. SP III, p. 41., de se fédé­rer sur une base ana­logue à la sienne [doc. n° 15], allait bien au-delà de toutes les reven­di­ca­tions ponc­tuelles qu’elle aurait pu hasar­der si le temps le lui en avait été accor­dé. « Conseillez-vous soi­gneu­se­ment », recom­mande Erik Satie dans une de ses Gnos­siennes, l’U­nion aurait pu faire de ce cri sa devise. On note­ra que, d’une cer­taine façon, l’U­nion a fran­chi le stade des vel­léi­tés pures : endos­ser, par le biais des équipes de piquets ouvriers, les besoins de la popu­la­tion, voi­là qui dépas­sait la simple com­bi­nai­son tac­tique — assu­rer coûte que coûte l’ordre dans la cité pour que le pou­voir ne tire pas pré­texte du chaos pour inter­ve­nir —, en admi­nis­trant la preuve, de fac­to, que les ouvriers de la capi­tale ne recu­le­raient pas, ici et main­te­nant, à prendre les affaires en main.

Une opposition ouvrière instituée

En un peu moins de trois semaines — telle aura été sa durée de vie —, l’U­nion a quand même réus­si, à défaut de figno­ler un pro­gramme futur d’ac­tion ou de démon­trer la cohé­rence d’un pro­jet géné­ral, à pré­sen­ter l’es­quisse d’une plate-forme orga­ni­sa­tion­nelle. Syn­di­cat ou par­ti poli­tique ? L’u­nion se vou­lait avant toute chose une orga­ni­sa­tion de masse [doc. n° 8], et elle s’est défi­nie elle-même, une fois au moins, comme une « orga­ni­sa­tion syn­di­cale » [doc. n° 7]. (Par­lant d’elle, d’au­cuns ont sou­li­gné la fas­ci­na­tion du modèle polo­nais, celui de Soli­dar­nosc 24R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit..) Mais, à l’é­vi­dence, l’U­nion n’en­ten­dait pas se satis­faire du rôle tra­di­tion­nel­le­ment dévo­lu aux syn­di­cats dans les pays qui se pré­tendent socia­listes. (On sait que dans l’é­non­cé géné­ral du mar­xisme-léni­nisme le syn­di­cat est conçu comme une cour­roie de trans­mis­sion du par­ti et que l’é­co­no­mique se subor­donne au poli­tique.) Et il n’est pas davan­tage assu­ré qu’ils aient eu en tête le modèle occi­den­tal des cen­trales ouvrières. Car l’U­nion se fixait pour « objec­tif fon­da­men­tal » d’ex­pri­mer dans un même souffle les « idées [ou les reven­di­ca­tions] éco­no­miques et poli­tiques » des ouvriers (et aus­si de « garan­tir à ses adhé­rents l’en­semble des droits légaux ») [doc. n° 8 et 16]. Cela étant, on observe, dans les docu­ments qui nous sont connus, que c’est sur­tout la dimen­sion éco­no­mique qui affleure. Les seules tâches concrètes qui sont envi­sa­gées for­mel­le­ment sont celles qui gra­vitent autour des pro­blèmes rela­tifs à ce qu’on résu­me­ra par l’ex­pres­sion géné­rique de négo­cia­tion du contrat de tra­vail (dans son accep­tion large): la défense des droits et des inté­rêts des ouvriers [doc. n° 8 et 16]. Tou­te­fois, l’U­nion se défen­dra de n’as­pi­rer à être qu’une « orga­ni­sa­tion de bien-être » [doc. n° 8 et 16]. On dis­cerne là une cri­tique impli­cite du man­dat rem­pli par le syn­di­cat offi­ciel, lequel syn­di­cat n’est cité à aucun moment dans les textes en notre pos­ses­sion (celui-ci ne s’est-il pas muré dans un silence pru­dent tout le long des évé­ne­ments, non­obs­tant le timide geste esquis­sé par cer­tains de ses cadres en faveur de la cause étu­diante ? 25Le 18 mai, la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine offri­ra cent mille yuans à la Croix-Rouge de Pékin, pour venir en aide aux étu­diants qui font la grève de la faim. Cf. Agence Xin­hua, 18 mai 1989 (SWB, FE/​0472, 2 juin 1989, B2/​11); « La Fédé­ra­tion natio­nale des syn­di­cats de Chine fait don de 100.000 yuans », Da Gong Bao (L’im­par­tial) Hong Kong, 19 mai 1989, p. 5).). En revanche, d’autres sources spé­ci­fient la posi­tion de l’U­nion à l’é­gard de la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine : les fon­da­teurs de l’U­nion étaient tous issus de la Fédé­ra­tion, ils en jugeaient, bien sûr, l’in­fluence pra­tique nulle et remet­taient en cause et son idéo­lo­gie et son mode de fonc­tion­ne­ment 26Cf. SP I, p. 35., même s’il n’en­trait pas dans leur vue, aprio­ri, de lui suc­cé­der. L’U­nion ne bri­guait pas non plus, mani­fes­te­ment, un rôle de par­ti poli­tique 27Cf. SP III, p. 39 : « l’U­nion auto­nome des ouvriers n’est qu’une orga­ni­sa­tion sociale, aucu­ne­ment un par­ti, et elle ne devien­dra pas un par­ti ».. Et, comme pour mar­quer irré­mé­dia­ble­ment sa rup­ture d’a­vec la concep­tion bol­che­vique de l’ordre social, elle déniait à toute orga­ni­sa­tion le droit de s’im­mis­cer dans ses affaires, mieux, elle a exi­gé haut et fort celui de contrô­ler le Par­ti com­mu­niste — ce qui sup­po­sait non seule­ment le rejet mais une inver­sion totale des canons léni­nistes [doc. n° 8 et 16]. Encore que cette inver­sion soit tou­jours pen­sée dans le réfé­ren­tiel du sys­tème. En effet, si, comme nous venons de le noter, on tra­que­rait en vain toute réfé­rence à la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine dans le dis­cours de l’U­nion auto­nome, il n’en va pas de même avec le Par­ti com­mu­niste, qui s’y voit qua­li­fié de « Par­ti de la classe ouvrière » [doc. N° 16] 28Cf. SP III, p. 39.. L’U­nion insis­te­ra sur ce point, ce n’est pas la direc­tion du Par­ti dans son inté­gra­li­té qu’elle conteste, ce sont cer­tains des digni­taires (les pre­miers, il est vrai ) [doc. n° 18], mais elle n’en dénon­ce­ra pas moins toutes les intrigues des­ti­nées à l’a­mal­ga­mer avec les bureau­crates tom­bés en dis­grâce, Zhao Ziyang ou bien encore l’un ou l’autre de ses hommes liges. Consciente aus­si des risques de mani­pu­la­tion par une fac­tion du pou­voir, l’U­nion n’ou­blie­ra pas de fus­ti­ger les « poli­ti­ciens ambi­tieux qui se trouvent à l’in­té­rieur du Par­ti com­mu­niste » et qui seraient ten­tés, sur le dos du peuple, d’«usurper le pou­voir » [doc. n° 4]. Là encore, il serait déli­cat de sépa­rer ce qui relève de la tac­tique (ne pas atta­quer de front le Par­ti) et ce qui accuse un fond d’illu­sions, n’é­tait le fait que l’U­nion a avan­cé son pro­gramme à une époque où elle pou­vait espé­rer une réforme du régime. Cer­tains des res­pon­sables de l’U­nion se sont même essayés à pen­ser une socié­té de plu­ri­par­tisme, domi­née par une « Confé­rence poli­tique de par­ti­ci­pa­tion » réunis­sant plu­sieurs par­tis, dont le Par­ti com­mu­niste, et toutes sortes de grou­pe­ments sociaux, avec, au pre­mier rang, l’U­nion elle-même, dont les délé­gués seraient élus 29Id.. En quelque sorte, l’U­nion se serait alors méta­mor­pho­sée en oppo­si­tion ouvrière ins­ti­tuée. Tou­te­fois, la der­nière pro­fes­sion de foi de l’U­nion se pro­nonce sans ambages pour un ren­ver­se­ment du régime : « La pra­tique prouve, y lit-on, que désor­mais la ques­tion qui se pose au mou­ve­ment démo­cra­tique est la ques­tion du pou­voir » [doc. N° 18] 30Il n’est pas inutile de pré­ci­ser ici que les textes de l’U­nion ont sou­vent été des œuvres spon­ta­nées, reflé­tant davan­tage la posi­tion indi­vi­duelle de leur auteur que celle du groupe..

Il est une dimen­sion du pro­jet de l’U­nion qu’on ne sau­rait éva­cuer : le sou­ci, qui confine qua­si­ment à la manie, de ne pas s’é­car­ter du strict cadre de la loi. À dif­fé­rentes reprises, on ren­contre sous la plume des rédac­teurs de l’U­nion des locu­tions comme : « res­pect de la léga­li­té », ou : « usage de tous les moyens légaux » [doc. nos 4, 7, 8, 16]. Et un de leurs tracts le sti­pule : « nous avons ins­crit sur notre ban­nière : “léga­li­té”» [doc n° 4]. Au demeu­rant, il avait été pré­vu que les adhé­rents de la future orga­ni­sa­tion prê­te­raient le ser­ment sui­vant : « Je res­pec­te­rai de mon plein gré la Consti­tu­tion et les lois de l’É­tat…» [doc. n° 16]. À telle enseigne qu’in­ter­ro­gés par des syn­di­ca­listes de Hong Kong sur la ques­tion de savoir si l’U­nion cher­che­rait à conqué­rir le droit de grève, les man­da­taires de l’U­nion auraient répon­du qu’ils sou­hai­taient avant toute chose s’or­ga­ni­ser dans le cadre du sys­tème légal en l’é­tat 31Cf. Chi­na. Inde­pendent Labour Move­ment, op. cit., p. 5.. Un rigo­risme, affec­té ou sin­cère, qu’illustre aus­si la volon­té de l’U­nion de se voir recon­naître offi­ciel­le­ment (sur ce point, au reste, elle ne se sin­gu­la­rise en rien, ni vis-à-vis des coor­di­na­tions estu­dian­tines, ses contem­po­raines, ni vis-à-vis des ligues non offi­cielles du pre­mier « Prin­temps de Pékin », de dix ans ses aînées 32Id., p. 5. L’U­nion auto­nome des étu­diants de Pékin affi­che­ra, une pre­mière fois, le 28 avril, la même volon­té. Sur les reven­di­ca­tions du mou­ve­ment démo­cra­tique du « Prin­temps de Pékin » de 1978, cf. Huang S., A. Pino, I.. Epstein, Un bol de nids d’hi­ron­delles ne fait pas le prin­temps de Pékin, Biblio­thèque asia­tique, Chris­tian Bour­gois édi­teur, Paris, 1980.). Ren­dons-lui cette jus­tice, elle ne s’est pas ber­cée long­temps d’illu­sions sur les chances d’une léga­li­sa­tion à court terme 33Cf. SP III, p. 41..

Les prodromes de la répression et les massacres de juin

Car les évé­ne­ments n’al­laient pas tar­der à ren­sei­gner les membres de l’U­nion sur ce point. Le mar­di 30 mai 34Le 1er juin, au dire de Chen Xitong, « Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), sup­plé­ment à Bei­jing infor­ma­tion, Pékin, n° 30, 24 juillet 1989, p.XIX., trois des leurs, Shen Yin­han, Bai Dong­ping et Qian Yuming, sont arrê­tés par la Sécu­ri­té publique, de même que 11 motards appar­te­nant aux « tigres volants », une escouade de com­mer­çants pri­vés qui sillon­nait la ville pour éva­luer l’a­van­cée des troupes char­gées d’im­po­ser la loi mar­tiale et en infor­mer la popu­la­tion. C’é­tait un pre­mier aver­tis­se­ment des auto­ri­tés dont on ne mesu­re­ra pas, alors, l’importance.

L’U­nion auto­nome se trans­porte au siège de la police, qu’un mil­lier d’ou­vriers ou d’é­tu­diants assié­ge­ront 35Voir aus­si le Xin­wen­bao, Hong Kong, 30 mai 1989 (tra­duc­tion anglaise dans : SWB, FE/​0471, 1er juin 1989, B2/​10); dépêche AFP, 30 mai 1989.. Elle rédige une « Dépêche », fai­sant état des pour­par­lers avec les forces de l’ordre [doc. n° 19], et un « Avis urgent » [doc. n° 20] nar­rant les détails de la cap­ture de leur mili­tant. Le soir, une réunion se tient sur la place Tian’an­men : Han Dong­fang donne lec­ture des « Sta­tuts pro­vi­soires » de l’U­nion [doc. n° 16] et le conseiller juri­dique des ouvriers expose la situa­tion des mili­tants enfer­més. Une « Confé­rence de presse » qui fera l’ob­jet d’un bul­le­tin [doc. N° 21].

Le mer­cre­di 31 mai, les étu­diants pro­testent contre la garde à vue des trois ouvriers. Dans l’a­près-midi, ils sont quelque trois mille à défi­ler sur la place Tian’an­men d’où il s’é­bran­le­ront, en cor­tège, escor­tés de plu­sieurs mil­liers d’ou­vriers, pour rejoindre le bureau de la Sécu­ri­té publique. Là, la foule scande : « Ouvriers, étu­diants, tous unis pour conqué­rir la démo­cra­tie ! » ou « Non aux rapts ! » Pour finir, les émis­saires de l’U­nion auto­nome des ouvriers annoncent que leurs com­pa­gnons ont été relaxés à 17 heures. Mais le même jour, à l’an­tenne de radio Pékin, est lu un com­mu­ni­qué de l’A­gence Xin­hua qui signale que les gérants de qua­rante entre­prises de la capi­tale ont deman­dé par écrit aux auto­ri­tés « d’in­ter­dire les orga­ni­sa­tions illé­gales qui pro­voquent l’a­gi­ta­tion au nom des ouvriers », soit l’U­nion auto­nome des ouvriers 36Radio Pékin, 31 mai 1989 (SWB, FE/​0473, 3 juin 1989, B2/​1). L’in­for­ma­tion sera reprise dans le Bei­jing ribao du 1er juin, et la liste nomi­na­tive des signa­taires publiée le len­de­main dans ce même jour­nal ― à la demande, indi­que­ra-t-on, des lec­teurs ―, sous ce titre, on ne peut plus expli­cite : « Res­pon­sables de 40 entre­prises de la capi­tale deman­dant éner­gi­que­ment l’in­ter­dic­tion par le gou­ver­ne­ment de l’as­so­cia­tion illé­gale “Union auto­nome des ouvriers » (cf. Bei­jing ribao, 2 juin, p. 1).. Les dés sont main­te­nant jetés.

Le 2 juin, le Bei­jing ribao [quo­ti­dien de Pékin] repro­duit en pre­mière page une : « Décla­ra­tion du syn­di­cat géné­ral de la muni­ci­pa­li­té de Pékin en date du 1er juin, deman­dant éner­gi­que­ment l’in­ter­dic­tion immé­diate de l’or­ga­ni­sa­tion illé­gale “Union auto­nome des ouvriers » [doc. n° 24] où l’on rap­pelle que les syn­di­cats offi­ciels « sont les seules orga­ni­sa­tions socio-poli­tiques à repré­sen­ter les inté­rêts de la classe ouvrière ». 37Dans le même numé­ro du Bei­jing ribao, on trouve une « Lettre de sou­tien adres­sée par le syn­di­cat géné­ral de la muni­ci­pa­li­té de Pékin à tous les ouvriers, employés et cadres syn­di­caux de la capi­tale ».:

Au cours de ces der­niers jours, une petite poi­gnée d’in­di­vi­dus se sont ras­sem­blés et ont fon­dé une orga­ni­sa­tion illé­gale appe­lée l’«Union auto­nome des ouvriers » en se récla­mant fal­la­cieu­se­ment de la classe ouvrière. Ils ont répan­du des rumeurs, dis­tri­bué des tracts, lan­cé des slo­gans deman­dant le ren­ver­se­ment du gou­ver­ne­ment popu­laire, fomen­té des grèves, pris d’as­saut des organes de la sécu­ri­té publique et pré­ten­du qu’ils étaient en train de fon­der une orga­ni­sa­tion auto­nome « com­plè­te­ment indé­pen­dante ». Leurs objec­tifs étaient de divi­ser les rangs de la classe ouvrière et de se livrer à des acti­vi­tés illé­gales des­ti­nées à sabo­ter ouver­te­ment l’ordre social de la capi­tale qui allait en s’améliorant.

Et en pre­mière page du Quo­ti­dien du peuple s’é­tale une mis­sive du pré­sident de la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine. Ni Zhi­fu presse les pro­lé­taires de se ran­ger aux côtés du Par­ti, et de pro­pa­ger ses prin­cipes et sa poli­tique par­mi les masses, cela au pro­fit de la sta­bi­li­té sociale 38«Tous les ouvriers et tous les employés doivent main­te­nir la sta­bi­li­té sociale », le Quo­ti­dien du peuple, 3 juin 1989..

Sur l’at­ti­tude de l’U­nion auto­nome, au cours de la sinistre nuit du 3 au 4 juin, les élé­ments font défaut. On croit seule­ment savoir que ses troupes s’in­ter­po­se­ront entre les étu­diants et les forces de l’ordre, lors de l’as­saut de la place Tian’an­men. Écou­tons un étu­diant de l’U­ni­ver­si­té Qing­hua, pré­sent sur les lieux :

C’est alors qu’un groupe d’ou­vriers et de citoyens des « brave-la-mort » se sont pré­ci­pi­tés. Ramas­sant par terre des bou­teilles et des bâtons, dont ils ont usé comme d’armes, ils ont char­gé l’ar­mée et lui ont oppo­sé une résis­tance achar­née. À ce moment-là, l’U­nion auto­nome [des étu­diants] a don­né l’ordre de battre en retraite hors de la place. Alors, il n’é­tait pas encore 5 heures. 39«Compte-ren­du du mas­sacre de Tian’an­men par un témoin occu­laire », Wen­hui bao, Hong Kong, 5 juin 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numéro.

Chen Xitong, le maire de Pékin, dans son rap­port sur les évé­ne­ments, allègue de son côté :

À cinq heures de l’a­près-midi [le 3 juin], des chefs de la « Fédé­ra­tion auto­nome des étu­diants » et de la « Fédé­ra­tion auto­nome des ouvriers » ont dis­tri­bué sur la place Tian’an­men des cou­teaux, poi­gnards, barres de fer, chaînes de fer et bam­bous poin­tus, et crié qu’«il fal­lait battre à mort tous les sol­dats et poli­ciers cap­tu­rés. » La « Fédé­ra­tion auto­nome des ouvriers » a dif­fu­sé au haut-par­leur un appel à « ren­ver­ser le gou­ver­ne­ment par les armes ». 40Chen Xitong, « Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), op. cit., pp. XX-XXI

Mais il est le seul à affir­mer cela, ou, plus exac­te­ment, seule la ver­sion offi­cielle chi­noise accré­dite la thèse selon laquelle les occu­pants de la place Tian’an­men se seraient armés. Tous les témoins, au contraire — et leurs récits concordent —, font état des recom­man­da­tions insis­tantes pro­di­guées à la foule par le quar­tier géné­ral de la place de ne pas céder à la vio­lence, et attestent qu’«aucun ouvrier n’a jamais usé d’une seule arme » 41Cf., par exemple, Huang S. et A. Pino, entre­tien avec un des diri­geants de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, le Monde, Paris, 1er sep­tembre 1989, p. 8..

Le tri­but de l’U­nion auto­nome aux vic­times de la nuit san­glante sera très lourd. Si l’on en croit Chai Ling, la jeune étu­diante qui était le com­man­dant en chef du quar­tier géné­ral de la place Tian’an­men : «… les membres de l’U­nion auto­nome des ouvriers qui se trou­vaient autour de la place sont tous morts, et ils étaient au moins 20 ou 30 ». 42«Je suis Chai Ling… Je suis tou­jours vivante », in « Beiz­huang de minyun » [le pathé­tique mou­ve­ment pour la démo­cra­tie], Ming­bao chu­banshe, Hong Kong, juin 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numéro.

Pourfendre l’autonomie

La répres­sion ne fait pour­tant que com­men­cer. Car les jours de l’U­nion auto­nome étaient comp­tés depuis les inter­pel­la­tions du 30 mai. Les pre­mières arres­ta­tions inter­viennent, les fuyards sont pour­chas­sés, les réseaux mis en pièces. la Sécu­ri­té publique se tar­gue­ra, ulté­rieu­re­ment, d’a­voir, « avec l’aide d’une infor­ma­tion four­nie par les masses » sai­si, au début du mois de juin, une presse d’im­pri­me­rie clan­des­tine, pro­prié­té de l’U­nion, ain­si que divers autres usten­siles ayant été déro­bés à des véhi­cules mili­taires 43Agence Xin­hua, 15 juin 1989 (SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​12). Chen Xitong accuse, par exemple, l’U­nion auto­nome d’a­voir « cap­tu­ré un poste de radio et un code secret » dans un véhi­cule mili­taire (« Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), op. cit., pp. XXII).. Le 8 juin, le gou­ver­ne­ment popu­laire de la capi­tale répand une cir­cu­laire, la cir­cu­laire n° 14, « sur la red­di­tion des diri­geants des “orga­ni­sa­tions illé­gales » [doc. n° 25] inti­mant l’ordre à l’U­nion auto­nome de s’au­to-dis­soudre et à ses ani­ma­teurs de se livrer d’eux-mêmes à la police, texte qui sera repris et ampli­fié par une cir­cu­laire du minis­tère de la Sécu­ri­té publique en date du 12 juin, lue à l’an­tenne de Radio Pékin la veille 44Radio Pékin, 11 juin 1989. Le texte inté­gral, tra­duit en anglais, a été repro­duit dans : SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​2. et insé­rée dans le Quo­ti­dien du peuple le len­de­main. Le 10 juin, Yang Fuqiang, qu’on tient pour un des conduc­teurs de l’U­nion, est inter­cep­té, et la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine délivre une « Lettre aux ouvriers, employés et cadres syn­di­caux de tout le pays ». Un extrait regarde sans équi­voque l’U­nion autonome :

Nous mène­rons une lutte réso­lue contre la soi-disant « Union auto­nome » et autres orga­ni­sa­tions illé­gales. Elles ont ouver­te­ment mis en avant un pro­gramme appe­lant les ouvriers et les com­mer­çants à se mettre en grève dans l’in­ten­tion de para­ly­ser les villes et de ren­ver­ser le gou­ver­ne­ment. De cette façon, ils ont par­fai­te­ment expo­sé leurs des­seins contre-révo­lu­tion­naires. Il est néces­saire de dési­gner et de démas­quer les diri­geants réac­tion­naires de ces orga­ni­sa­tions illé­gales pour écra­ser leur arro­gance et détruire leur sinistre but. 45«Let­ter from the All-Chi­na Fede­ra­tion of Trade Unions to wor­kers, staff mem­bers and trade union cadres trou­ghout the coun­try » (10 juin 1989), texte trans­mis le 11 juin par l’A­gence Xin­hua, repro­duit dans SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​3. Voir aus­si le Quo­ti­dien du peuple du 12 juin 1989, p.1

Le 14 juin, le bureau de la Sécu­ri­té publique de Pékin émet un avis de recherche contre trois de ses diri­geants, Han Dong­fang, He Lili et Liu Qiang [doc. n° 26], et la télé­vi­sion cen­trale pro­gramme un film où sont éta­lées, entre autre impri­més, des cartes d’adhé­rent de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, ain­si qu’un repor­tage où l’on exhibe cinq membres de l’or­ga­ni­sa­tion tom­bés aux mains de la police et qu’on vient de sou­mettre à l’in­ter­ro­ga­toire 46Télé­vi­sion de Pékin, 14 juin 1989 (SWB, FF./0484, 16 juin 1989, B2/​10).. Le 14 juin, la radio de Shan­ghai pré­vient ses audi­teurs que les « piquets ouvriers spé­ciaux de la capi­tale » ont été déca­pi­tés et que 16 de leurs acti­vistes sont sous les ver­rous 47Radio Shan­ghai, 14 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, 13213)., et le Quo­ti­dien du peuple s’at­tarde sur la red­di­tion de res­pon­sables de l’U­nion auto­nome des étu­diants de Pékin et de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin. Le len­de­main, on apprend que Liu Qiang, a été cap­tu­ré à Wuchuan, en Mon­go­lie inté­rieure, par le ser­vice de la Sécu­ri­té publique de Hoh­hot, de même que Liu Huan­wen — débus­qué, lui, à Shi­jiaz­huang —, qu’on pré­sente comme un des chefs des « piquets ouvriers dépen­dant de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin » 48Agence Xin­hua, 15 juin 1989 (SWB, FE/​0485, 17 juin 1989, B2/​4).. Le 17 juin, la Sécu­ri­té publique de Pékin pré­cise que cent vingt-huit « rebelles », dont quelques-uns font par­tie de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, se sont ren­dus 49Agence Xin­hua, 19 juin 1989 (SWB, FFJ0488, 21 juin 1989, B2/​10)..

Les per­sé­cu­tions débordent les confins de la capi­tale. Dans tout le pays, la chasse aux indé­pen­dan­tistes est ouverte. Et notam­ment la traque aux assem­blées ouvrières. Car la répres­sion, si elle a eu pour pro­pos de châ­tier ceux qui avaient osé se sou­le­ver, tout autant que de décou­ra­ger de nou­velles ten­ta­tions de révolte en abat­tant les cou­rages — Cor­da pavor ster­nit —, s’ex­plique aus­si par ce mobile 50Sur ce point, voir : A. Pino, « À pro­pos du rôle des ouvriers chi­nois dans les évé­ne­ments d’a­vril-juin 1989 » (entre­tien), Bul­le­tin des cor­rec­teurs, CGT, Paris, n°156, novembre 1989 ; A. Pino, « Des liens de sang », Revue poli­tique et par­le­men­taire, Paris, n°944, novembre-décembre 1989.. Deng Xiao­ping ne s’est-t-il pas épan­ché ain­si devant ses col­lègues du nou­veau comi­té per­ma­nent du Bureau politique :

Il faut écra­ser l’é­meute jus­qu’au bout. L’oc­ca­sion est belle. Nous pou­vons, d’un coup, inter­dire dans tout le pays les orga­ni­sa­tions illé­gales. Et c’est vrai­ment une bonne affaire. 51Deng Xiao­ping, « les Points impor­tants d’une conver­sa­tion entre le cama­rade Deng Xiao­ping et les cama­rades Yang Shang­kun, Wan Li, Jian Zemin, Li Peng, Qiao Shi, Yao Yilin, Song Ping et Li Rui­huan., Zhon­gyang ribao [quo­ti­dien cen­tral], Tai­pei, 14 juillet 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numé­ro, sous le titre : « le Par­ti doit être repris en main ».

Dans les tout pre­miers jours de juin, forts des recom­man­da­tions édic­tées par le minis­tère de la Sécu­ri­té publique le 12 juin, les gou­ver­ne­ments popu­laires des divers éche­lons pro­mulguent leurs propres noti­fi­ca­tions, les­quelles concluent que les grou­pe­ments indé­pen­dants sont illi­cites, exhortent les meneurs et leurs troupes à capi­tu­ler, et incitent la popu­la­tion à la délation.

Les ren­sei­gne­ments dont on dis­pose pro­viennent essen­tiel­le­ment des écoutes radio­pho­niques de la BBC. Deux remarques. D’une part, ces infor­ma­tions sont néces­sai­re­ment incom­plètes : elles sont limi­tées dans le temps (les auto­ri­tés chi­noises ayant, assez rapi­de­ment, pré­fé­ré s’a­don­ner à une répres­sion silen­cieuse 52Le 20 juin, la Cour popu­laire suprême a émis une note concer­nant les pro­cé­dures expé­di­tives pour le juge­ment des « contre-révo­lu­tion­naires » : « Il est néces­saire de prê­ter atten­tion à la publi­ci­té, en sélec­tion­nant affaires prin­ci­pales et exem­plaires et en fai­sant une large publi­ci­té au moyen de la radio et de la télé­vi­sion, des jour­naux ou des autres médias, au bon moment, pour aug­men­ter le béné­fice social de ces affaires, répri­mer et décou­ra­ger les cri­mi­nels, et inci­ter les masses à com­battre les contre-révo­lu­tion­naires et ceux qui se sont ren­dus cou­pables de crimes graves » (Radio Pékin, 20 juin 1989. La tra­duc­tion anglaise du texte inté­gral figure dans SWB, FE/​0489, 22 juin 1989, 1325).) et dans l’es­pace (les don­nées concernent les prin­ci­pales loca­li­tés du pays). Elles n’en témoignent pas moins de l’en­ver­gure du fait auto­no­miste. D’autre part, nous n’a­vons rete­nu ici que les infor­ma­tions qui fai­saient direc­te­ment réfé­rence à des alliances ouvrières, à l’ex­clu­sion des coor­di­na­tions étu­diantes, des ami­cales de citoyens, des cénacles ou bien encore des par­tis poli­tiques et autres sectes reli­gieuses 53On pour­ra se repor­ter aux dif­fé­rentes livrai­sons, cou­vrant cette période, du bul­le­tin des écoutes de la BBC : Sum­ma­ry of World Broad­casts (Part 3 : Far East), Londres, ain­si qu’au bul­le­tin d’in­for­ma­tion du comi­té des sino­logues pour la démo­cra­tie en Chine (basé à la Ligue des droits de l’homme), Chro­nique de la répres­sion en Chine, Paris..

Dès le 5 juin, sept adhé­rents de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Hangz­hou sont attra­pés 54Cf. Hangz­hou ribao [quo­ti­dien de Hangz­hou], 10 juin 1989 (cité par le Quo­ti­dien du peuple, édi­tion d’outre-mer, 13 juin 1989).. Le 7 juin, le gou­ver­ne­ment de la ville de Xi’an pros­crit les « orga­ni­sa­tions illé­gales » 55La Sécu­ri­té publique locale publie­ra le 23 une nou­velle cir­cu­laire à ce pro­pos (texte anglais dans : SWB, FE/​0481, 28 juin 1989, B2/​5 – 6 (d’a­près Radio Xi’an [Shaan­xi], 22 juin 1989).. Le 9 juin, le gou­ver­ne­ment muni­ci­pal de Shan­ghai lui emboîte le pas, visant fran­che­ment l’U­nion auto­nome des ouvriers de Shan­ghai (alias Union auto­nome des syn­di­cats de Shan­ghai). Selon la télé­vi­sion de Shan­ghai, neuf membres de l’U­nion seraient gar­dés par la police. Le len­de­main, dans l’a­près-midi, une cen­taine d’é­tu­diants des Uni­ver­si­tés Fudan et Tong­ji assiègent le local de la Sécu­ri­té publique de la ville, pour exi­ger leur libé­ra­tion, aux cris de : « Ren­dez-nous les diri­geants de nos ouvriers ! » 56Radio Pékin, 11 juin 1989 (SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​12); radio Shan­ghai, 12 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​10).. Le 10 juin, tou­jours, dix per­sonnes sont écrouées, qu’on devine proches des « piquets ouvriers » ou de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Nan­kin 57Agence Xin­hua, 10 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​8); Radio Pékin, 10 juin 1989 (SWB, FE/​0483, 15 juin 1989, B2/​10).. Enfin, le gou­ver­ne­ment de la ville de Nan­chang adopte un texte contre les « orga­ni­sa­tions illé­gales » telles que l’U­nion pour la soli­da­ri­té de Nan­chang 58Radio Nan­chang (Jiangxi), 10 juin 1989 (SWB, FE/​0483, 15 juin 1989, B2/​14).. Le 11 juin, le gou­ver­ne­ment pro­vin­cial de l’An­hui s’a­ligne à son tour, emprun­tant un ton com­mi­na­toire vis-à-vis de l’As­so­cia­tion auto­nome des ouvriers de Hefei, de l’U­nion des ouvriers de Hefei ou bien encore de l’As­so­cia­tion spon­ta­née des ouvriers de Hefei 59Radio Hefei (Anhui), 11 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, 13216); Radio Hefei (Anhui), 14 juin 1989 (SWB, FE/​0490, 15 juin 1989, B2/​4). La veille, selon Radio Pékin (13 juin 1989) un des diri­geants de l’As­so­cia­tion spon­ta­née des ouvriers de Hefei se serait livré à la police (SWB, FE/​0491, 24 juin 1989, B2/​7).. Le Conseil syn­di­cal de la muni­ci­pa­li­té de Hefei, de son côté, dans un accès de zèle, apos­trophe les auto­ri­tés pour qu’elles sus­pendent les acti­vi­tés des alliances ouvrières dis­si­dente 60La tra­duc­tion anglaise de leur appel figure dans : SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​16.. Le 12 juin, le gou­ver­ne­ment de la ville de Chang­sha réper­cute l’é­cho des dis­po­si­tions cen­trales tou­chant au sort qu’on doit réser­ver aux « orga­ni­sa­tions illé­gales » et dénonce, entre autres, l’U­nion auto­nome des ouvriers de Chang­sha 61Radio Chang­sha (Hunan), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​17).. Le gou­ver­ne­ment pro­vin­cial du Gan­su éga­le­ment, la cir­cu­laire émise pour l’oc­ca­sion citant nom­mé­ment l’U­nion auto­nome des ouvriers de Lanz­hou 62Radio Lanz­hou (Gan­su), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​10).. De même que le dépar­te­ment de la Sécu­ri­té publique du Zhe­jiang (dix jours plus tard, le 22, on rela­te­ra que dix-huit bandes ont été dis­lo­quées, dont l’U­nion auto­nome des ouvriers de Hangz­hou) 63 Zhe­jiang ribao [quo­ti­dien du Zhe­jiang), 23 juin 1989.. À Xi’an, on confesse que des têtes de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Xi’an ont été incar­cé­rées depuis déjà quelque temps 64Radio Xi’an (Shaan­xi), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​15). (et, le 25 juin, que six membres du Corps des piquets ouvriers de Xi’an ont été empoi­gnés 65Radio Xi’an (Shaan­xi), 25 juin 1989 (SWB, FE/​0494, 28 juin 1989, B2/​6).). Le 13 juin, un mili­tant de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Tian­jin est appré­hen­dé à Yin­chuan 66Agence Xin­hua, 13 juin 1989 (SWB, FFJ0485, 17 juin 1989, B2/​6)., et le dépar­te­ment de la Sécu­ri­té publique de la pro­vince du Guiz­hou fait savoir à la popu­la­tion que cer­taines orga­ni­sa­tions ont été mises hors-la-loi dans un avis où l’on men­tionne une Union auto­nome des ouvriers de Guiyang 67Radio Guiyang (Guiz­hou), 13 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​18).. Le 14 juin, on découvre que l’U­nion pro­vi­soire des ouvriers de Hoh­hot (Mon­go­lie inté­rieure) a été condam­née et que quinze de ses par­ti­sans ont été pla­cés en déten­tion pré­ven­tive 68Radio Hoh­hot (Mon­go­lie inté­rieure), 14 juin 1989 ((SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​20).. Le même jour, le Groupe patrio­tique de sou­tien aux ouvriers de Shan­ghai est déman­te­lé, et huit de ses membres empri­son­nés (et quelques autres le len­de­main) 69Radio Shan­ghai, 14 juin 1989 (SWB, FE/0485,17 juin 1989, B2/​5); Télé­vi­sion de Pékin, 16 juin 1989 (SWB, FE/​0486, 19 juin 1989, B2/​13).. Le 15 juin, c’est la Sécu­ri­té publique de Jinan qui flé­trit les « orga­ni­sa­tions illé­gales » : on dévoi­le­ra, ensuite, l’exis­tence d’une Union auto­nome des ouvriers de Jinan et d’une Union démo­cra­tique des ouvriers de Jinan, deux groupes qui auraient fini par fusion­ner 70Radio Jinan (Shan­dong), 15 juin 1989 (SWB, FE/​0485, 17 juin 1989, B2/​4 – 5).. Le gou­ver­ne­ment de la ville de Wuhan enjoint les « meneurs » et les « cri­mi­nels » à s’a­vouer vain­cus : « Les syn­di­cats auto­nomes mis sur pied dans cer­taines usines de Wuhan sont des orga­ni­sa­tions illé­gales qui n’ont fait l’ob­jet d’au­cun enre­gis­tre­ment et qu’on doit déman­te­ler sur le champ. » 71Radio Wuhan (Hebei), 17 juin 1989 (SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​11).. Le 21 juin, le bureau de la Sécu­ri­té publique de Shan­ghai fait savoir que cent vingt-six indi­vi­dus se sont livrés d’eux-mêmes depuis le 15, par­mi les­quels des mili­tants de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Shan­ghai 72Radio Shan­ghai, 21 juin 1989, (SWB, FE/​0494, 28 juin 1989, B2/​7)..

Le 28 mai, la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine, abon­dant sans réserve dans le sens des « dis­cours impor­tants des cama­rades Li Peng et Yang Shang­kun », convie ses troupes à « rejoindre les larges masses étu­diantes qui s’op­posent réso­lu­ment aux acti­vi­tés d’une poi­gnée d’a­gi­ta­teurs qui poussent sciem­ment les ouvriers à la grève et à pro­vo­quer l’a­gi­ta­tion » 73Agence Xin­hua, 28 mai 1989 (SWB, FE/​0469, 30 mai 1989, B2/​6)..

Société, tout est rétabli…

Les auto­ri­tés chi­noises vont immé­dia­te­ment insis­ter sur les réper­cus­sions éco­no­miques des évé­ne­ments sur­ve­nus au cours des semaines pré­cé­dentes. Chen Xitong, après avoir chif­fré le coût de la « rébel­lion » pro­pre­ment dite — si l’on peut s’ex­pri­mer ain­si —, éva­lue­ra à 1,3 mil­liards de yuans le mon­tant des pertes subies par la pro­duc­tion 74Cf. Bei­jing infor­ma­tion, Pékin, n°28, 10 juillet 1989, p. 7..

On engage, consé­quem­ment, les tra­vailleurs à retrous­ser leurs manches pour récu­pé­rer le temps per­du. Le 9 juin, la radio de Pékin col­porte une « Annonce du Conseil des affaires d’É­tat pour mettre réso­lu­ment un terme au trouble de l’ordre éco­no­mique et pour assu­rer une pro­duc­tion indus­trielle nor­male » 75Radio Pékin, 9 juin 1989 (SWB, FE/​0480, 12 juin 1989, B2/​11 – 12).. Le rôle pro­duc­ti­viste des syn­di­cats y est enté­ri­né et l’on remâche l’ho­mé­lie ordinaire :

Nul n’est auto­ri­sé, sous aucun pré­texte, à assié­ger les usines, les mines ou les entre­prises, à trou­bler la cir­cu­la­tion et à faire ces­ser le tra­vail aux ouvriers. La petite poi­gnée de mau­vais élé­ments qui incitent les autres à sabo­ter le tra­vail de pro­duc­tion seront tota­le­ment démas­qués et punis confor­mé­ment à la loi.

Les dépar­te­ments de la Sécu­ri­té publique et de la police armée de toutes les loca­li­tés ren­for­ce­ront la pro­tec­tion des entre­prises impor­tantes. Elles emploie­ront assez de force pour aider les entre­prises de pro­duc­tion à main­te­nir la sécu­ri­té et l’ordre. La petite poi­gnée de mau­vais élé­ments qui sabotent le tra­vail de pro­duc­tion seront dure­ment frap­pés. Nous ne devons pas faire preuve de fai­blesse vis-à-vis d’eux.

Le classe ouvrière est la force prin­ci­pale de la pro­duc­tion indus­trielle. Par consé­quent, les ouvriers doivent faire peuve de maî­trise, sur­mon­ter les dif­fi­cul­tés, se tenir fer­me­ment à leurs postes et assu­rer un bon tra­vail de pro­duc­tion. Tous les dis­cours et toutes les acti­vi­tés col­lu­soires des­ti­nées à trou­bler l’ordre pro­duc­tif doivent être réso­lu­ment cri­ti­qués, blâ­més et on doit y meure fin. Si néces­saire, les usines peuvent mettre sur pied des équipes de pro­tec­tion de l’u­sine pour pro­té­ger les fruits du labeur des usines et des ouvriers, et pour main­te­nir l’ordre nor­mal de la production.

Le 10 juin, pour sti­mu­ler l’ar­deur de ceux qui tirent pré­texte de la situa­tion pour s’ab­sen­ter de leur poste 76Agence Xin­hua, 10 juin 1989 (SWB, FF./0480, 12 juin 1989, B2/​12)., un mes­sage offi­ciel indique que les trans­ports ont été res­tau­rés dans la capi­tale et que désor­mais 97% de la main-d’œuvre des prin­ci­paux éta­blis­se­ments de la capi­tale est à même de gagner, sans peine, son lieu de tra­vail. À la date du 20 juin, neuf cents entre­prises péki­noises issues de seize com­pa­gnies indus­trielles géné­rales auraient retrou­vé leur rythme de pro­duc­tion habi­tuel 77Radio Pékin, 23 juin 1989 (SWB, FE/​0497, 1er juillet 1989, B2/​8)..

Le 17 juillet, une dépêche de l’A­gence Xin­hua tombe. Les lieux com­muns de la pro­pa­gande des années 50 suintent de toutes parts : « De nom­breux ouvriers de la capi­tale ont renon­cé à leurs congés et ont offert volon­tai­re­ment d’ac­com­plir des heures sup­plé­men­taires pour rat­tra­per les pertes entraî­nées par la rébel­lion contre-révo­lu­tion­naire du début du mois de juin » 78Radio Pékin, 17 juillet 1989 (SWB, FE/​0512, 19 juillet 1989, B2/​5)..

À la troi­sième ses­sion élar­gie de sa XIe com­mis­sion exé­cu­tive, qui s’ouvre le 26 juillet, la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine invite les ouvriers de la nation à se mobi­li­ser dans une cam­pagne de « double aug­men­ta­tion, double éco­no­mie » [shuang zeng shuang jie] 79«Mobi­li­ser les ouvriers et les employés pour l’ap­pro­fon­dis­se­ment et le déve­lop­pe­ment de la “double aug­men­ta­tion, double éco­no­mie », Quo­ti­dien du peuple, Pékin, 29 juillet 1989. Le slo­gan « Shuang zeng shuang jie » est la contrac­tion de « zeng chan zeng shou ; jie neng jie zhi [aug­men­ter la pro­duc­tion, aug­men­ter le reve­nu ; éco­no­mi­ser l’éner­gie, res­treindre les dépenses].

* * * *

Les auto­ri­tés chi­noises se sont hâtées, fébri­le­ment, de rele­ver le châ­teau de cartes de l’or­tho­doxie. Tan­dis que l’on cou­vrait d’hon­neurs ou que l’on pavoi­sait de rubans la meute qui a eu rai­son des insur­gés de la place Tian’an­men et de leurs organes auto­nomes, les cen­seurs omni­scients du régime lâchaient la bonde à leur logor­rhée. Mais ceux que l’i­déo­lo­gie a pour charge de convaincre se sont mithri­da­ti­sés contre elle. L’adhé­sion récla­mée au dis­cours du pou­voir ne repose plus que sur la force des canons, or les canons ne réus­si­ront à abo­lir ni le sou­ve­nir de l’é­vé­ne­ment — ce moment où furent expé­ri­men­tées d’o­ri­gi­nales rela­tions inter­in­di­vi­duelles — ni sa signi­fi­ca­tion. Qui s’i­ma­gi­ne­rait qu’on puisse goû­ter impu­né­ment, fût-ce du bout des lèvres, à la liber­té ? Dans ces condi­tions, bien témé­raire qui s’a­ven­tu­re­rait à cer­ti­fier que les ouvriers chi­nois accep­te­ront encore long­temps de feindre l’abrutissement.

Angel Pino

Documents

Quelques-uns des docu­ments de l’U­nion des ouvriers de Pékin ou de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, dont on trou­ve­ra ici une tra­duc­tion réa­li­sée direc­te­ment du chi­nois, ont été repro­duits dans la presse de Hong Kong ou de Tai­wan. À notre connais­sance, la com­pi­la­tion la plus impor­tante — mais non exhaus­tive — a été réa­li­sée par la revue d’o­bé­dience trots­kyste, publiée à Hong Kong, Shiyue pin­glun [cri­tique d’oc­tobre]. Ce sont les ver­sions don­nées par cette revue que nous avons uti­li­sées. Les docu­ments n° 1, 2, 4 à 10, 22 et 23 pro­viennent de : Zhong­guo minyun yuan ziliao jingxuan [choix de docu­ments ori­gi­naux rela­tifs au mou­ve­ment démo­cra­tique chi­nois], vol. 1, Shiyue pin­glun chu­banshe, Hong Kong, 25 juin 1989. Les docu­ments n° 3, 11 à 16, et 18 à 21, pro­viennent de : Zhong­guo minyun yuan ziliao jingxuan [choix de docu­ments ori­gi­naux rela­tifs au mou­ve­ment démo­cra­tique chi­nois], vol. 2, Shiyue pin­glun chu­banshe, Hong Kong, novembre 1989. Le docu­ment n° 17 est tiré de Tian’an­men yi jiu ba jiu [Tian’an­men, 1989], ouvrage com­pi­lé par la rédac­tion du Lianhe bao [jour­nal union], Lian­jing, Tai­pei, août 1989. Le doc. n° 24 a paru dans le jour­nal péki­nois Bei­jing ribao [quo­ti­dien de Pékin] en date du 2 juin 1989. Enfin, les docu­ments n° 25 et n° 26 ont été tra­duits de l’an­glais, d’a­près le texte pro­po­sé par le bul­le­tin des écoutes radio­pho­niques de la BBC, Sum­ma­ry of World Broad­casts (Part 3 : Far East), Londres : le pre­mier a été lu à l’an­tenne de Radio Pékin le 8 juin 1989 (FE/​0479, 10 juin 1989), le second a été dif­fu­sé par l’A­gence Chine nou­velle le 14 juin 1989 (FE/​0484, 16 juin 1989). À l’ex­cep­tion des trois der­niers docu­ments, tous les autres sont pré­sen­tés dans l’ordre chro­no­lo­gique, qu’il s’a­gisse de la date de rédac­tion ou de celle de la dif­fu­sion. Les notes ont été pla­cées à la fin de cha­cun des textes.

A. P

1. Adresse au peuple de toute la ville

Main­te­nant, le peuple de tout le pays se trouve dans une situa­tion into­lé­rable. Après de longues années d’un gou­ver­ne­ment dic­ta­to­rial et bureau­cra­tique, l’in­fla­tion échappe à tout contrôle et le niveau de vie du peuple est en chute libre. Parce qu’une mino­ri­té de gou­ver­nants veulent conti­nuer à jeter l’argent par les fenêtres, ils ont émis en grande quan­ti­té toutes sortes d’emprunts, comme les bons du tré­sors ou les bons finan­ciers, s’ap­pro­priant ain­si le peu d’argent qui reste au peuple. Nous appe­lons le peuple de tous les milieux à s’u­nir et à com­battre pour la véri­té et l’a­ve­nir du pays et du peuple.

Frères poli­ciers ! Frères sol­dats ! De grâce, ran­gez-vous aux côtés du peuple, ran­gez-vous du côté de la véri­té. Ne soyez pas les ins­tru­ments des enne­mis du peuple. Vous aus­si êtes les vic­times de l’ex­ploi­ta­tion et de l’op­pres­sion. Les bour­reaux qui ont répri­mé le peuple lors du « mou­ve­ment du 5 avril » 805 avril 1976 et de l’«Incident san­glant du 20 avril » 81Il s’a­git du 20 avril 1989 et on se réfère ici à l’é­chauf­fou­rée sur­ve­nue devant Xin­hua­men [la porte de la Chine nou­velle], à Zhon­gnan­hai, et qui aurait fait une cen­taine de vic­times par­mi les étu­diants., le peuple n’ou­blie­ra jamais de leur deman­der des comptes.

Nous le récla­mons solen­nel­le­ment : aug­men­tez les salaires, sta­bi­li­sez les prix, ren­dez public le mon­tant des reve­nus et des dépenses des offi­ciels du gou­ver­ne­ment et de leur famille. Nous, la classe ouvrière de Pékin, et les cita­dins de tous les milieux, nous sou­te­nons les étu­diants dans leur juste combat.

20 avril 1989,
Union des ouvriers de Pékin.

2. Dix questions

Le Comi­té cen­tral du Par­ti serait bien aimable de répondre aux ques­tions suivantes :

  1. Com­bien d’argent Deng Pufang 82Il s’a­git du fils de Deng Xiao­ping, a‑t-il dépen­sé sur les champs de courses de Hong Kong ? D’où venait cet argent ?
  1. M. et Mme Zhao Ziyang jouent au golf chaque semaine. Payent-ils quelque chose pour cela ? D’où vient l’argent pour ces dépenses ?
  1. Quelle éva­lua­tion le Comi­té cen­tral donne-t-il de la réforme de cette der­nière période ? Durant la Fête du prin­temps, lors de la céré­mo­nie des vœux, le pre­mier ministre Li Peng a avoué que des erreurs avaient été com­mises dans le pro­ces­sus de la réforme actuelle. De quelles erreurs s’a­git-il ? Quelle réponse doit être appor­tée à la situa­tion réelle ?
  1. Bien que le Comi­té cen­tral ait annon­cé un train de mesures — le contrôle de l’in­fla­tion et le contrôle des prix —, la réa­li­té est que l’in­fla­tion conti­nue et que le niveau de vie du peuple est en chute libre. Com­ment expli­quez-vous cela ?
  1. À comp­ter de l’an pro­chain, la Chine doit rem­bour­ser sa dette exté­rieure. Si on consi­dère l’en­semble du peuple, à com­bien s’é­lève la part de cha­cun ? Cela aura-t-il une inci­dence sur le niveau de vie élé­men­taire du peuple ? Veuillez répondre, s’il vous plaît.
  1. Deng Xiao­ping a sug­gé­ré d’a­mé­lio­rer le sta­tut des intel­lec­tuels, depuis le neu­vième rang jus­qu’au plus haut rang. Dites-nous ce que cela va chan­ger dans la condi­tion des intel­lec­tuels qui sont au plus haut rang ? Sont-ce des pro­prié­taires fon­ciers ou des pères de pro­prié­taires fon­ciers ? Veuillez répondre, s’il vous plaît.
  1. Com­bien de rési­dences, et autres vil­las, les diri­geants du Comi­té cen­tral du Par­ti pos­sèdent-ils sur l’en­semble du ter­ri­toire ? À com­bien s’é­lève le mon­tant de leurs dépenses ? Peuvent-ils le rendre public ? Veuillez répondre, s’il vous plaît.
  1. Ren­dez public le reve­nu per­son­nel des diri­geants du Comi­té cen­tral du Par­ti et l’é­tat de leurs dépenses.
  1. S’a­gis­sant des trois condi­tions préa­lables à des pour­par­lers paci­fiques posées par les auto­ri­tés de Tai­wan, quelle est la réponse du Comi­té central ?
  1. Quelle signi­fi­ca­tion et quel conte­nu le Comi­té cen­tral du Par­ti attache-t-il exac­te­ment aux trois termes qui suivent, veuillez répondre s’il vous plaît : 1) « Par­tis» ; 2) « Révo­lu­tion» ; 3) « Réaction ».

À ces dix ques­tions, que le Comi­té cen­tral ait l’o­bli­geance de répondre rapi­de­ment par voie de presse.

20 avril 1989,
Union des ouvriers de Pékin

3. Adresse aux ouvriers de tout le pays

Union Autonome des Ouvriers de la Capitale

Ouvriers de tout le pays :

Le mou­ve­ment étu­diant démo­cra­tique et patriote a gagné en ampleur jus­qu’à deve­nir un mou­ve­ment de tout le peuple auquel l’en­semble du peuple par­ti­cipe et qui concerne étroi­te­ment l’a­ve­nir et le des­tin de tout le peuple chi­nois. D’ores et déjà, il se pré­sente comme une ten­dance his­to­rique néces­saire que rien ne peut arrê­ter. Nous, les ouvriers de Pékin, nous nous tenons cou­ra­geu­se­ment en pre­mière ligne pour conqué­rir la démo­cra­tie et les droits du peuple, impa­vides face à la mort comme l’ont été de tout temps les Chinois.

Qua­rante années, ou, si l’on pré­fère, quelques mil­lé­naires, pas­sés sous le joug du des­po­tisme féo­dal, ont dépouillé, avec une bar­ba­rie impi­toyable, les Chi­nois des droits de l’homme et de la digni­té humaine. Dans leur esprit, l’en­semble des droits et la digni­té humaine seraient des biens réser­vés exclu­si­ve­ment aux empe­reurs, que le peuple n’a que le droit de qué­man­der et qu’il ne sau­rait en aucune façon conqué­rir de haute lutte. À la limite, même le droit de qué­man­der leur est refu­sé, quant à ceux qui entendent les conqué­rir de haute lutte on leur coupe la tête et on exter­mine leur famille. Tout cela est à l’o­ri­gine de l’in­croyable cli­mat de ter­reur dans lequel les Chi­nois vivent aujourd’hui.

Mais, aujourd’­hui, bien que, éclai­rés par le mou­ve­ment des étu­diants, nous ayons com­pris que nous pou­vions jouir, nous aus­si, des droits de l’homme et de la digni­té humaine, nous res­tons sou­mis au strict contrôle de la poli­tique de répres­sion sévère, et les tyrans uti­lisent pour nous inti­mi­der, nous les ouvriers, des pro­cé­dés abjects tels que les licen­cie­ments admi­nis­tra­tifs ou les sanc­tions éco­no­miques. Les gens savent que leurs droits et leur digni­té humaine sont bafoués par les tyrans, et pour­tant ils n’osent ni éle­ver la voix ni s’op­po­ser à cela. Voi­là qui montre à quel degré de cruau­té la des­truc­tion de la nature humaine opé­rée par le pou­voir des tyrans est parvenue.

Ah ! Chi­nois, toi ce peuple si digne d’a­mour et de com­pas­sion, on t’a ridi­cu­li­sé durant plu­sieurs mil­lé­naires et on conti­nue de te ridi­cu­li­ser encore à pré­sent. Non, nous devons nous mon­trer encore plus grands et encore plus […] 83Mot illi­sible, et il faut res­ti­tuer à notre peuple son visage originel !

Frères ouvriers, s’il était dit que cette humi­lia­tion infli­gée au peuple devait pour­suivre notre géné­ra­tion jus­qu’au XXIe siècle, alors mieux vau­drait que nous mou­rions en com­bat­tant au XXe siècle !

Frères ouvriers, la poli­tique du plus fort n’a rien de ter­rible, ce qui est ter­rible c’est le sou­lè­ve­ment géné­ral contre cette poli­tique ! Les prin­cipes poli­tiques de la répres­sion sont encore moins ter­ribles, ce qui est ter­rible c’est la grande explo­sion qui va faire sau­ter ces principes !

Nous en appe­lons aux Chi­nois qui se sont déjà réveillés. À aucun prix il ne faut s’en­dor­mir une nou­velle fois !

Frères ouvriers, le peuple entier ne doit for­mer qu’un seul cœur. Au prix d’une souf­france immense — mais qui ne dure­ra qu’un temps, peut-être le temps d’une géné­ra­tion, la nôtre —, nous allons faire en sorte que la géné­ra­tion sui­vante puisse libre­ment res­pi­rer l’air pur de la démo­cra­tie, et jouir des droits de l’homme et de la digni­té humaine à l’ins­tar des autres hommes.

Le peuple consti­tue la majo­ri­té et les tyrans ne sont qu’une « petite poi­gnée ». Si nous, les ouvriers, nous nous dres­sons et si nous allons de l’a­vant, la pous­sière que nous sou­lè­ve­rons suf­fi­ra à envoyer la tyran­nie en enfer !

Union auto­nome des ouvriers de Pékin. [Dis­tri­bué au milieu du mois de mai]

4. Adresse aux compatriotes de tout le pays

Union Autonome des Ouvriers de la Capitale

La cor­rup­tion man­da­ri­nale a atteint son paroxysme ! La tyran­nie man­da­ri­nale a atteint son paroxysme ! Dans un conti­nent aus­si vaste, il n’y a même plus de place pour la véri­té ! Aucune force réac­tion­naire ne sau­rait faire obs­tacle au cou­rant de la colère du peuple de tout le pays. Le peuple ne croi­ra plus les men­songes des auto­ri­tés parce que nous avons ins­crit sur notre ban­nière : science, démo­cra­tie, liber­té, droits de l’homme, légalité !

Nous, l’U­nion des ouvriers de Pékin, dans le but de sau­ve­gar­der les inté­rêts des ouvriers, nous nous sommes for­mel­le­ment consti­tués à Pékin, le 21 avril 1989. Le jour même, nous avons publié deux textes : « Adresse au peuple de toute la ville » et « Dix ques­tions » 84Voir les docu­ments n° 1 et 2 que l’é­di­to­rial du « 26 avril » a salis en les qua­li­fiant de réac­tion­naires. Nous vous le deman­dons : puisque vous n’a­vez pas répon­du publi­que­ment à nos dix ques­tions par voie de presse, alors publiez nos deux textes inté­gra­le­ment dans votre jour­nal. À moins que vous n’ayez même pas ce cou­rage ? N’a­vez-vous pas scan­dé, qua­rante ans durant, ce slo­gan : « nous croyons dans les larges masses » ? Nous exi­geons solen­nel­le­ment que l’é­di­to­rial du « 26 avril » soit radi­ca­le­ment nié et que celui qui a concoc­té l’ar­ticle, et ceux qui se dis­si­mulent der­rière lui, soient sévè­re­ment punis !

Nous avons sérieu­se­ment dres­sé le bilan de l’ex­ploi­ta­tion dont sont vic­times les ouvriers. S’a­gis­sant des tech­niques de l’ex­ploi­ta­tion, le Capi­tal de Marx nous offre une méthode d’a­na­lyse. Nous avons déduit de la valeur totale de la pro­duc­tion le salaire des ouvriers, le bien-être, le fonds social pour les soins médi­caux et les besoins, les dépenses des­ti­nées à la repro­duc­tion élar­gie et à l’a­mor­tis­se­ment des équi­pe­ments. Nous avons décou­vert avec éton­ne­ment que les « ser­vi­teurs du peuple » s’é­taient appro­priés indû­ment la plus-value totale créée par la sueur et le sang du peuple ! L’ex­ploi­ta­tion a atteint des pro­por­tions sans pré­cé­dent ! Elle est cruelle ! Elle est aux « cou­leurs de la Chine » ! Les « ser­vi­teurs » du peuple usent du sang et de la sueur du peuple pour se faire construire de somp­tueuses vil­las par­tout dans le pays (ils uti­lisent l’ar­mée pour les faire gar­der : ils appellent cela des zones mili­taires!), pour s’of­frir de somp­tueuses auto­mo­biles étran­gères, et pour faire du tou­risme à l’é­tran­ger (ils appellent cela des voyages d’é­tudes ; leurs enfants sont de la par­tie, par­fois même la nurse ! Les fonc­tion­naires du sexe mas­cu­lin s’offrent de jolies filles, les fonc­tion­naires du sexe fémi­nin se payent des « gigo­los»…). Les scan­dales dans les­quels ils se trouvent impli­qués et leurs crimes sont trop nom­breux pour qu’on les énumère !

Sur la ques­tion de savoir « com­ment atti­rer les capi­taux étran­gers », l’o­pi­nion du cama­rade Fang Liz­hi, selon laquelle on doit prendre en consi­dé­ra­tion les inté­rêts de la nation et de la popu­la­tion, est cor­recte. Nous y adhé­rons et nous la sou­te­nons parce que ces « capi­taux étran­gers », voi­là des années qu’ils se trans­forment « léga­le­ment » en richesses indi­vi­duelles par l’ef­fet de la « cor­rup­tion man­da­ri­nale ». Et qui fait les frais de l’o­pé­ra­tion, le pays. Et qui en pro­fite, une « petite poi­gnée ». Et qui rem­bourse les dettes, le large peuple.

Nous nous oppo­sons à la pour­suite de cet acte sau­vage de vio­la­tion des droits de l’homme qui consiste à nous for­cer à ache­ter des bons du tré­sor. Nous exi­geons qu’on nous informe sur l’é­tat des recettes et des dépenses (y com­pris leur emploi) affé­rentes aux bons du tré­sor émis au cours de ces der­nières années, qu’on verse immé­dia­te­ment les capi­taux et les inté­rêts des bons du tré­sor déte­nus actuel­le­ment par le peuple, et que par la même occa­sion on ferme le mar­ché des bons du tré­sor — lequel est un grand mar­ché pour le com­merce man­da­ri­nal, une grande source finan­cière pour la « cor­rup­tion man­da­ri­nale » ! Nous le réaf­fir­mons : aug­men­ter les salaires et sta­bi­li­ser l’in­fla­tion. Il faut mettre fin à cette situa­tion où vieux et jeunes, repré­sen­tant deux géné­ra­tions (voire trois), per­çoivent un salaire ana­logue. Nous exi­geons qu’une enquête soit effec­tuée sur les membres et les chefs du Comi­té cen­tral du Par­ti com­mu­niste, de la Com­mis­sion cen­trale des conseillers, des minis­tères et des com­mis­sions dépen­dant du Conseil des affaires d’É­tat, et de la Com­mis­sion mili­taire du Comi­té central.

Les pre­mières enquêtes, à pro­pos de leur consom­ma­tion et de leurs vil­las, doivent por­ter sur : Deng Xiao­ping, Zhao Ziyang, Li Peng, Chen Yun, Li Xian­nian, Yang Shang­kun, Peng Zhen, Wan Li, Jiang Zemin, Ye Xuan­ping et leur paren­tèle. Il faut poser sur le champ des scel­lés sur la tota­li­té de leurs biens. Les enquêtes devront être menées par une « Com­mis­sion popu­laire natio­nale », élue au suf­frage uni­ver­sel, qui ren­dra compte immé­dia­te­ment du résul­tat de ses inves­ti­ga­tions au peuple.

Les étu­diants sont adultes ! L’ordre révo­lu­tion­naire par­fait que res­pectent plu­sieurs mil­lions de gens sur la place Tian’an­men en apporte la preuve ! Le peuple s’est réveillé ! Il a com­pris que quelle que soit la socié­té, quelle que soit la phase his­to­rique, il n’exis­tait que deux classes, à savoir : la classe des domi­nants et celle des domi­nés. Les classes, les par­tis, les orga­ni­sa­tions et les indi­vi­dus qui vont dans le sens de l’His­toire, sont pro­gres­sistes et révo­lu­tion­naires ; ceux qui vont dans l’autre sens, sont rétro­grades et réac­tion­naires. C’est la rai­son pour laquelle, dans une « socié­té du gou­ver­ne­ment par les hommes » 85Tra­di­tion­nel­le­ment — ce qu’on impute géné­ra­le­ment à la seule doc­trine confu­céenne —, le sou­ve­rain gou­verne le peuple par son influence per­son­nelle. Il doit donc témoi­gner d’une haute ver­tu et d’une conduite indi­vi­duelle irré­pro­chable., telle qu’elle pré­vaut depuis l’empereur des Qin, les Chi­nois adorent, réclament, exaltent, et gardent la nos­tal­gie du « fonc­tion­naire intègre ». Les mou­ve­ments poli­tiques lan­cés au cours de ces qua­rante ans sont un pro­cé­dé poli­tique des­ti­né à oppri­mer le peuple. L’his­toire prouve qu’ils sont habiles pour « régler les comptes après la mois­son d’au­tomne » 86 Qiu hou suan zhang. L’ex­pres­sion est aujourd’­hui employée dans ce sens : attendre le moment favo­rable pour déclen­cher une contre-offen­sive., mais les faits his­to­riques, en fin de compte, ne se laissent pas falsifier.

À pré­sent, nous allons par­ti­cu­liè­re­ment veiller à ce que ces poli­ti­ciens ambi­tieux qui se trouvent à l’in­té­rieur du Par­ti com­mu­niste chi­nois ne pro­fitent pas de ce mou­ve­ment démo­cra­tique pour usur­per le pou­voir et mon­ter sur scène. Deng Xiao­ping a pro­fi­té du mou­ve­ment popu­laire du « 5 avril » et, une fois reve­nu sur scène, les mobiles cri­mi­nels qui l’a­ni­maient ont écla­té au grand jour. Le « suc­cès des réformes » autour duquel ils battent le tam­bour est une bali­verne et un leurre. La vraie réa­li­té, c’est que le niveau de vie du plus grand nombre est en chute libre, que les emprunts à l’é­tran­ger ne cessent de s’ac­cu­mu­ler, et qu’on attend le peuple pour rem­bour­ser la dette.

Cama­rades ouvriers, vous qui êtes si nom­breux, unis­sez-vous étroi­te­ment autour de l’U­nion des ouvriers, pla­cez-vous sous la direc­tion de l’U­nion des ouvriers de la muni­ci­pa­li­té : ain­si, l’ac­tuel mou­ve­ment démo­cra­tique attein­dra une apo­gée nou­velle. Notre Union orga­ni­se­ra, devant Tian’an­men, le 22 mai à 14 heures, une grande mani­fes­ta­tion qui réuni­ra tous les ouvriers de la muni­ci­pa­li­té. Nous reven­di­que­rons paci­fi­que­ment en sou­tien au mou­ve­ment étu­diant. Le mot d’ordre de la marche sera : « Sur un conti­nent aus­si vaste, il n’y a plus de place pour la verité ! »

17 mai 1989, Union des ouvriers de la muni­ci­pa­li­té de Pékin.

5. Déclaration des ouvriers de la capitale

Commission préparatoire de l’Union Autonome des Ouvriers de Pékin

Nous esti­mons que depuis le mois d’a­vril, le mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote des étu­diant s’est déve­lop­pé jus­qu’à deve­nir le mou­ve­ment patriote de tout le peuple auquel sont liés, pour le meilleur et pour la pire, les inté­rêts de notre classe ouvrière.

Nous esti­mons que, dans l’in­té­rêt de toute la nation, les étu­diants ont d’ores et déjà fait tout ce qu’ils pou­vaient faire et que les étu­diants qui font la grève de la faim sont en danger.

Pour sau­ver la vie de plu­sieurs mil­liers d’é­tu­diants, dans l’in­té­rêt de notre classe ouvrière et pour l’es­sor de la nation chi­noise, nous décla­rons for­mel­le­ment ce qui suit :

Le Comi­té cen­tral du Par­ti et le Conseil des affaires d’É­tat doivent accep­ter dans les vingt-quatre heures, et sans condi­tion, les deux exi­gences des étu­diants qui font la grève de la faim 87Ces deux reven­di­ca­tions étaient : 1) la réha­bi­li­ta­tion du mou­ve­ment étu­diant et la dénon­cia­tion de l’é­di­to­rial du Quo­ti­dien du peuple paru le 26 avril ; 2) l’ou­ver­ture rapide d’un dia­logue retrans­mis en direct à la télé­vi­sion.. Sinon, à comp­ter du 20 mai à midi, nous, tous les ouvriers de la ville, nous enta­me­rons une grève géné­rale de vingt-quatre heures. Et sui­vant la tour­nure que pren­dront les évé­ne­ments, nous déci­de­rons de la suite à don­ner à notre action.

Par la même occa­sion, nous décla­rons devant les ouvriers de tout le pays : les ouvriers de Pékin ont com­men­cé à s’organiser !

19 mai 1989, Union auto­nome des ouvriers de Pékin, Com­mis­sion préparatoire.

6. Avis n°1

Commission préparatoire de l’Union Autonome des Ouvriers de la Capitale

L’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin est une orga­ni­sa­tion spon­ta­née pro­vi­soire créée par les ouvriers de la capi­tale dans une période excep­tion­nelle. Ses objec­tifs sont les sui­vants : lut­ter pour la démo­cra­tie, s’op­po­ser à la dic­ta­ture, sou­te­nir et pro­té­ger les étu­diants qui font la grève de la faim, et accé­lé­rer le pro­ces­sus de démo­cra­ti­sa­tion du pays aux côtés des étu­diants et du peuple de tous les milieux. Nous appelons :

  1. à une grève géné­rale des employés de tous les sec­teurs de Pékin, le 20 mai, à comp­ter de midi, (excep­tion faite des sec­teurs d’ap­pro­vi­sion­ne­ment en élec­tri­ci­té, en gaz et en eau, ain­si que des postes et télé­com­mu­ni­ca­tions), et ce jus­qu’à ce que les troupes trans­fé­rées à Pékin se soient reti­rées de la ville ;
  2. à s’op­po­ser fer­me­ment à l’en­trée des troupes dans la ville, à défendre les acquis du mou­ve­ment pour la démo­cra­tie, à main­te­nir la dis­ci­pline qui règne pour l’heure place Tian’an­men, à blo­quer toutes les artères prin­ci­pales qui conduisent à la ville et toutes les bouches de métro en uti­li­sant pour ce faire tous les véhi­cules des dif­fé­rentes uni­tés de tra­vail, à sou­te­nir le fonc­tion­ne­ment nor­mal de la radio cen­trale et de la télévision ;
  3. à l’u­nion de tous les citoyens pour pro­pa­ger la véri­té par­mi la masse des sol­dats et des offi­ciers qui sont sta­tion­nés à Pékin.

20 mai 1989.

7. Avis

Union Autonome des ouvriers de Pékin

Cet après-midi, le comi­té per­ma­nent de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin a convo­qué une réunion extra­or­di­naire des­ti­née à pré­ci­ser les tâches qui nous incombent dans ce contexte. Dans le contexte actuel, les membres du comi­té per­ma­nent ont par­fait l’é­quipe diri­geante. Ils ont éta­bli un groupe de direc­tion, mis sur pied un secré­ta­riat, un bureau à la pro­pa­gande, un ser­vice d’in­ten­dance et un bureau de liaison.

  1. L’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin est une orga­ni­sa­tion spon­ta­née d’ou­vriers de la capi­tale adap­tée à la situa­tion. Son but, sur la voie de la démo­cra­tie et de la léga­li­té, consiste à diri­ger cor­rec­te­ment ce mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote. Elle invite cha­leu­reu­se­ment tous les ouvriers de la capi­tale et tous les syn­di­cats des usines, des mines et autres uni­tés de tra­vail, à adhé­rer acti­ve­ment à notre orga­ni­sa­tion syndicale.
  2. Face à la situa­tion pré­sente, au cours de la réunion, il a notam­ment arrê­té les déci­sions suivantes :
  1. la tâche actuelle des équipes de piquets ouvriers consiste, en étroite col­la­bo­ra­tion avec l’U­nion auto­nome des étu­diants, à assu­rer la pro­tec­tion de la vie des étu­diants et à main­te­nir la sta­bi­li­té de l’ordre public à Pékin ;
  2. en plus de main­te­nir l’ordre public, les équipes de piquets ouvriers doivent garan­tir l’a­che­mi­ne­ment de toutes les res­sources de Pékin et des pro­duits néces­saires à la vie cou­rante des cita­dins, tels que les légumes ou les céréales, ain­si que l’a­che­mi­ne­ment de tous les pro­duits de pre­mière nécessité.

Pour infor­ma­tion.

21 mai 1989,
Union auto­nome des ouvriers de Pékin,
comi­té permanent,
Le comi­té au complet.

8. Programme préparatoire de l’Union Autonome des Ouvriers de la Capitale

Depuis la mi-avril, au sein du mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote de tout le peuple, à la tête duquel se trouvent les étu­diants, la majo­ri­té des ouvriers chi­nois ont mani­fes­té l’ardent désir démo­cra­tique de par­ti­ci­per à la vie poli­tique. Dans le même temps, ils ont réa­li­sé qu’il n’exis­tait pas encore d’or­ga­ni­sa­tion à même de repré­sen­ter véri­ta­ble­ment les aspi­ra­tions des ouvriers. Dans ces cir­cons­tances, nous esti­mons qu’il est néces­saire de fon­der une orga­ni­sa­tion auto­nome qui puisse par­ler et agir au nom des ouvriers. À cette fin, nous pré­pa­rons l’or­ga­ni­sa­tion de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale et nous pro­po­sons un pro­gramme préparatoire.

  1. Cette orga­ni­sa­tion auto­nome et tota­le­ment indé­pen­dante doit être fon­dée sui­vant des moda­li­tés démo­cra­tiques, et les ouvriers doivent y adhé­rer volon­tai­re­ment. Elle ne doit subir le contrôle d’au­cune autre orga­ni­sa­tion et doit entre­te­nir des rap­ports d’é­gal à égal avec les autres orga­ni­sa­tions de masse.
  2. L’ob­jec­tif fon­da­men­tal de cette orga­ni­sa­tion doit être, en se fon­dant sur la volon­té de la majo­ri­té des ouvriers, d’ex­pri­mer leurs idées éco­no­miques et poli­tiques. Elle ne doit pas se conten­ter d’être une orga­ni­sa­tion de bien-être.
  3. Cette orga­ni­sa­tion doit avoir une fonc­tion de sur­veillance du Par­ti com­mu­niste chinois.
  4. Cette orga­ni­sa­tion a le droit d’u­ser de tous les moyens légaux et appro­priés pour sur­veiller les repré­sen­tants des per­sonnes juri­diques que sont les entre­prises pro­prié­té du peuple entier ou les entre­prises pro­prié­té col­lec­tive, cela afin de garan­tir que les ouvriers sont les maîtres véri­tables de ces entre­prises ; pour les autres entre­prises, par la négo­cia­tion avec les chefs d’en­tre­prise ou par d’autres moyens légaux, elle doit pro­té­ger les droits et les inté­rêts des ouvriers.
  5. Dans le domaine consti­tu­tion­nel et légal, cette orga­ni­sa­tion doit garan­tir à ses adhé­rents l’en­semble des droits légaux .

21 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la capitale,

Com­mis­sion préparatoire

9. Déclaration des ouvriers

La classe ouvrière est la classe la plus avan­cée. Dans le mou­ve­ment pour la démo­cra­tie, nous devons incar­ner la force cardinale.

La Répu­blique popu­laire de Chine est diri­gée par la classe ouvrière 88En tête de la Consti­tu­tion il est sti­pu­lé que : « La Répu­blique popu­laire de Chine est un État socia­liste de dic­ta­ture du pro­lé­ta­riat, diri­gé par la classe ouvrière et basé sur l’al­liance des ouvriers et des pay­sans. ». Nous avons le droit de chas­ser tous les dictateurs.

Les ouvriers savent mieux que qui­conque quel rôle tiennent le savoir et la tech­no­lo­gie dans la pro­duc­tion. C’est la rai­son pour laquelle nous ne per­met­trons pas qu’on per­sé­cute les étu­diants qui ont été éle­vés par le peuple.

Ren­ver­ser la dic­ta­ture et le tota­li­ta­risme, et pro­mou­voir la démo­cra­tie dans ce pays, c’est là une res­pon­sa­bi­li­té qui nous incombe et à laquelle nous ne sau­rions nous dérober.

La source de notre force réside dans notre uni­té. Notre suc­cès résul­te­ra de notre inébran­lable conviction.

Dans le mou­ve­ment pour la démo­cra­tie, « nous n’a­vons rien à perdre, hors nos chaînes, et tout un monde à gagner » 89«Ce n’est pas sans rai­son que les classes domi­nantes tremblent devant la menace d’une révo­lu­tion com­mu­niste. Les pro­lé­taires ne risquent d’y perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner. » (Marx-Engels, le Mani­feste du Par­ti com­mu­niste [1848], trad. M. Rubel et L. Evrard, in M. Rubel, Kart Marx. Œuvres. Éco­no­mie, t. I, Gal­li­mard, Biblio­thèque de la Pléiade, Paris, 1977)..

21 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la capitale,

Com­mis­sion préparatoire.

10. Appel urgent

Union Auto­nome des Ouvriers de Pékin

Au peuple de toutes les milieux de la capi­tale, aux démo­crates patriotes de tous les milieux et de toutes les unités.

Pour le 25 mai, nous lan­çons une pro­po­si­tion urgente. Nous orga­ni­se­rons une grande mani­fes­ta­tion dans toute la ville. Étu­diants, ouvriers, pay­sans, intel­lec­tuels et cita­dins de tous les milieux, veuillez pré­pa­rer les ban­nières de vos uni­tés. À 14 heures, nous nous ras­sem­ble­rons sur la deuxième cein­ture 90Pékin est entou­ré de deux bou­le­vards péri­phé­riques.. Le par­cours com­men­ce­ra place Tian’an­men et lon­ge­ra la deuxième cein­ture dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Les signes de ral­lie­ment seront la voi­ture de pro­pa­gande et les ban­nières de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin que sui­vront les équipes de piquets ouvriers et les citadins.

Les slo­gans prin­ci­paux de cette mani­fes­ta­tion, à laquelle pren­dront part des gens de tous les milieux, seront :
– Wan Li, bien­ve­nue au pays, révoque Li Peng sans hésitation !
– Non ce n’est pas de l’a­gi­ta­tion, sus­pen­dez la loi martiale !
– Convo­quez immé­dia­te­ment une ses­sion extra­or­di­naire de l’As­sem­blée popu­laire nationale !
– Convo­quez une réunion extra­or­di­naire élar­gie du Bureau politique !
– Convo­quez une réunion extra­or­di­naire de la Confé­rence consul­ta­tive politique !
– Ce mou­ve­ment est un grand mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote !

La nation chi­noise est arri­vée au point le plus impor­tant et le plus cru­cial de son his­toire. Agis­sons tous.

Le peuple vaincra !

Tri­bune Ouest de la place Tian’anmen,

24 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de Pékin.

11. Appel Urgent

Union Auto­nome des Ouvriers de Pékin

Sous les yeux du monde entier, ce mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote de tout le peuple, avec le sou­tien éner­gique et la par­ti­ci­pa­tion active du vaste peuple de la capi­tale, a déjà obte­nu une pre­mière vic­toire. Pour­tant, le gou­ver­ne­ment muni­ci­pal de Pékin, au mépris des inté­rêts du peuple et sans entendre ses cris, retire les poli­ciers char­gés de faire la cir­cu­la­tion et inter­rompt la cir­cu­la­tion des auto­bus, pro­vo­quant ain­si la ter­reur dans l’in­ten­tion de semer des troubles. Mais ils ont més­es­ti­mé une fois de plus notre peuple. Il a été dit dans le jour­naux de ces jours-ci, que, dans la capi­tale, l’ordre public, les com­mu­ni­ca­tions, la vie cou­rante et la pro­duc­tion étaient dans un ordre par­fait. Pour notre sécu­ri­té, nous n’a­vons nul besoin de la soi-disant pro­tec­tion assu­rée par le contrôle mili­taire. Ce que nous exi­geons c’est qu’on res­pecte la démo­cra­tie et la Constitution.

Nous lan­çons ici un appel urgent auprès de tous les milieux de la capi­tale pour que cha­cun agisse rapi­de­ment. Nous deman­dons à toutes les uni­tés de prendre l’i­ni­tia­tive de for­mer des équipes char­gées du main­tien de l’ordre social. Et nous, Union auto­nome des ouvriers de la capi­tale, nous sommes dis­po­sés à prendre l’i­ni­tia­tive du tra­vail de coor­di­na­tion. Pour l’in­té­rêt géné­ral du peuple, pour le res­pect de la Consti­tu­tion, pour pro­mou­voir le pro­ces­sus de la démo­cra­ti­sa­tion, pour que l’his­toire de la Chine ne revienne pas en arrière, don­nons-nous la main.

En même temps, nous for­mu­lons l’es­poir que ce n’est pas à des­sein que le gou­ver­ne­ment muni­ci­pal pro­voque cet état d’a­nar­chie. Nous décla­rons aus­si solen­nel­le­ment : l’a­gi­ta­tion pro­vo­quée par une petite poi­gnée de forces anti­po­pu­laires, ce n’est pas sur le dos du peuple qu’il faut la mettre.

25 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de Pékin.

12. Adresse aux copatriotes d’outre-mer

Union Auto­nome des ouvriers de la capitale

Com­pa­triotes chi­nois d’outre-mer et com­pa­triotes chi­nois vivant à l’étranger :

Alors que le mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote du peuple chi­nois attei­gnait un seuil cri­tique où il affron­tait une épreuve d’une dure­té sans pré­cé­dent, nous, les ouvriers de Pékin, nous nous sommes dressés !

Sur les fon­de­ments et les piliers de ce grand bâti­ment qu’est la Répu­blique popu­laire, on trouve les traces de notre sang frais et de notre sueur. Ce pays, c’est par nos com­bats et par notre tra­vail, à nous les ouvriers et tous les tra­vailleurs intel­lec­tuels et manuels, qu’il a été créé. Nous sommes les maîtres incon­tes­tables de ce pays : aus­si, s’a­gis­sant de la façon de régler les affaires du pays, c’est un devoir et une néces­si­té d’é­cou­ter notre voix. Nous ne devons abso­lu­ment pas per­mettre que la dic­ta­ture du pro­lé­ta­riat se trans­forme en une dic­ta­ture sur le pro­lé­ta­riat ! Nous sommes déter­mi­nés à ne pas lais­ser l’in­fime mino­ri­té du peuple et de notre classe se récla­mer abu­si­ve­ment de nous, les ouvriers, pour répri­mer les étu­diants, pour étouf­fer la démo­cra­tie et pour fou­ler aux pieds les droits de l’homme ! Nous sou­te­nons fer­me­ment le mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote des étu­diants ! Nous nous oppo­sons fer­me­ment à l’é­di­to­rial du Quo­ti­dien du peuple du 26 avril qui fait pas­ser le blanc pour le noir et qui s’at­tire la colère du ciel et les reproches des hommes ! Per­sonne n’est en mesure de nous contraindre, sous la menace des armes, au tra­vail. Nous nous oppo­sons, fer­me­ment et de toutes nos forces, à la loi mar­tiale pro­cla­mée illé­ga­le­ment contre le peuple ! Nous nous oppo­sons au dis­cours scé­lé­rat pro­non­cé par Li Peng le 20 mai.

Pour la grande œuvre de la réforme socia­liste, pour notre mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote, et pour per­mettre à nos des­cen­dants de res­pi­rer libre­ment — sous un ciel deve­nu serein après que la tyran­nie sta­li­nienne aura été balayée — et de vivre digne­ment comme des hommes, nous appe­lons d’ur­gence tous les com­pa­triotes chi­nois d’outre-mer et tous les com­pa­triotes chi­nois vivant à l’é­tran­ger qui ont à cœur le des­tin du peuple chi­nois à agir sur le champ en met­tant en œuvre tous les moyens dont ils dis­posent pour venir en aide au mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote du peuple chi­nois. Les patriotes ne forment qu’une seule famille, ils sont taillés dans le même bois et leurs racines sont les mêmes. Liber­té, démo­cra­tie, tout le monde aspire à cela. À cette heure la plus cri­tique pour le peuple chi­nois, hur­lons d’une seule voix :

Debout ! Nous qui refu­sons d’être esclaves ! Avec notre chair, notre sang, construi­sons notre nou­velle Grande Muraille ! 91Extrait de la Marche des volon­taires, l’hymne natio­nal chi­nois (paroles de Tian Han, musique de Nie Er).

Nous ver­rons si les fusils auront l’au­dace de se tour­ner en direc­tion des poi­trines du peuple !

Nous ver­rons si les tanks auront l’au­dace de rou­ler sur les champs pai­sibles et cou­verts de fleurs écloses de Pékin.

L’o­pi­nion publique vaincra !

La démo­cra­tie vaincra !

La rai­son vaincra !

La jus­tice vaincra !

26 mai 1989.

13. Mobilisons nous d’urgence pour prendre la bastille des années 80

Union Auto­nome des ouvriers de la Capitale

Notre appel

L’heure de la bataille déci­sive est arrivée.

La réforme est en dan­ger ! La démo­cra­tie est en dan­ger ! Les masses patriotes et la jeu­nesse patriote sont en danger !

Le gou­ver­ne­ment fas­ciste et sa tyran­nie sta­li­nienne sur les­quels des mil­lions de gens ont cra­ché n’a pas quit­té et ne quit­te­ra pas de lui-même la scène de l’his­toire. Li Peng, ain­si que celui qui tire les ficelles en cou­lisse 92Allu­sion à Deng Xiao­ping., et une petite poi­gnée de sui­veurs irré­duc­tibles donnent une repré­sen­ta­tion hys­té­rique. Ils vont cer­tai­ne­ment jouer leur va-tout dans un pari poli­tique. N’est-il pas notoire qu’il s’est trou­vé quel­qu’un pour cla­mer : « N’hé­si­tons pas à en sacri­fier 200.000, si c’est le prix de vingt ans de sta­bi­li­té » 93 Buxi ershi­wan sheng­ming, huan qu nian nian anding. Le pro­pos aurait été, dit-on, tenu par Deng Xiao­ping.? Qui­conque pos­sède un tant soit peu de rai­son ne sau­rait nour­rir la moindre illu­sion sur ce « gou­ver­ne­ment de canailles » et sur cette « dic­ta­ture de fri­pouilles » — comme disent avec mépris un bon nombre de Péki­nois —, et ne sau­rait les croire naï­ve­ment quand ils affirment qu’ils ne régle­ront pas les comptes après la mois­son d’au­tomne 94 Qiu hou suan zhang : attendre l’oc­ca­sion pour déclen­cher la contre-offen­sive..

À cette heure où nous cou­rons un grave péril de mort, pour faire abou­tir notre cause réfor­ma­trice et socia­liste, pour faire abou­tir notre mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote, pour per­mettre aux géné­ra­tions futures de res­pi­rer libre­ment — sous un ciel serein débar­ras­sé des sombres nuées du sys­tème sta­li­nien —, et de vivre aus­si digne­ment que les autres hommes, nous lan­çons un appel aux masses démo­cra­tiques et patriotes et à la jeu­nesse patriote, à tous ceux qui sont sin­cè­re­ment convain­cus de la néces­si­té de libé­rer les hommes c’est-à-dire à ceux qui sont armés de l’es­prit de sacri­fice. Qu’ils livrent à la Bas­tille des années 20 95 Lap­sus cala­mi du rédac­teur ou coquille de l’é­di­teur : c’est, évi­dem­ment des années 80 dont il s’a­git. du XXe siècle, der­nière for­te­resse du sta­li­nisme au monde, avec l’am­pleur et l’im­pé­tuo­si­té des vagues qui déferlent, un ultime assaut, pathé­tique et archar­né, et comme on n’en a jamais connu. Les évé­ne­ments qui se sont pro­duits sur la place Tian’an­men de Pékin, en Chine, durant les mois d’a­vril et de mai 1989, s’ins­cri­ront en lettres d’or dans l’His­toire. Les géné­ra­tions futures seront fières à tout jamais de la contri­bu­tion appor­tée par leurs aînés au déve­lop­pe­ment de la civi­li­sa­tion humaine, contri­bu­tion sans pré­cé­dent et qui fera date ! Même dans plu­sieurs mil­lé­naires, les hommes ne se remé­mo­re­ront pas ce qui s’est pas­sé aujourd’­hui sans émo­tion et leurs yeux seront noyés de chaudes larmes.

Grou­pons-nous et demain l’In­ter­na­tio­nale se réa­li­se­ra à coup sûr 96Der­nier vers du refrain de la ver­sion chi­noise de l’In­ter­na­tio­nale.! L’a­ve­nir nous appartient !

L’o­pi­nion publique vaincra !

La démo­cra­tie vaincra !

La rai­son vaincra !

La jus­tice vaincra !

26 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de Pékin,

Asso­cia­tion des jour­na­listes de la jeu­nesse de Chine 97Détour­ne­ment de l’in­ti­tu­lé d’une orga­ni­sa­tion créée par des intel­lec­tuels chi­nois en 1919, deve­nus com­mu­nistes pour la plu­part, à laquelle Mao appar­tint dans sa jeu­nesse. L’As­so­cia­tion de la jeu­nesse de Chine a été dis­soute en 1925..

14. Dix grandes bizarreries de la situation actuelle en Chine

Union Auto­nome des Ouvriers de la Capitale

1.Un mot :

Après la tenue du IIIeple­num 98Il s’a­git du IIIe ple­num du Comi­té cen­tral issu du XIe Congrès du Par­ti com­mu­niste chi­nois (12 – 18 jan­vier), lequel a consa­cré la vic­toire de la ligne défen­due par Deng Xiao­ping sur celle de Hua Guo­feng., on a inci­té les gens à s’en­ri­chir rapi­de­ment. Mais si les poches du petit peuple n’ont pas gon­flé, les chats blancs ou les chats noirs, eux, engraissent 99Les chats dési­gnent, en l’oc­cu­rence, les bureau­crates. Allu­sion à la maxime favo­rite de Deng Xiao­ping : « Peu importe que le chat soit blanc ou noir, du moment qu’il attrape les sou­ris. ».

2. Une observation :

Ouver­ture à l’é­tran­ger : on attire les inves­tis­se­ments. Mais la dette exté­rieure nous arrive jus­qu’au cou tan­dis que les fonds pri­vés s’accumulent.

3.Un pro­pos :

Quand il s’a­git de lâcher les billets, « on joue la montre », mais quand il s’a­git de nous faire ache­ter des bons du Tré­sor, on « attaque par sur­prise » 100Lit­té­ra­le­ment : « Court, rasant, rapide ». Il s’a­git d’un terme de vol­ley-ball. Les bons du tré­sor sont pré­le­vés obli­ga­toi­re­ment sur les salaires et sans qu’on aver­tisse préa­la­ble­ment de la rete­nue.. Notre sub­ven­tion pour les ali­ments secon­daires est de soixante-quinze cen­times, mais les prix, eux, grimpent plus vite que des fusées.

4.Un com­men­taire :

L’é­tat des réformes est excellent, la poli­tique n’est pas mau­vaise non plus. Pour­tant aucun long nez 101C’est-à-dire les étran­gers. ne demande la natio­na­li­té chi­noise et les fils de Yan et de Huang 102C’est-à-dire les Chi­nois, Yan et Huang étant les noms des deux pre­miers sou­ve­rains mythiques de la Chine. filent à l’étranger.

5.Une des­crip­tion :

L’é­poque change de visage : les grands hôtels et les grands res­tau­rants abondent 103Entendre les éta­blis­se­ments de luxe réser­vés aux étran­gers., majes­tueux comme des cigognes au milieu de poules. Pour­tant, on manque de loge­ments pour les cita­dins. On a mis du temps à suivre le bon exemple 104Le bon exemple de l’é­tran­ger., mais faire payer pour les chiottes, on a mis en appli­ca­tion tout de suite.

6.Un dire :

Les auto­ri­tés sont avides de gigan­tisme et de tout ce qui vient d’ailleurs. Mais elles ne sou­cient pas du quo­ti­dien. Le Tré­sor public n’ar­rive pas à joindre les deux bouts et on ne trouve pas de quoi régler les dépenses d’en­sei­gne­ment. La mode est pour­tant aux ripailles. Le des­tin du pays et le des­tin des familles s’as­som­brissent, parce que ceux qui sont en haut sont trop pourris.

7.Un juge­ment :

La Consti­tu­tion forme un gros bou­quin : la léga­li­té a l’air d’être toute puis­sante. Mal­heu­reu­se­ment, les « bou­teilles d’huile » et les « bou­teilles de vinaigre » 105Les « bou­teilles d’huile » [you­ping’er]: dans la Chine ancienne, lors­qu’une veuve se rema­riait et qu’elle avait eu un enfant de son pré­cé­dent mari, sa nou­velle famille consi­dé­rait l’en­fant comme illé­gi­time. Par­lant de lui, on disait la « bou­teille d’huile ». La « bou­teille de vinaigre » [cuping’er] est une expres­sion for­gée pour l’oc­ca­sion : on a rem­pla­cé le mot « bou­teille » [ping] par un autre carac­tère « ping », celui qu’on trouve dans le pré­nom de Deng Xiao­ping (l’ho­mo­pho­nie a été source de nom­breuses plai­san­te­ries tout au long du mou­ve­ment). Il faut entendre, ici, que si, en appa­rence, la léga­li­té est toute-puis­sante, les entorses sont légion. ne manquent pas. L’ar­bi­traire l’emporte sur la léga­li­té. Quant à la démo­cra­tie et à la liber­té, c’est encore pire. Un mot de trop, et on nous coffre.

8.Une plai­san­te­rie :

Les infor­ma­tions sont bidon, la télé­vi­sion bara­tine : beau­coup de bobards et peu de véri­tés 106À l’at­ten­tion des afi­cio­na­dos, indi­quons que cette phrase com­porte de nom­breuses locu­tions propres à l’ar­got péki­nois.. À quoi servez-vous ?

9.Une insulte :

Le ciel n’ouvre pas les yeux. Le chat voleur et le diable Li 107Le chat est une allu­sion à Deng (« Peu importe que le chat…»). Quant au diable Li, c’est, bien sûr de Li Peng dont il est ques­tion. sont mon­tés sur la scène. Ils ont retour­né leur veste et fabriquent l’a­gi­ta­tion. Les auto­ri­tés les plus hautes sont des canailles.

10.Une bizar­re­rie :

Pai­sible est la ville de Pékin. Pour­tant, on a fait venir l’ar­mée. Uni­que­ment parce que la marée étu­diante cho­quait la vue et que les sei­gneurs ne trou­vaient plus d’en­droit où poser leurs fesses. Des tanks, des avions, des gaz lacry­mo­gènes. Vers qui les Fusils sont-ils dirigés ?

Il y a dix grandes bizar­re­ries dans la situa­tion actuelle. En fait rien n’est bizarre. Tout vient de ce que les man­da­rins n’ont pas ava­lé les bons médicaments.

Le mal­heur n’ar­rive pas par hasard.

Il doit arri­ver ! Il doit arri­ver ! Il doit arriver !

26 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la capitale,

Bureau de la propagande.

15. Frères ouvriers, mobilisons-nous

Union Auto­nome des Ouvriers de Pékin

À l’heure de la bataille déci­sive qui oppose la démo­cra­tie et la liber­té à la tyran­nie féo­dale, frères ouvriers levons-nous et fai­sons front !

Le peuple veut la démo­cra­tie et la liber­té. Les tyrans, eux, tremblent ! Ils se débattent dans leurs der­niers sur­sauts. Frères ouvriers, nous sommes forts. Rugis­sons d’une seule voix et la Terre, elle-même, trem­ble­ra. Dic­ta­teurs, allez au diable !

L’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin pro­pose que soit orga­ni­sée, le 28 mai au matin, une grande mani­fes­ta­tion dans toute la ville. Frères ouvriers, des­cen­dons bra­ve­ment dans la rue, par­ti­ci­pons à la grande mani­fes­ta­tion des Chi­nois dans le monde entier.

Note :

1. Sur la situa­tion présente.

Dans le but de répri­mer le mou­ve­ment pour la démo­cra­tie, une petite poi­gnée de scé­lé­rats appar­te­nant au Par­ti, au gou­ver­ne­ment ou à l’ar­mée, mettent en action des manœuvres per­fides pour faire l’a­mal­game entre les élé­ments clefs du mou­ve­ment pour la démo­cra­tie et Zhao Ziyang ou d’autres cama­rades : ils racontent ain­si que Zhao Ziyang, Qin Jiwei ou Bao Tong seraient les élé­ments clefs qui dirigent ce mou­ve­ment pour la démo­cra­tie ou qu’ils en seraient des membres, et que ceux qui par­ti­cipent au mou­ve­ment pour la démo­cra­tie sont mani­pu­lés par eux. Ils cherchent, de cette façon, à duper en même temps l’ar­mée et le peuple, non sans un cer­tain suc­cès. À pré­sent, nous ris­quons d’être répri­més à tout moment.

2. Le 28, avant 10 heures, chaque uni­té doit quit­ter son uni­té d’o­ri­gine et s’a­van­cer en direc­tion de la place Tian’an­men. Ensuite, les uni­tés devront emprun­ter la deuxième cein­ture et rejoin­dront la mani­fes­ta­tion d’une enver­gure sans pré­cé­dent qui réuni­ra des mil­lions de per­sonnes issues de tous les milieux. Cette mani­fes­ta­tion, du point de vue de la dis­ci­pline ou de l’or­ga­ni­sa­tion, etc., doit don­ner aux gens cette impres­sion : nous sommes une troupe juste, forte et douée d’une grande capa­ci­té d’au­to-contrôle, à même de pro­pul­ser la Chine vers l’avant.

Cette mani­fes­ta­tion s’ef­for­ce­ra, par divers moyens (slo­gans sur les ban­de­roles, décla­ra­tions, mots d’ordre, etc.), d’at­teindre les objec­tifs suivants :

  1. dénon­cer et écra­ser le com­plot cruel qu’une petite poi­gnée de scé­lé­rats appar­te­nant au Par­ti, au gou­ver­ne­ment ou à l’ar­mée trament actuellement ;
  2. ren­for­cer le poids des étu­diants, des ouvriers, des intel­lec­tuels et des cita­dins, et pro­fi­ter de ce moment cri­tique pour mobi­li­ser les ouvriers et les cita­dins pour qu’ils fondent des orga­ni­sa­tions autonomes ;
  3. convo­quer d’ur­gence une réunion de l’As­sem­blée 108Assem­blée popu­laire natio­nale. pour qu’elle résolve les graves pro­blèmes aux­quels la nation se trouve confron­tée et la ques­tion des diri­geants du pays (la des­ti­tu­tion de Li Peng), et convo­quer une réunion du Par­ti pour qu’il résolve le pro­blème de la direc­tion du Parti ;
  4. deman­der que le pré­sident du Comi­té 109Comi­té per­ma­nent de l’As­sem­blée popu­laire natio­nale., Wan Li, rentre à la capi­tale pour s’y soi­gner, en sou­hai­tant qu’il pour­ra, bien que malade, pré­si­der la ses­sion de l’Assemblée ;
  5. four­nir des élé­ments tan­gibles pour per­mettre au pré­sident du Comi­té, Wan Li, et aux membres du Comi­té per­ma­nent de pro­po­ser la des­ti­tu­tion de Li Peng ;
  6. démon­ter les boni­ments éhon­tés de Li Peng et com­pa­gnie — « c’est le peuple (le peuple de Pékin y com­pris) qui nous soutient» ;
  7. mon­trer aux sol­dats venus de l’ex­té­rieur qu’on a dupés et qui appar­tiennent au peuple, ain­si qu’aux enne­mis du peuple, quelle est la force du peuple ; et por­ter à la réflexion des sol­dats ceci : com­ment un mou­ve­ment auquel le peuple par­ti­cipe una­ni­me­ment ou que le peuple sou­tient pour­rait-il ne pas être juste ?

« C’est la lutte finale, grou­pons-nous et demain ! » 110Pre­mier vers du refrain de l’In­ter­na­tio­nale., nous pour­rons ensemble aller au devant d’une socié­té libre et démocratique !

27 mai 1989, Union auto­nome des ouvriers de Pékin.

16. Statuts provisoires

Union Auto­nome des ouvriers de la capitale

Le pré­am­bule aux pré­sents sta­tuts est le « Pro­gramme pré­pa­ra­toire de la “com­mis­sion pré­pa­ra­toire” de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin », publié le 25 mai 1989, dont voi­ci le texte 111Cf. le docu­ment n° 8. La ver­sion que nous connais­sons indique la date du 21 mai comme date d’é­la­bo­ra­tion. Le pré­am­bule des pré­sents « Sta­tuts pro­vi­soires », si on en juge par les ver­sions que nous pos­sé­dons, et notam­ment celle que nous avons uti­li­sée pour la tra­duc­tion, pré­sente quelques très légères variantes par rap­port au « Pro­gramme pré­pa­ra­toire » où l’on remarque, en outre, l’ab­sence du point 6..

(Pré­am­bule)

Depuis la mi-avril, au sein du mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote de tout le peuple qui a à sa tête les étu­diants, la majo­ri­té des ouvriers chi­nois ont mani­fes­té l’ardent désir de par­ti­ci­per à la vie poli­tique. Dans le même temps, ils ont réa­li­sé qu’il n’exis­tait pas encore d’or­ga­ni­sa­tion à même de repré­sen­ter véri­ta­ble­ment ce désir des ouvriers. Dans ces cir­cons­tances, nous esti­mons qu’il est néces­saire de fon­der une orga­ni­sa­tion auto­nome qui puisse par­ler au nom des ouvriers et leur per­mette de par­ti­ci­per à la vie poli­tique et de dis­cu­ter poli­tique. À cette fin, nous pré­pa­rons l’or­ga­ni­sa­tion de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale et nous pro­po­sons un pro­gramme préparatoire.

  1. Cette orga­ni­sa­tion doit être auto­nome et com­plè­te­ment indé­pen­dante, fon­dée sui­vant des moda­li­tés démo­cra­tiques, et les ouvriers doivent y adhé­rer volon­tai­re­ment. Elle ne doit subir le contrôle d’au­cune autre organisation.
  2. Le prin­cipe fon­da­men­tal de cette orga­ni­sa­tion doit être, en se fon­dant sur la volon­té majo­ri­taire des ouvriers, d’ex­pri­mer les reven­di­ca­tions éco­no­miques et poli­tiques de ceux-ci. Elle ne doit pas se conten­ter d’être une orga­ni­sa­tion de bien-être.
  3. Cette orga­ni­sa­tion doit avoir une fonc­tion de sur­veillance du Par­ti com­mu­niste chi­nois, le Par­ti de la classe ouvrière.
  4. Cette orga­ni­sa­tion a le droit d’u­ser de tous les moyens légaux et appro­priés pour sur­veiller les repré­sen­tants des per­sonnes juri­diques que sont les entre­prises pro­prié­té du peuple entier ou les entre­prises pro­prié­té col­lec­tive, cela afin de garan­tir que les ouvriers sont les maîtres véri­tables de ces entre­prises ; pour les autres entre­prises, par la négo­cia­tion avec les chefs d’en­tre­prise ou par d’autres moyens légaux, elle doit pro­té­ger les droits et les inté­rêts des ouvriers.
  5. Dans le domaine consti­tu­tion­nel et légal, cette orga­ni­sa­tion doit garan­tir à ses adhé­rents l’en­semble des droits légaux.
  6. Cette orga­ni­sa­tion doit être consti­tuée par des adhé­rents indi­vi­duels ou par des sec­tions éta­blies dans les entre­prises, tous volontaires.

Article Ier : les membres

Tous les ouvriers et tous les employés, actifs ou à la retraite, qu’ils appar­tiennent à des entre­prises ou à des uni­tés d’af­faire de notre ville, et tous les syn­di­cats ou syn­di­cats auto­nomes des entre­prises ou des uni­tés d’af­faire de notre ville, dès lors qu’ils sou­tiennent ses objec­tifs et ses prin­cipes, peuvent adhé­rer à cette organisation.

Les membres indi­vi­duels, ouvriers ou employés, et les membres col­lec­tifs, syn­di­cats ou syn­di­cats auto­nomes, ont le droit de renon­cer à leur qua­li­té de membre.

Les membres de cette orga­ni­sa­tion doivent s’ac­quit­ter du mon­tant de leur coti­sa­tion confor­mé­ment aux règlements.

Article II : le serment

Les membres de cette orga­ni­sa­tion doivent être fidèles au ser­ment sui­vant : « Je res­pec­te­rai de mon plein gré la Consti­tu­tion et les lois de l’É­tat, j’ob­ser­ve­rai la dis­ci­pline de cette orga­ni­sa­tion, j’œu­vre­rai, sans relâche, à défendre les inté­rêts de l’en­semble de la classe ouvrière. »

Article III : l’as­sem­blée générale

  1. L’as­sem­blée géné­rale est l’ins­tance suprême de déci­sion de l’or­ga­ni­sa­tion. Elle sera convo­quée régu­liè­re­ment par la com­mis­sion exé­cu­tive. Sur demande du comi­té per­ma­nent ou d’un cin­quième au moins des adhé­rents, la com­mis­sion exé­cu­tive convo­que­ra une assem­blée géné­rale extraordinaire.
  2. Les sta­tuts de l’or­ga­ni­sa­tion, et tout pro­jet d’a­men­de­ment des sta­tuts, doivent être approu­vés par les deux tiers des adhérents.
  3. Les membres de la com­mis­sion exé­cu­tive sont élus, et les inves­ti­tures doivent être signées par au moins dix adhé­rents avec l’ap­pro­ba­tion de la moi­tié au moins des adhérents.
  4. Les membres de la com­mis­sion exé­cu­tive peuvent être révo­qués par une motion signée par au moins dix adhé­rents avec l’ap­pro­ba­tion de la moi­tié au moins des adhérents.
  5. Toute motion signée par au moins dix adhé­rents peut être sou­mise à l’as­sem­blée géné­rale. Elle sera por­tée à l’ordre du jour de l’as­sem­blée géné­rale par le pré­sident, puis sou­mise à la dis­cus­sion et à la déci­sion de l’as­sem­blée générale.

Article IV : le comi­té permanent

Le comi­té per­ma­nent se com­pose des repré­sen­tants des syn­di­cats et syn­di­cats auto­nomes issus des diverses entre­prises et uni­tés d’af­faires qui adhèrent à notre orga­ni­sa­tion. L’or­ga­ni­gramme et le man­dat du comi­té per­ma­nent sont pré­ci­sés dans les sta­tuts régis­sant le comi­té permanent.

Article V : la com­mis­sion exécutive

  1. La com­mis­sion exé­cu­tive est for­mée de cinq à sept membres élus par l’as­sem­blée générale.
  2. La com­mis­sion exé­cu­tive élit un pré­sident et deux vice-pré­si­dents. Le pré­sident convoque et pré­side les réunions de la com­mis­sion exé­cu­tive. Les vice-pré­si­dents assistent le pré­sident dans son tra­vail et le rem­placent durant ses absences.
  3. La com­mis­sion exé­cu­tive met à exé­cu­tion les réso­lu­tions adop­tées par l’as­sem­blée géné­rale et par le comi­té per­ma­nent, et met en œuvre le tra­vail quo­ti­dien de l’or­ga­ni­sa­tion. Les déci­sions adop­tées à l’in­té­rieur de la com­mis­sion exé­cu­tive doivent l’être selon le prin­cipe de la majo­ri­té simple.
  4. La com­mis­sion exé­cu­tive peut mettre en place divers organes admi­nis­tra­tifs en fonc­tion des besoins.

le 28 mai 1989.

17. [Tract sans titre]

Union auto­nome des ouvriers de Pékin

Étu­diants, pour le bien de notre patrie, ce qu’il vous faut doré­na­vant exi­ger, c’est la convo­ca­tion d’une ses­sion de l’As­sem­blée popu­laire natio­nale. Si ce pro­jet abou­tit, alors, les demandes que vous avez for­mu­lées trou­ve­ront satis­fac­tion très rapi­de­ment. Les canons du mou­ve­ment du « 4 mai » avaient gron­dé pour don­ner à la Chine le mar­xisme-léni­nisme. Ce mou­ve­ment, qui est le nôtre, que don­ne­ra-t-il à la Chine ? Une réforme radi­cale du sys­tème d’É­tat qui per­met­tra au peuple de deve­nir le maître véri­table, et atteindre ce but qui consiste à anéan­tir la tyran­nie pour mettre en œuvre la démo­cra­tie. Notre conduite doit être indu­bi­ta­ble­ment conforme aux inté­rêts du peuple, pour obte­nir ain­si du peuple un sou­tien ferme. En effet, c’est uni­que­ment si le peuple nous apporte son appui inébran­lable que nous pour­rons triompher.

Le 28 mai 1989, Union auto­nome des ouvriers de Pékin.

18. Les ordres du peuple

Union auto­nome des ouvriers des Pékin

Depuis plu­sieurs années, notre grand pays, qui compte plus d’un mil­liard cent mil­lions d’ha­bi­tants, est sou­mis à la dic­ta­ture d’une poi­gnée de bureau­crates qui agitent la ban­nière du socia­lisme alors qu’en réa­li­té ils pra­tiquent une poli­tique dic­ta­to­riale qui main­tient le peuple dans l’i­gno­rance et qu’ils oppriment les intel­lec­tuels. Ils ont grim­pé haut et, au mépris des lois de l’É­tat et de la dis­ci­pline du Par­ti, pour sau­ve­gar­der leur domi­na­tion per­son­nelle, ils aident leurs aco­lytes, s’a­donnent au népo­tisme et placent aux postes impor­tants leurs par­ti­sans. C’est, en par­ti­cu­lier, le cas de l’im­pé­ra­trice douai­rière Cixi de notre époque 112Cixi (1835/​1908). Elle détint le pou­voir effec­tif de 1861 à 1908. On com­prend que c’est de Deng Xiao­ping dont il est ici ques­tion.. Il tire les ficelles du gou­ver­ne­ment der­rière le rideau 113 Chui­lian, lit­té­ra­le­ment : sus­pendre le rideau. Il s’a­git du rideau der­rière lequel l’Im­pé­ra­trice régente assis­tait au Conseil. La méta­phore concer­nant Cixi conti­nue ici d’être filée., sépa­ré des masses et en oppo­si­tion avec le peuple, ne connais­sant rien d’autre que le bridge ou le poker et n’es­sayant pas de com­prendre les souf­frances popu­laires : les dettes inté­rieure et exté­rieure s’ac­cu­mulent, les charges fis­cales pèsent très lour­de­ment sur le peuple et les prix montent en flèche. La Chine, dont le peuple excède un mil­liard d’in­di­vi­dus, est à la traîne du monde. En dépit des faits, il pro­fite de ce qu’il contrôle l’o­pi­nion pour pré­tendre, par exemple, que notre pro­duit natio­nal et notre reve­nu natio­nal se rap­prochent de ceux des autres pays, voire les dépassent. Il ne réa­lise pas que le nombre des habi­tants des autres pays est déri­soire et que le reve­nu par tête des habi­tants de notre pays ne repré­sente qu’une frac­tion infime de ce qu’il est dans les autres pays. Un grand pays comme le nôtre peut-il encore avoir sa place dans le monde ? Nous sommes des hommes comme les autres, pour­quoi le mil­liard d’hommes que nous sommes est-il aus­si pauvre ? Pour­quoi est-il aus­si arrié­ré ? Serait-ce parce que nous sommes des inca­pables ? Si l’on dit que c’est parce qu’il y a trop de gens dans le pays, alors, sachant que la Japon est aus­si un pays où la popu­la­tion est dense, com­ment se fait-il qu’il se porte mieux ? Si l’on dit que c’est parce que les États-Unis sont un pays fon­dé depuis long­temps, alors com­ment se fait-il que la Corée du Sud et Tai­wan aillent mieux que nous ? Voi­là des années que la cor­rup­tion man­da­ri­nale s’ag­grave sans que les diri­geants se montrent capables de résoudre le pro­blème. Quelle en est la rai­son ? Ces der­niers jours, à l’ap­pel du peuple, Li Peng a dit que ses trois enfants ne s’é­taient jamais livrés à la cor­rup­tion man­da­ri­nale. Mais, en tant que Pre­mier ministre, il ne suf­fit pas que tes enfants ne soient pas com­pro­mis dans la cor­rup­tion mada­ri­nale pour que tu sois digne de ta fonc­tion. Il aurait fal­lu pour cela que tu abo­lisses et que tu inter­dises toute cor­rup­tion man­da­ri­nale. Or, jus­qu’à pré­sent, vous autres, vous avez été inca­pables de décou­vrir quels étaient les man­da­rins les plus cor­rom­pus et les plus pour­ris. Si vous n’êtes pas capables de décou­vrir cela, alors pour­quoi res­tez-vous sur scène, à vous faire entre­te­nir aux frais de la prin­cesse ? Quand on se montre inca­pable à ce point, com­ment peut-on être pre­mier ministre ? La Chine est un vaste ter­ri­toire, riche en res­sources natu­relles, où les res­sources en main-d’œuvre abondent. Et vous avez fait de la Chine un gâchis. Vous dites que comme vous n’a­viez pas l’ex­pé­rience de la construc­tion du socia­lisme vous avez fait tra­ver­ser la rivière à un mil­liard d’hommes en cher­chant du pied les pierres 114For­mule chère à Deng Xiao­ping.. Tous ces gens ont ain­si cher­ché les pierres du pied pen­dant dix ans. Quel che­min doivent-ils suivre main­te­nant ? N’é­tait-il pas inévi­table que tous ceux, nom­breux, qui n’ont pas trou­vé les pierres sous leurs pieds péris­sent, englou­tis dans la rivière ? Est-il conce­vable que les man­da­rins jouent, comme des enfants, avec la vie et les biens des gens ? La réforme dure depuis plus de dix ans, mais elle ne se dirige dans aucune direc­tion et ne pour­suit aucun objec­tif. En defi­ni­tive, vers quel endroit un mil­liard de gens courent-ils ? Quel man­da­rin pour­ra, de façon concrète et pré­cise, répondre clai­re­ment à cette ques­tion ? On nous dit : peu importe que le chat soit blanc ou noir, s’il attrape les sou­ris, c’est un bon chat 115Autre for­mule affec­tion­née par Deng Xiao­ping.. Mais, s’il y a une sou­ris, le chat blanc et le chat noir vont devoir l’at­tra­per et alors ne vont-ils pas se bagar­rer ? Et, ensuite, ce sera la confu­sion, il y aura des contra­dic­tions. Les divi­sions iront en s’ag­gra­vant. Imman­qua­ble­ment, à mesure qu’ils man­ge­ront, les chats bureau­crates gros­si­ront, tan­dis que les chats du peuple iront en mai­gris­sant. Com­ment cela pour­rait-il être la meilleure voie pour gou­ver­ner le pays ?

Le pre­mier ministre Zhou a dit : « Celui qui gagne à lui les étu­diants pour­ra s’as­su­rer l’a­ve­nir. » Le pré­sident Mao a dit : « Ceux qui répriment le mou­ve­ment étu­diant ne connaî­tront sûre­ment pas un bon dénoue­ment », « Tant qu’on ne frappe pas sur ce qui est réac­tion­naire, impos­sible de le faire tom­ber. Là où le balai ne passe pas, la pous­sière ne s’en va pas d’elle-même », 116Mao, « Tout ce qui est réac­tion­naire est pareil : tant qu’on ne le frappe pas, impos­sible de le faire tom­ber. C’est comme lors­qu’on balaie : là où le balai ne passe pas, la pous­sière ne s’en va pas d’elle-même », (« la Situa­tion et notre poli­tique après la vic­toire dans la Guerre de Résis­tance contre le Japon » [13 août 1945], repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge]. « Quand il y a lutte il y a sacri­fice » 117Mao : « Quand il y a lutte il y a sacri­fice…» (« Ser­vir le peuple » [8 sep­tembre 1944], repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge]., et « Le pou­voir est au bout du fusil. » 118Mao : « Chaque com­mu­niste doit s’as­si­mi­ler cette véri­té que “le pou­voir est au bout du fusil”.», (« Pro­blème de la guerre et de la stra­té­gie. [6 novembre 1938]), repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].. Si on veut la démo­cra­tie, il faut faire des sacri­fices : si on ne les y contraint pas par la force, les gou­ver­nants ne se reti­re­ront pas d’eux-mêmes de la scène de l’His­toire 119Détour­ne­ment d’une parole de Mao : « 1’ennemi ne péri­ra pas de lui-même. Ni les réac­tion­naires chi­nois, ni les forces agres­sives de l’im­pé­ria­lisme amé­ri­cain en Chine ne se reti­re­ront d’eux-mêmes de la scène de l’His­toire. » (« Mener la révo­lu­tion jus­qu’au bout » [30 décembre 1948]), repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].. Comme ils ne sau­raient cer­tai­ne­ment pas nous faire la grâce de nous accor­der des droits démo­cra­tiques, nous devons lut­ter pour conqué­rir la démo­cra­tie. Sans démo­cra­tie véri­table, la spé­cu­la­tion man­da­ri­nale et la cor­rup­tion ne pour­ront dis­pa­raître radi­ca­le­ment. Et si nous vou­lons réa­li­ser une démo­cra­tie véri­table, il nous fau­dra abo­lir le sys­tème de l’i­na­mo­vi­bi­li­té. Sinon, on a la dic­ta­ture d’un seul homme où per­sonne n’ose expri­mer son indi­gna­tion : com­ment, dans ce cas, par­ler encore de démo­cra­tie ? Sans démo­cra­tie, pas de droits de l’homme. Sans droits de l’homme, nous ne sommes que des esclaves. Levons-nous, peuple qui ne veut pas être esclave, avan­çons la poi­trine, redres­sons-nous 120Hymne natio­nal.. Ne disons pas que nous ne pos­sé­dons rien, nous qui vou­lons deve­nir les maîtres du monde 121 L’In­ter­na­tio­nale.. Allu­mons vite le feu ardent du mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote. Ne lais­sons pas échap­per cette occa­sion qui nous est don­née de réus­sir. La pra­tique prouve que désor­mais la ques­tion prin­ci­pale qui se pose au mou­ve­ment démo­cra­tique est la ques­tion du pou­voir. C’est uni­que­ment en ren­ver­sant les dic­ta­teurs, en liqui­dant les obs­tacles qui s’é­lèvent devant le mou­ve­ment démo­cra­tique, qu’on peut espé­rer le faire avan­cer. Sinon, notre mou­ve­ment démo­cra­tique sera iné­luc­ta­ble­ment vic­time de la ven­gance 122 Qiu hou suan zhang, lit­té­ra­le­ment : règle­ment de compte après la mois­son d’au­tomne. des dic­ta­teurs. Aus­si, le mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote nous appelle ! Voi­ci quelles sont les paroles de l’hymne de Kang­da 123Il s’a­git de l’É­cole poli­tique et mili­taire anti japo­naise du peuple chi­nois, qui était basée à Yan’an durant la « Guerre de résis­tance contre le Japon ».: « Ouvriers, étu­diants, com­mer­çants, tous unis. Cou­rons en pre­mière ligne de ce mou­ve­ment patrio­tique. Écou­tez l’ap­pel de la démo­cra­tie qui reten­tit ! Regar­dez, la ban­nière de la liber­té qui flotte au vent. Ouvriers, étu­diants, com­mer­çants, cou­rons ensemble dans les vagues de la tem­pête accueillir l’au­rore. Ouvriers, étu­diants, com­mer­çants, le peuple entier se lève. Cou­rons en pre­mière ligne de ce mou­ve­ment patriotique. »

Cama­rades, nous nous oppo­sons à cer­tains diri­geants du Par­ti. Cela ne signi­fie aucu­ne­ment que nous nous oppo­sions à la direc­tion du Par­ti. Nous nous oppo­sons à cer­tains diri­geants du gou­ver­ne­ment. Cela ne signi­fie aucu­ne­ment que nous nous oppo­sions au socia­lisme. Si les dic­ta­teurs réac­tion­naires nous collent, à tort et à tra­vers, des éti­quettes sur le dos 124 Kou mao­zi. Lit­té­ra­le­ment, « mettre un cha­peau à l’en­vers ». L’ex­pres­sion signi­fie qu’on a abu­si­ve­ment col­lé sur quel­qu’un un label poli­tique qu’il ne méri­tait pas., s’ils nous frappent, comme bon leur semble, à coups de trique, n’est-ce pas parce qu’il n’y a pas de démo­cra­tie ? Serait-il pos­sible que nous lais­sions se repro­duire un tel phé­no­mène ? Le peuple ne l’ac­cep­te­ra pas ! Que les masses s’u­nissent pour chas­ser au plus vite ce grand dic­ta­teur qu’est Deng Xiao­ping de la scène de l’His­toire, et vienne ain­si en aide à la Chine et au peuple. Ain­si, sur toute notre Chine s’é­ta­bli­ra une situa­tion nou­velle de démo­cra­tie et de liberté.

Le 29 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de Pékin.

19. Dépêche

Union auto­nome des ouvriers de la capitale

État des négo­cia­tions de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin avec le bureau de la Sécu­ri­té publique rela­ti­ve­ment à l’ar­res­ta­tion de Shen Yin­han, un de ses membres.

Ce matin, à 10 h 40, Han Dong­fang, délé­gué de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire des ouvriers de la capi­tale, Li xx, conseiller juri­dique 125Li xx était un étu­diant en troi­sième cycle de droit, aujourd’­hui réfu­gié à l’é­tran­ger., et une tren­taine de per­sonnes, se sont ren­dus à la grande porte du bureau de la sécu­ri­té publique de Pékin, pour enta­mer des négo­cia­tions à pro­pos de Shen Yin­han, un membre de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, qui a été, de bonne heure ce matin, emme­né par deux poli­ciers dans une voi­ture de police.

Gong Shi­si, du ser­vice du cour­rier et de l’ac­cueil du bureau de la Sécu­ri­té publique, a reçu le délé­gué Han Dong­fang et Li xx. Le conseiller juri­dique Li xx a for­mu­lé, au nom de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, trois demandes : 1) le bureau de la Sécu­ri­té publique doit confir­mer si Shen Yin­han a été cap­tu­ré ou non ; 2) s’il est déte­nu ou s’il a été arrê­té, la pro­cé­dure légale lui a‑t-elle été appli­quée ; 3) s’il est déte­nu, les rai­sons pour les­quelles il a été appré­hen­dé doivent être indi­quées à sa famille et à la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capitale.

Gong Shi­si, char­gé de l’ac­cueil au bureau de la Sécu­ri­té publique, a répon­du en trois points : 1) l’U­nion auto­nome des ouvriers est une orga­ni­sa­tion illé­gale et ses acti­vi­tés trans­gressent l’ordre de la loi mar­tiale ; 2) eux s’oc­cupent de l’ac­cueil, il ne sont pas au cou­rant des affaires concrètes ; 3) les ouvriers qui viennent à la porte du bureau de la Sécu­ri­té publique trans­gressent l’ordre de la loi mar­tiale. Le conseiller juri­dique Li xx a répon­du : le carac­tère illé­gal de telle ou telle orga­ni­sa­tion n’entre pas dans le cadre de la pré­sente négo­cia­tion ; le ser­vice d’ac­cueil n’est pas au cou­rant des affaires mais n’entre-t-il pas dans ses attri­bu­tions de connaître les affaires et d’y appor­ter une réponse. Les per­sonnes char­gées de l’ac­cueil ont répon­du qu’elles n’é­taient pas au cou­rant des affaires, mais ensuite elles ont dit que le conseiller juri­dique expo­sait les demandes sans y être habi­li­té par l’U­nion auto­nome et qu’elles vou­laient rece­voir direc­te­ment les délé­gués de l’U­nion auto­nome, or, quand le conseiller juri­dique Li xx s’est pro­vi­soi­re­ment reti­ré, la ren­contre entre le délé­gué des ouvriers Han Dong­fang et les res­pon­sables du bureau de la Sécu­ri­té publique a tour­né court. Main­te­nant, une cen­taine de per­sonnes sont réunies devant la grande porte du bureau de la Sécu­ri­té publique et demandent la libé­ra­tion [de Shen Yinhan].

Selon cer­taines infor­ma­tions, deux autres ouvriers appar­te­nant à la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, Qian Yuming et Xiang Dong­ping 126En fait, ce n’est pas de Xiang Dong­ping mais de Bai Dong­ping dont il est ici ques­tion. Mais peut-être ne s’a­git-il que d’un lap­sus cala­mi du rédac­teur ou d’une coquille de l’é­di­teur. auraient été aus­si capturés.

30 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la capitale.

20. Avis urgent

Union auto­nome des ouvriers de la capitale

Ce matin, à l’aube, à 2 heures, lors de la confé­rence de presse orga­ni­sée par l’UAE [Union auto­nome des étu­diants), un témoin ocu­laire a attes­té que le jour même, à 1 heure pas­sée, aux alen­tours de l’Hô­tel de Pékin, deux poli­ciers sont sor­tis d’une jeep de la marque « Pékin » équi­pée d’un giro­phare et ont fait des­cendre un cycliste de son vélo. Le cycliste a hur­lé : « Pour­quoi m’empoignez-vous ? ». Mais les poli­ciers, sans rien répondre, l’ont pous­sé de force dans la jeep. Quand l’homme qu’on enle­vait a été tiré vers la jeep, il a lais­sé tom­ber par terre deux cahiers de notes et ledit témoin ocu­laire les a remis, sur-le-champ, à l’UAE.

Sur le des­sus de ces deux cahiers, un nom était ins­crit : « Shen Yin­han ». Dans ces cahiers, on trouve cette phrase : « Les deux cents yuans col­lec­tés hier, je les ai lais­sés chez Wan­tie ». Pour la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, cela apporte la preuve que l’homme qu’on a enle­vé était M. Shen Yin­han, un des membres de la com­mis­sion exé­cu­tive de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale. Lorsque l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale a appris cette nou­velle, elle a immé­dia­te­ment envoyé quel­qu’un pour enquê­ter auprès de la famille de M. Shen Yin­han et a décou­vert qu’ef­fec­ti­ve­ment celui-ci n’é­tait pas ren­tré chez lui.

L’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale est une orga­ni­sa­tion créée selon le prin­cipe de la « libre asso­cia­tion », sti­pu­lé dans la Consti­tu­tion, et dont aucun acte n’a jamais trans­gres­sé la loi. La com­mis­sion pré­pa­ra­toire se ren­dra aujourd’­hui, à 12 heures, au bureau de la Sécu­ri­té publique de Pékin pour y négo­cier. Elle appelle à un vaste ras­sem­ble­ment des ouvriers pour exi­ger la libé­ra­tion de son délé­gué ouvrier, M. Shen Yin­han. Les ouvriers, eux aus­si, ont le droit d’être patriotes. Sau­vons notre com­pa­triote ! Sau­vons notre délé­gué ouvrier !

30 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la capitale.

21. Conférence de presse

Union auto­nome des ouvriers de la capitale

Le 30 mai, à 21 h 30, la com­mis­sion pré­pa­ra­toire des ouvriers de la capi­tale a orga­ni­sé une confé­rence de presse sur le côté nord du Monu­ment aux héros du peuple. Le porte-parole de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, Han Dong­fang, a lu à voix haute les « Sta­tuts pro­vi­soires de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale » 127Texte du 28 mai 1989 [docu­ment n° 16].. Des repré­sen­tants des unions de tous les milieux de la capi­tale sont aus­si inter­ve­nus pour pré­sen­ter leurs féli­ci­ta­tions. Pen­dant la confé­rence de presse, un délé­gué du dépar­te­ment de la jeu­nesse du Par­ti tra­vailliste anglais, Shi­di­fen [Ste­phen] Yue­li [?] a lu un télé­gramme de féli­ci­ta­tions envoyé par le dépar­te­ment de la jeu­nesse du Par­ti tra­vailliste anglais. Il a dit : « Au cours de ces der­nières semaines, les étu­diants chi­nois ont gagné le sou­tien des peuples du monde entier. Et nous sommes très heu­reux de consta­ter que les ouvriers chi­nois par­ti­cipent à ce mou­ve­ment démo­cra­tique ». Il a esti­mé que le socia­lisme avait besoin de la démo­cra­tie exac­te­ment comme le corps a besoin d’oxy­gène. Puis il a indi­qué que les ouvriers anglais s’é­taient tou­jours ran­gés aux côtés des ouvriers chi­nois. Le texte com­plet du télé­gramme de féli­ci­ta­tions envoyé par les tra­vaillistes anglais est le sui­vant : « Sou­hai­tons que l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale (com­mis­sion pré­pa­ra­toire) obtienne une vic­toire défi­ni­tive. Pour le mou­ve­ment syn­di­cal démo­cra­tique et pour la démo­cra­tie ouvrière, pro­lé­taires de tous les pays, unis­sons-nous. » Un membre du Par­ti tra­vailliste cana­dien (ten­dance de gauche) a éga­le­ment expri­mé ses féli­ci­ta­tions, débor­dantes d’ardeur.

Ensuite, Li xx, le conseiller juri­dique de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, a fait état du dérou­le­ment de la négo­cia­tion menée auprès de la Sécu­ri­té publique à pro­pos des trois membres de la com­mis­sion pré­pa­ra­toire des ouvriers qui ont été appré­hen­dés. La com­mis­sion pré­pa­ra­toire des ouvriers a sou­le­vé trois points devant le bureau de la Sécu­ri­té publique : 1) le bureau de la Sécu­ri­té publique doit confir­mer s’il détient ou non ces trois per­sonnes : Shen Yin­han, Bai Dong­ping et Qian Yuming ; 2) au cas où elles seraient effec­ti­ve­ment déte­nues, quelle est la nature de leur déten­tion et a‑t-on res­pec­té la pro­cé­dure légale ; 3) au cas où elles seraient déte­nues, peut-on ou non en indi­quer la rai­son à la com­mis­sion pré­pa­ra­toire des ouvriers ain­si qu’à leur famille. Jus­qu’à pré­sent, aucune réponse claire n’a été appor­tée. Si on se réfère au Code de pro­cé­dure pénale, pour déte­nir ou arrê­ter quel­qu’un il faut pro­duire un man­dat de déten­tion ou d’ar­rêt. La per­sonne qu’on détient ou qu’on arrête doit viser ce docu­ment, et le bureau de la Sécu­ri­té publique doit pré­ve­nir les parents de la per­sonne qu’on détient ou qu’on arrête dans les vingt-quatre heures. Le bureau de la Sécu­ri­té publique n’a pas confir­mé s’il avait oui ou non appré­hen­dé les ouvriers et si oui ou non il avait requis contre eux des arres­ta­tions confor­mé­ment à la loi.

**22. L’ob­jec­tif de l’U­nion auto­nome des ouvriers de la construc­tion urbaine

L’U­nion auto­nome des ouvriers de la construc­tion urbaine de Chine est fon­dée offi­ciel­le­ment le 21 mai 1989, à 18 heures. Notre objec­tif est le suivant :

Nous ne sommes pas des cri­mi­nels condam­nés à la réforme par le tra­vail et sou­mis au contrôle judi­ciaire. Nous sommes des citoyens légi­times de la Répu­blique. Nous vou­lons la démo­cra­tie et la liber­té. Les étu­diants qui font la grève de la faim reven­diquent pour le peuple. Nous, les ouvriers, nous sommes des Chi­nois conscients. Face à un gou­ver­ne­ment aus­si cruel, nous sommes de tout cœur avec nos frères étu­diants. Nous, les ouvriers, nous sommes déter­mi­nés à sou­te­nir les étu­diants jus­qu’au bout !

La cala­mi­té natio­nale est immi­nente. Cha­cun se doit d’as­su­mer ses res­pon­sa­bi­li­tés envers la patrie. Ouvriers de tous les corps de métier, unis­sez-vous, pro­té­gez nos étu­diants. Xiao­ping, Li Peng, celui qui ne sait pas appré­cier nos faveurs, nous le sor­tons de scène !

Le 21 mai 1989,

Union auto­nome des ouvriers de la construc­tion urbaine de Chine,

le pré­sident.

23. Manifeste de l’Union Autonome des Ouvriers de Canton

L’U­nion auto­nome des ouvriers de Can­ton, qui, au cours de ce mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote d’en­ver­gure natio­nale, s’est déjà déve­lop­pée jus­qu’à deve­nir une orga­ni­sa­tion patrio­tique par­faite, pro­clame aujourd’­hui sa fon­da­tion. L’U­nion auto­nome des ouvriers de Can­ton est une orga­ni­sa­tion spon­ta­née des ouvriers de Can­ton, contrô­lée par les cita­dins de Can­ton et res­pon­sable devant eux. Notre but consiste à unir toutes les forces qu’il est pos­sible d’u­nir, pour appor­ter à cette Chine qui souffre la liber­té, la démo­cra­tie et la pros­pé­ri­té, et pour pro­mou­voir le cours de la démo­cra­ti­sa­tion en Chine.

À l’heure actuelle, Pékin a ouvert le feu, le sang du peuple coule. La nation chi­noise est arri­vée à un moment de crise où il y va de sa vie : le lourd far­deau de l’his­toire repose sur les épaules de chaque ouvrier chi­nois et c’est là une res­pon­sa­bi­li­té à laquelle nul ne sau­rait se sous­traire. S’op­po­ser à la vio­lence, sou­te­nir les étu­diants, pro­pa­ger la démo­cra­tie et la science, il n’y a pas d’autre choix.

La Chine s’en­fonce dans le brouillard, elle tourne en rond. Le bureau­cra­tisme règne en des­pote, l’é­co­no­mie et la poli­tique sont pour­ries. La pros­pé­ri­té ou la ruine de notre pays sont liées aux inté­rêts par­ti­cu­liers de chaque ouvrier. Les ouvriers de Can­ton sont à bout de patience. Nous, Union auto­nome des ouvriers de Can­ton, en appe­lons d’ur­gence aux per­son­na­li­tés de tous les milieux de la socié­té pour qu’ils sou­tiennent et prennent part à ce mou­ve­ment démo­cra­tique et patriote d’en­ver­gure nationale.

Le 4 juin 1989,

Union auto­nome des ouvriers de Canton.

24. Déclaration demandant énergiquement l’interdiction immédiate de l’organisation illégale « Union Autonome des Ouvriers »

Syn­di­cat géné­rale de la muni­ci­pa­li­té de Pékin

Au cours de ces der­niers jours, une petite poi­gnée d’in­di­vi­dus se sont ras­sem­blés et ont fon­dé une orga­ni­sa­tion illé­gale appe­lée l’«Union auto­nome des ouvriers » en se récla­mant fal­la­cieu­se­ment de la classe ouvrière. Ils ont répan­du des rumeurs, dis­tri­bué des tracts, lan­cé des slo­gans deman­dant le ren­ver­se­ment du gou­ver­ne­ment popu­laire, fomen­té des grèves, pris d’as­saut des organes de la Sécu­ri­té publique et pré­ten­du qu’ils étaient en train de fon­der une orga­ni­sa­tion auto­nome « com­plè­te­ment indé­pen­dante ». Leurs objec­tifs étaient de divi­ser les rangs de la classe ouvrière et de se livrer à des acti­vi­tés illé­gales des­ti­nées à sabo­ter ouver­te­ment l’ordre nor­mal de la capi­tale qui était en train de reve­nir. Leurs pra­tiques, fon­da­men­ta­le­ment, ne sont pas en accord avec les aspi­ra­tions de la classe ouvrière. La masse des employés, des ouvriers et des cadres syn­di­caux ne tolé­re­ront jamais des acti­vi­tés qui sont déli­bé­ré­ment source d’a­gi­ta­tion. Le Syn­di­cat géné­ral de la muni­ci­pa­li­té de Pékin déclare solen­nel­le­ment : dans la Chine socia­liste, les orga­ni­sa­tions syn­di­cales, qui ont été fon­dées confor­mé­ment à la « Loi de la Répu­blique popu­laire de Chine sur les syn­di­cats » et aux « Sta­tuts des syn­di­cats de Chine », sont les seules orga­ni­sa­tions socio poli­tiques à repré­sen­ter les inté­rêts de la classe ouvrière. Aus­si, les dis­po­si­tions arrê­tées pour la fon­da­tion de l’«Union auto­nome des ouvriers » sus­men­tion­née et cette fon­da­tion sont-elles com­plè­te­ment illé­gales. Nous deman­dons éner­gi­que­ment aux organes gou­ver­ne­men­taux concer­nés d’a­dop­ter immé­dia­tem­ment des mesures pour inter­dire cette orga­ni­sa­tion illé­gale. Voi­là un mois ou plus que la masse des employés et des ouvriers, d’un bout à l’autre de la muni­ci­pa­li­té, fai­sant montre d’un haut degré de conscience poli­tique et de sa convic­tion d’être le maître du pays, a sur­mon­té de nom­breuses dif­fi­cul­tés, appor­tant sa gigan­tesque contri­bu­tion au main­tien de la pro­duc­tion de la capi­tale, des trans­ports, de la vie quo­ti­dienne, du tra­vail et de l’ordre social nor­mal. Elle est digne d’être la force vive qui sau­ve­garde la sta­bi­li­té et l’u­ni­té. Le Syn­di­cat géné­ral de la muni­ci­pa­li­té de Pékin exhorte la masse des employés, des ouvriers et des cadres syn­di­caux de tous les niveaux à accroître sa vigi­lance, à dis­tin­guer clai­re­ment entre la véri­té et le men­songe, à main­te­nir réso­lu­ment l’u­ni­té de la classe ouvrière, à s’op­po­ser à la fon­da­tion d’or­ga­ni­sa­tions illé­gales, quelles qu’elles soient, qui se réclament de la classe ouvrière, à res­ter fer­me­ment à son poste, à s’ap­pli­quer à la pro­duc­tion et au tra­vail et à appor­ter de nou­velles contri­bu­tions à la sta­bi­li­sa­tion de la situa­tion dans la capitale.

Le 1er juin 1989.

25. Pékin : Circulaire publique n°10 sur la reddition des dirigeants des organisations illégales

[(Le pré­sent texte est la cir­cu­laire n°10 du gou­ver­ne­ment popu­laire de la muni­ci­pa­li­té de Pékin et du com­man­de­ment des troupes char­gées d’im­po­ser la loi martiale.)]

L’U­nion auto­nome des étu­diants de Pékin, connue aus­si sous le nom de Gao­zi­lian 128Abré­via­tion de Gaoxiao ziz­hi lianhe hui., et l’U­nion auto­nome des ouvriers de la capi­tale, connue aus­si sous le nom de Gong­zi­lian 129Abré­via­tion de Gon­gren ziz­hi lianhe hui., sont des orga­ni­sa­tions illé­gales qui n’ont pas été enre­gis­trées confor­mé­ment à la loi. Elles doivent se dis­soudre d’elles-mêmes immé­dia­te­ment. Les diri­geants de ces deux orga­ni­sa­tions ont été les meneurs qui ont fomen­té la rébel­lion contre-révo­lu­tion­naire dans la capi­tale et l’ont organisée.

À comp­ter de la date de pro­mul­ga­tion de cette cir­cu­laire publique, les deux caté­go­ries d’in­di­vi­dus sus­men­tion­nés doivent se rendrent d’eux-mêmes sur le champ aux auto­ri­tés de la sécu­ri­té publique de leur lieu d’o­ri­gine s’ils veulent être trai­tés avec clé­mence. Ceux qui refu­se­ront de se rendre d’eux-mêmes seront remis à la jus­tice confor­mé­ment à la loi et punis avec sévérité.

8 juin 1989.

26.Avis de recherche concernant trois dirigeants de l’Union autonome des ouvriers de Pékin

Ce jour [14 juin], le bureau de la sécu­ri­té publique de Pékin a publié un avis de recherche concer­nant trois diri­geants de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin (UAOP). La cir­cu­laire a été trans­mise par le minis­tère de la Sécu­ri­té publique dans tout le pays.

L’a­vis déclare que I’UAOP est « une orga­ni­sa­tion illé­gale cou­pable d’a­voir fomen­té et orga­ni­sé une rébel­lion contre-révo­lu­tion­naire à Pékin ». Les trois per­sonnes recher­chées sont :

Han Dong­fang. Sexe mas­cu­lin, vingt-six ans. Che­mi­not au dépar­te­ment de main­te­nance des loco­mo­tives de Fengtai ;

He Lili. Sexe mas­cu­lin, vingt-six ans. Maître de confé­rences à l’U­ni­ver­si­té des ouvriers du Bureau de l’in­dus­trie des machines de Pékin ;

Liu Qiang. Sexe mas­cu­lin, vingt-six ans. Ouvrier à l’u­sine n°3 209 de Pékin.

La cir­cu­laire donne les carac­té­ris­tiques phy­siques des per­sonnes recher­chées avec leurs pho­to­gra­phies jointes. La cir­cu­laire pré­cise que, dès qu’il seront décou­verts, les uni­tés char­gées d’ap­pli­quer la loi les détien­dront et en avi­se­ront la bureau de la Sécu­ri­té publique de Pékin.

[Docu­ments tra­duits parAn­gel Pino.]

  • 1
    Nous connais­sons un tract, « Adresse aux ouvriers de tout le pays », signé de l’U­nion auto­nome, dont la revue Shiyue pin­glun [cri­tique d’oc­tobre] assure qu’il a été dif­fu­sé au milieu du mois de mai, donc, pro­ba­ble­ment, avant que l’U­nion auto­nome existe formellement.
  • 2
    Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na » [le rôle des syn­di­cats en Chine conti­nen­tale], Issues and Stu­dies, Tai­pei, vol. 26, n°2, Februa­ry 1990, p. 96. Une autre source fait état de trois mille piquets ouvriers (cf. A. Pino, « Entre­tien avec Yue Wu, vice-com­man­dant en chef de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin », FO Heb­do, Paris, n° 2009, 11 octobre 1989, p. 23). Le 21 mai, un groupe de défense, l’é­quipe des « brave-la-mort » [gan­si dui], com­po­sé de plus de vingt mille ouvriers et étu­diants s’é­tait consti­tué sur la place Tian’an­men. Une autre équipe se for­me­ra le 25 mai (cf. « Beiz­huang de minyun » [le pathé­tique mou­ve­ment pour la démo­cra­tie], Ming­bao chu­banshe, Hong Kong, juin 1989, p.83 et p.96). À pro­pos de cette der­nière, voir : « Entre­tien avec le chef de l’é­quipe des piquets de contrôle ouvriers », Tinan’an­men yi jiu ba jiu [Tan’an­men, 1989], recueil de textes com­pi­lés par la rédac­tion du Lianhe bao [jour­nal union], Lian­jing, Tai­pei, août 1989, pp.406 – 407.
  • 3
    Cf. l’in­ter­view d’un res­pon­sable de l’U­nion réa­li­sée dans la der­nière décade du mois de mai et parue dans la revue Shiyue pin­glun. (Trois entre­tiens, réa­li­sés par « un lec­teur » de la publi­ca­tion dans le der­niers jours du mois de mai, ont été don­nés dans Shiyue pin­glun, qui sont main­te­nant repris dans : Zhong­guo minyun yuan ziliao jingxuan [choix de docu­ments ori­gi­naux rela­tifs au mou­ve­ment démo­cra­tique chi­nois], vol. 2, Shiyue pin­glun chu­banshe, Hong Kong, novembre 1989, pp.32 – 36, 37 – 38, et 39 – 41 [abré­gés par la suite en : SP I, SP II ou SP III].). La cita­tion pro­vient ici de SP I, p.32.
  • 4
    SP I, pp. 32 – 33.
  • 5
    À savoir : 1) réha­bi­li­ta­tion du mou­ve­ment étu­diant et dénon­cia­tion de l’é­di­to­rial du 26 avril ; 2) ouver­ture d’un dia­logue d’é­gal à égal retrans­mis en direct à la télévision.
  • 6
    Depuis 1982, de nom­breux cas de grèves nous sont néan­moins connus. Pour un inven­taire, voir : Chiang Chen-chang, The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na, op. cit., p.90 sq.; J.-L. Dome­nach, « Poli­tique sou­ter­raine et agi­ta­tion sociale dans la Chine post-maoïste », in varii auc­tores, la Socié­té chi­noise après Mao (entre auto­ri­té et moder­ni­té), Fayard, Paris, 1986, pp.91 – 129.
  • 7
    Cf. Beiz­huang de minyun, op. cit., p.78.
  • 8
    On a par­lé d’é­quipes de com­mis­saires poli­tiques effec­tuant des tour­nées d’ins­pec­tion sur les lieux de tra­vail pour dres­ser des listes noires (cf. R. Frank­lin, « La Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », Libé­ra­tion, Paris, 30 mai 1989, p. 24 [repris main­te­nant dans : Chine, le prin­temps de Pékin de la liber­té au mas­sacre, Libé­ra­tion col­lec­tion numé­ro 1, Paris, juin 1989, p. 72] ).
  • 9
    Ain­si à Shan­ghai où des « primes de sta­bi­li­té », de 50 yuans ont été offertes pour res­ter à l’é­cart des mani­fes­ta­tions (AFP, 11 juin).
  • 10
    Cf. « Beiz­huang de minyun », op. cit., p.90. « Nous n’a­vons pas encore les moyens de lan­cer des appels à la grève » admet­tront les membres de l’U­nion (cf. R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit.).
  • 11
    SP I, p. 33
  • 12
    Vers la même époque, un res­pon­sable de l’U­nion révé­lait l’or­ga­ni­gramme sui­vant : secré­ta­riat, bureau de pro­pa­gande, bureau de liai­son, bureau d’ac­cueil, ser­vice d’in­ten­dance, ser­vice d’ordre et bureau de dif­fu­sion [radio] (SP I, p. 33).
  • 13
    cf. SP I, p. 33
  • 14
    Un res­pon­sable de l’U­nion décla­rait à la fin du mois de mai à un inter­lo­cu­teur de Hong Kong : « Quant à la façon de pro­mou­voir ce mou­ve­ment démo­cra­tique, tu me per­met­tras de ne pas abor­der le sujet ici. Je peux seule­ment dire que nous espé­rons construire des orga­ni­sa­tions comme l’U­nion auto­nome des ouvriers. » (SP III, p. 41.)
  • 15
    Cf. Ming­bao, Hong-kong, 13 juin 1989, p. 6.
  • 16
    Cf. Chi­na’s Inde­pendent Labour Move­ment, Hong Kong Trade Union Edu­ca­tion Centre-Asia Moni­tor of Resource Cen­ter, Hong Kong, June 1989, p.10.
  • 17
    Zhao Lin­pu, menui­sier de trente-cinq ans. Pro­pos recueillis par R. Frank­lin, la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois, op. cit.
  • 18
    Cf. R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit. Les affi­lia­tions étaient pour la plu­part indi­vi­duelles et sanc­tion­nées par la déli­vrance d’une carte (SP I, p. 34 ; Chi­na’s Inde­pendent Labour Move­ment, op. cit., p. 3). Des cartes ont été exhi­bées à la télé­vi­sion de Pékin, le 14 juin 1989 (bul­le­tin des écoutes radio­pho­niques de la BBC, Sumr­na­ry of World Broad­casts [Part 3 : Far East], Londres, [abré­gé par la suite en SWB], FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​10).
  • 19
    Cf. Dépêches AFP, Pékin, 30 mai et 2 juin 1989.
  • 20
    Cf. SP II, p. 38 ; R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit. La « voi­ture de pro­pa­gande » est évo­quée dans le docu­ment n°10.
  • 21
    Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na », op. cit., p. 90 sq.
  • 22
    Des ten­ta­tives nous sont connues, au cours de la décen­nie pré­cé­dente, ayant eu pour but de mettre sur pied des syn­di­cats libres. Voir : Chiang Chen-chang, « The Role of Trade Unions in Main­land Chi­na », op. cit.; J.-L. Dome­nach, « Poli­tique sou­ter­raine et agi­ta­tion sociale dans la Chine post-maoïste », op. cit.
  • 23
    Cf. SP III, p. 41.
  • 24
    R. Frank­lin, « la Reven­di­ca­tion ouvrière du mai chi­nois », op. cit.
  • 25
    Le 18 mai, la Fédé­ra­tion des syn­di­cats de Chine offri­ra cent mille yuans à la Croix-Rouge de Pékin, pour venir en aide aux étu­diants qui font la grève de la faim. Cf. Agence Xin­hua, 18 mai 1989 (SWB, FE/​0472, 2 juin 1989, B2/​11); « La Fédé­ra­tion natio­nale des syn­di­cats de Chine fait don de 100.000 yuans », Da Gong Bao (L’im­par­tial) Hong Kong, 19 mai 1989, p. 5).
  • 26
    Cf. SP I, p. 35.
  • 27
    Cf. SP III, p. 39 : « l’U­nion auto­nome des ouvriers n’est qu’une orga­ni­sa­tion sociale, aucu­ne­ment un par­ti, et elle ne devien­dra pas un parti ».
  • 28
    Cf. SP III, p. 39.
  • 29
    Id.
  • 30
    Il n’est pas inutile de pré­ci­ser ici que les textes de l’U­nion ont sou­vent été des œuvres spon­ta­nées, reflé­tant davan­tage la posi­tion indi­vi­duelle de leur auteur que celle du groupe.
  • 31
    Cf. Chi­na. Inde­pendent Labour Move­ment, op. cit., p. 5.
  • 32
    Id., p. 5. L’U­nion auto­nome des étu­diants de Pékin affi­che­ra, une pre­mière fois, le 28 avril, la même volon­té. Sur les reven­di­ca­tions du mou­ve­ment démo­cra­tique du « Prin­temps de Pékin » de 1978, cf. Huang S., A. Pino, I.. Epstein, Un bol de nids d’hi­ron­delles ne fait pas le prin­temps de Pékin, Biblio­thèque asia­tique, Chris­tian Bour­gois édi­teur, Paris, 1980.
  • 33
    Cf. SP III, p. 41.
  • 34
    Le 1er juin, au dire de Chen Xitong, « Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), sup­plé­ment à Bei­jing infor­ma­tion, Pékin, n° 30, 24 juillet 1989, p.XIX.
  • 35
    Voir aus­si le Xin­wen­bao, Hong Kong, 30 mai 1989 (tra­duc­tion anglaise dans : SWB, FE/​0471, 1er juin 1989, B2/​10); dépêche AFP, 30 mai 1989.
  • 36
    Radio Pékin, 31 mai 1989 (SWB, FE/​0473, 3 juin 1989, B2/​1). L’in­for­ma­tion sera reprise dans le Bei­jing ribao du 1er juin, et la liste nomi­na­tive des signa­taires publiée le len­de­main dans ce même jour­nal ― à la demande, indi­que­ra-t-on, des lec­teurs ―, sous ce titre, on ne peut plus expli­cite : « Res­pon­sables de 40 entre­prises de la capi­tale deman­dant éner­gi­que­ment l’in­ter­dic­tion par le gou­ver­ne­ment de l’as­so­cia­tion illé­gale “Union auto­nome des ouvriers » (cf. Bei­jing ribao, 2 juin, p. 1).
  • 37
    Dans le même numé­ro du Bei­jing ribao, on trouve une « Lettre de sou­tien adres­sée par le syn­di­cat géné­ral de la muni­ci­pa­li­té de Pékin à tous les ouvriers, employés et cadres syn­di­caux de la capitale ».
  • 38
    « Tous les ouvriers et tous les employés doivent main­te­nir la sta­bi­li­té sociale », le Quo­ti­dien du peuple, 3 juin 1989.
  • 39
    « Compte-ren­du du mas­sacre de Tian’an­men par un témoin occu­laire », Wen­hui bao, Hong Kong, 5 juin 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numéro.
  • 40
    Chen Xitong, « Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), op. cit., pp. XX-XXI
  • 41
    Cf., par exemple, Huang S. et A. Pino, entre­tien avec un des diri­geants de l’U­nion auto­nome des ouvriers de Pékin, le Monde, Paris, 1er sep­tembre 1989, p. 8.
  • 42
    « Je suis Chai Ling… Je suis tou­jours vivante », in « Beiz­huang de minyun » [le pathé­tique mou­ve­ment pour la démo­cra­tie], Ming­bao chu­banshe, Hong Kong, juin 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numéro.
  • 43
    Agence Xin­hua, 15 juin 1989 (SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​12). Chen Xitong accuse, par exemple, l’U­nion auto­nome d’a­voir « cap­tu­ré un poste de radio et un code secret » dans un véhi­cule mili­taire (« Rap­port sur l’é­cra­se­ment de la rébel­lion anti­gou­ver­ne­men­tale » (30 juin 1989), op. cit., pp. XXII).
  • 44
    Radio Pékin, 11 juin 1989. Le texte inté­gral, tra­duit en anglais, a été repro­duit dans : SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​2.
  • 45
    « Let­ter from the All-Chi­na Fede­ra­tion of Trade Unions to wor­kers, staff mem­bers and trade union cadres trou­ghout the coun­try » (10 juin 1989), texte trans­mis le 11 juin par l’A­gence Xin­hua, repro­duit dans SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​3. Voir aus­si le Quo­ti­dien du peuple du 12 juin 1989, p.1
  • 46
    Télé­vi­sion de Pékin, 14 juin 1989 (SWB, FF./0484, 16 juin 1989, B2/​10).
  • 47
    Radio Shan­ghai, 14 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, 13213).
  • 48
    Agence Xin­hua, 15 juin 1989 (SWB, FE/​0485, 17 juin 1989, B2/​4).
  • 49
    Agence Xin­hua, 19 juin 1989 (SWB, FFJ0488, 21 juin 1989, B2/​10).
  • 50
    Sur ce point, voir : A. Pino, « À pro­pos du rôle des ouvriers chi­nois dans les évé­ne­ments d’a­vril-juin 1989 » (entre­tien), Bul­le­tin des cor­rec­teurs, CGT, Paris, n°156, novembre 1989 ; A. Pino, « Des liens de sang », Revue poli­tique et par­le­men­taire, Paris, n°944, novembre-décembre 1989.
  • 51
    Deng Xiao­ping, « les Points impor­tants d’une conver­sa­tion entre le cama­rade Deng Xiao­ping et les cama­rades Yang Shang­kun, Wan Li, Jian Zemin, Li Peng, Qiao Shi, Yao Yilin, Song Ping et Li Rui­huan., Zhon­gyang ribao [quo­ti­dien cen­tral], Tai­pei, 14 juillet 1989. Nous don­nons une tra­duc­tion de ce texte dans ce même numé­ro, sous le titre : « le Par­ti doit être repris en main ».
  • 52
    Le 20 juin, la Cour popu­laire suprême a émis une note concer­nant les pro­cé­dures expé­di­tives pour le juge­ment des « contre-révo­lu­tion­naires » : « Il est néces­saire de prê­ter atten­tion à la publi­ci­té, en sélec­tion­nant affaires prin­ci­pales et exem­plaires et en fai­sant une large publi­ci­té au moyen de la radio et de la télé­vi­sion, des jour­naux ou des autres médias, au bon moment, pour aug­men­ter le béné­fice social de ces affaires, répri­mer et décou­ra­ger les cri­mi­nels, et inci­ter les masses à com­battre les contre-révo­lu­tion­naires et ceux qui se sont ren­dus cou­pables de crimes graves » (Radio Pékin, 20 juin 1989. La tra­duc­tion anglaise du texte inté­gral figure dans SWB, FE/​0489, 22 juin 1989, 1325).
  • 53
    On pour­ra se repor­ter aux dif­fé­rentes livrai­sons, cou­vrant cette période, du bul­le­tin des écoutes de la BBC : Sum­ma­ry of World Broad­casts (Part 3 : Far East), Londres, ain­si qu’au bul­le­tin d’in­for­ma­tion du comi­té des sino­logues pour la démo­cra­tie en Chine (basé à la Ligue des droits de l’homme), Chro­nique de la répres­sion en Chine, Paris.
  • 54
    Cf. Hangz­hou ribao [quo­ti­dien de Hangz­hou], 10 juin 1989 (cité par le Quo­ti­dien du peuple, édi­tion d’outre-mer, 13 juin 1989).
  • 55
    La Sécu­ri­té publique locale publie­ra le 23 une nou­velle cir­cu­laire à ce pro­pos (texte anglais dans : SWB, FE/​0481, 28 juin 1989, B2/​5 – 6 (d’a­près Radio Xi’an [Shaan­xi], 22 juin 1989).
  • 56
    Radio Pékin, 11 juin 1989 (SWB, FE/​0481, 13 juin 1989, B2/​12); radio Shan­ghai, 12 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​10).
  • 57
    Agence Xin­hua, 10 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​8); Radio Pékin, 10 juin 1989 (SWB, FE/​0483, 15 juin 1989, B2/​10).
  • 58
    Radio Nan­chang (Jiangxi), 10 juin 1989 (SWB, FE/​0483, 15 juin 1989, B2/​14).
  • 59
    Radio Hefei (Anhui), 11 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, 13216); Radio Hefei (Anhui), 14 juin 1989 (SWB, FE/​0490, 15 juin 1989, B2/​4). La veille, selon Radio Pékin (13 juin 1989) un des diri­geants de l’As­so­cia­tion spon­ta­née des ouvriers de Hefei se serait livré à la police (SWB, FE/​0491, 24 juin 1989, B2/​7).
  • 60
    La tra­duc­tion anglaise de leur appel figure dans : SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​16.
  • 61
    Radio Chang­sha (Hunan), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​17).
  • 62
    Radio Lanz­hou (Gan­su), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​10).
  • 63
     Zhe­jiang ribao [quo­ti­dien du Zhe­jiang), 23 juin 1989.
  • 64
    Radio Xi’an (Shaan­xi), 12 juin 1989 (SWB, FE/​0482, 14 juin 1989, B2/​15).
  • 65
    Radio Xi’an (Shaan­xi), 25 juin 1989 (SWB, FE/​0494, 28 juin 1989, B2/​6).
  • 66
    Agence Xin­hua, 13 juin 1989 (SWB, FFJ0485, 17 juin 1989, B2/​6).
  • 67
    Radio Guiyang (Guiz­hou), 13 juin 1989 (SWB, FE/​0484, 16 juin 1989, B2/​18).
  • 68
    Radio Hoh­hot (Mon­go­lie inté­rieure), 14 juin 1989 ((SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​20).
  • 69
    Radio Shan­ghai, 14 juin 1989 (SWB, FE/0485,17 juin 1989, B2/​5); Télé­vi­sion de Pékin, 16 juin 1989 (SWB, FE/​0486, 19 juin 1989, B2/​13).
  • 70
    Radio Jinan (Shan­dong), 15 juin 1989 (SWB, FE/​0485, 17 juin 1989, B2/​4 – 5).
  • 71
    Radio Wuhan (Hebei), 17 juin 1989 (SWB, FE/​0487, 20 juin 1989, B2/​11).
  • 72
    Radio Shan­ghai, 21 juin 1989, (SWB, FE/​0494, 28 juin 1989, B2/​7).
  • 73
    Agence Xin­hua, 28 mai 1989 (SWB, FE/​0469, 30 mai 1989, B2/​6).
  • 74
    Cf. Bei­jing infor­ma­tion, Pékin, n°28, 10 juillet 1989, p. 7.
  • 75
    Radio Pékin, 9 juin 1989 (SWB, FE/​0480, 12 juin 1989, B2/​11 – 12).
  • 76
    Agence Xin­hua, 10 juin 1989 (SWB, FF./0480, 12 juin 1989, B2/​12).
  • 77
    Radio Pékin, 23 juin 1989 (SWB, FE/​0497, 1er juillet 1989, B2/​8).
  • 78
    Radio Pékin, 17 juillet 1989 (SWB, FE/​0512, 19 juillet 1989, B2/​5).
  • 79
    « Mobi­li­ser les ouvriers et les employés pour l’ap­pro­fon­dis­se­ment et le déve­lop­pe­ment de la “double aug­men­ta­tion, double éco­no­mie », Quo­ti­dien du peuple, Pékin, 29 juillet 1989. Le slo­gan « Shuang zeng shuang jie » est la contrac­tion de « zeng chan zeng shou ; jie neng jie zhi [aug­men­ter la pro­duc­tion, aug­men­ter le reve­nu ; éco­no­mi­ser l’éner­gie, res­treindre les dépenses].
  • 80
    5 avril 1976
  • 81
    Il s’a­git du 20 avril 1989 et on se réfère ici à l’é­chauf­fou­rée sur­ve­nue devant Xin­hua­men [la porte de la Chine nou­velle], à Zhon­gnan­hai, et qui aurait fait une cen­taine de vic­times par­mi les étudiants.
  • 82
    Il s’a­git du fils de Deng Xiaoping
  • 83
    Mot illi­sible
  • 84
    Voir les docu­ments n° 1 et 2
  • 85
    Tra­di­tion­nel­le­ment — ce qu’on impute géné­ra­le­ment à la seule doc­trine confu­céenne —, le sou­ve­rain gou­verne le peuple par son influence per­son­nelle. Il doit donc témoi­gner d’une haute ver­tu et d’une conduite indi­vi­duelle irréprochable.
  • 86
     Qiu hou suan zhang. L’ex­pres­sion est aujourd’­hui employée dans ce sens : attendre le moment favo­rable pour déclen­cher une contre-offensive.
  • 87
    Ces deux reven­di­ca­tions étaient : 1) la réha­bi­li­ta­tion du mou­ve­ment étu­diant et la dénon­cia­tion de l’é­di­to­rial du Quo­ti­dien du peuple paru le 26 avril ; 2) l’ou­ver­ture rapide d’un dia­logue retrans­mis en direct à la télévision.
  • 88
    En tête de la Consti­tu­tion il est sti­pu­lé que : « La Répu­blique popu­laire de Chine est un État socia­liste de dic­ta­ture du pro­lé­ta­riat, diri­gé par la classe ouvrière et basé sur l’al­liance des ouvriers et des paysans. »
  • 89
    « Ce n’est pas sans rai­son que les classes domi­nantes tremblent devant la menace d’une révo­lu­tion com­mu­niste. Les pro­lé­taires ne risquent d’y perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à y gagner. » (Marx-Engels, le Mani­feste du Par­ti com­mu­niste [1848], trad. M. Rubel et L. Evrard, in M. Rubel, Kart Marx. Œuvres. Éco­no­mie, t. I, Gal­li­mard, Biblio­thèque de la Pléiade, Paris, 1977).
  • 90
    Pékin est entou­ré de deux bou­le­vards périphériques.
  • 91
    Extrait de la Marche des volon­taires, l’hymne natio­nal chi­nois (paroles de Tian Han, musique de Nie Er).
  • 92
    Allu­sion à Deng Xiaoping.
  • 93
     Buxi ershi­wan sheng­ming, huan qu nian nian anding. Le pro­pos aurait été, dit-on, tenu par Deng Xiaoping.
  • 94
     Qiu hou suan zhang : attendre l’oc­ca­sion pour déclen­cher la contre-offensive.
  • 95
     Lap­sus cala­mi du rédac­teur ou coquille de l’é­di­teur : c’est, évi­dem­ment des années 80 dont il s’agit.
  • 96
    Der­nier vers du refrain de la ver­sion chi­noise de l’In­ter­na­tio­nale.
  • 97
    Détour­ne­ment de l’in­ti­tu­lé d’une orga­ni­sa­tion créée par des intel­lec­tuels chi­nois en 1919, deve­nus com­mu­nistes pour la plu­part, à laquelle Mao appar­tint dans sa jeu­nesse. L’As­so­cia­tion de la jeu­nesse de Chine a été dis­soute en 1925.
  • 98
    Il s’a­git du IIIe ple­num du Comi­té cen­tral issu du XIe Congrès du Par­ti com­mu­niste chi­nois (12 – 18 jan­vier), lequel a consa­cré la vic­toire de la ligne défen­due par Deng Xiao­ping sur celle de Hua Guofeng.
  • 99
    Les chats dési­gnent, en l’oc­cu­rence, les bureau­crates. Allu­sion à la maxime favo­rite de Deng Xiao­ping : « Peu importe que le chat soit blanc ou noir, du moment qu’il attrape les souris. »
  • 100
    Lit­té­ra­le­ment : « Court, rasant, rapide ». Il s’a­git d’un terme de vol­ley-ball. Les bons du tré­sor sont pré­le­vés obli­ga­toi­re­ment sur les salaires et sans qu’on aver­tisse préa­la­ble­ment de la retenue.
  • 101
    C’est-à-dire les étrangers.
  • 102
    C’est-à-dire les Chi­nois, Yan et Huang étant les noms des deux pre­miers sou­ve­rains mythiques de la Chine.
  • 103
    Entendre les éta­blis­se­ments de luxe réser­vés aux étrangers.
  • 104
    Le bon exemple de l’étranger.
  • 105
    Les « bou­teilles d’huile » [you­ping’er]: dans la Chine ancienne, lors­qu’une veuve se rema­riait et qu’elle avait eu un enfant de son pré­cé­dent mari, sa nou­velle famille consi­dé­rait l’en­fant comme illé­gi­time. Par­lant de lui, on disait la « bou­teille d’huile ». La « bou­teille de vinaigre » [cuping’er] est une expres­sion for­gée pour l’oc­ca­sion : on a rem­pla­cé le mot « bou­teille » [ping] par un autre carac­tère « ping », celui qu’on trouve dans le pré­nom de Deng Xiao­ping (l’ho­mo­pho­nie a été source de nom­breuses plai­san­te­ries tout au long du mou­ve­ment). Il faut entendre, ici, que si, en appa­rence, la léga­li­té est toute-puis­sante, les entorses sont légion.
  • 106
    À l’at­ten­tion des afi­cio­na­dos, indi­quons que cette phrase com­porte de nom­breuses locu­tions propres à l’ar­got pékinois.
  • 107
    Le chat est une allu­sion à Deng (« Peu importe que le chat…»). Quant au diable Li, c’est, bien sûr de Li Peng dont il est question.
  • 108
    Assem­blée popu­laire nationale.
  • 109
    Comi­té per­ma­nent de l’As­sem­blée popu­laire nationale.
  • 110
    Pre­mier vers du refrain de l’In­ter­na­tio­nale.
  • 111
    Cf. le docu­ment n° 8. La ver­sion que nous connais­sons indique la date du 21 mai comme date d’é­la­bo­ra­tion. Le pré­am­bule des pré­sents « Sta­tuts pro­vi­soires », si on en juge par les ver­sions que nous pos­sé­dons, et notam­ment celle que nous avons uti­li­sée pour la tra­duc­tion, pré­sente quelques très légères variantes par rap­port au « Pro­gramme pré­pa­ra­toire » où l’on remarque, en outre, l’ab­sence du point 6.
  • 112
    Cixi (1835/​1908). Elle détint le pou­voir effec­tif de 1861 à 1908. On com­prend que c’est de Deng Xiao­ping dont il est ici question.
  • 113
     Chui­lian, lit­té­ra­le­ment : sus­pendre le rideau. Il s’a­git du rideau der­rière lequel l’Im­pé­ra­trice régente assis­tait au Conseil. La méta­phore concer­nant Cixi conti­nue ici d’être filée.
  • 114
    For­mule chère à Deng Xiaoping.
  • 115
    Autre for­mule affec­tion­née par Deng Xiaoping.
  • 116
    Mao, « Tout ce qui est réac­tion­naire est pareil : tant qu’on ne le frappe pas, impos­sible de le faire tom­ber. C’est comme lors­qu’on balaie : là où le balai ne passe pas, la pous­sière ne s’en va pas d’elle-même », (« la Situa­tion et notre poli­tique après la vic­toire dans la Guerre de Résis­tance contre le Japon » [13 août 1945], repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].
  • 117
    Mao : « Quand il y a lutte il y a sacri­fice…» (« Ser­vir le peuple » [8 sep­tembre 1944], repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].
  • 118
    Mao : « Chaque com­mu­niste doit s’as­si­mi­ler cette véri­té que “le pou­voir est au bout du fusil”.», (« Pro­blème de la guerre et de la stra­té­gie. [6 novembre 1938]), repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].
  • 119
    Détour­ne­ment d’une parole de Mao : « 1’ennemi ne péri­ra pas de lui-même. Ni les réac­tion­naires chi­nois, ni les forces agres­sives de l’im­pé­ria­lisme amé­ri­cain en Chine ne se reti­re­ront d’eux-mêmes de la scène de l’His­toire. » (« Mener la révo­lu­tion jus­qu’au bout » [30 décembre 1948]), repris dans les Cita­tions du pré­sident Mao [petit livre rouge].
  • 120
    Hymne natio­nal.
  • 121
     L’In­ter­na­tio­nale.
  • 122
     Qiu hou suan zhang, lit­té­ra­le­ment : règle­ment de compte après la mois­son d’automne.
  • 123
    Il s’a­git de l’É­cole poli­tique et mili­taire anti japo­naise du peuple chi­nois, qui était basée à Yan’an durant la « Guerre de résis­tance contre le Japon ».
  • 124
     Kou mao­zi. Lit­té­ra­le­ment, « mettre un cha­peau à l’en­vers ». L’ex­pres­sion signi­fie qu’on a abu­si­ve­ment col­lé sur quel­qu’un un label poli­tique qu’il ne méri­tait pas.
  • 125
    Li xx était un étu­diant en troi­sième cycle de droit, aujourd’­hui réfu­gié à l’étranger.
  • 126
    En fait, ce n’est pas de Xiang Dong­ping mais de Bai Dong­ping dont il est ici ques­tion. Mais peut-être ne s’a­git-il que d’un lap­sus cala­mi du rédac­teur ou d’une coquille de l’éditeur.
  • 127
    Texte du 28 mai 1989 [docu­ment n° 16].
  • 128
    Abré­via­tion de Gaoxiao ziz­hi lianhe hui.
  • 129
    Abré­via­tion de Gon­gren ziz­hi lianhe hui.

Dans le même numéro :


Thèmes


Si vous avez des corrections à apporter, n’hésitez pas à les signaler (problème d’orthographe, de mise en page, de liens défectueux…

Veuillez activer JavaScript dans votre navigateur pour remplir ce formulaire.
Nom

La Presse Anarchiste