Je connais assez bien les Évangiles. Il m’est arrivé ces temps-ci de méditer sur les paraboles qui les émaillent, par exemple sur celle qui veut qu’à l’égal de ceux qui travaillent depuis l’aube soient traités les « ouvriers de la onzième heure ». Certaines des affirmations de celui que la chrétienté considèrent comme le sauveur du monde me sont familière, telles : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent ». « Si quelqu’un te frappe sur une joue, présente-lui aussi l’autre »… « Remets ton épée à sa place, car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée ». Et je n’ai garde d’oublier la réponse de Jésus à Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde ». Aussi bien, quand on m’apprend que les religieuses cloîtrées ont déposé leur bulletin de vote dans l’urne, j’avoue rester tout pantois. Que peuvent comprendre ces saintes filles à la politique ou à la vie sociale ? N’ont-elles pas, en dignes épouses de celui dont « le royaume n’est pas de ce monde », prononcé des voeux, renoncé à la famille, au mariage, au destin de la cité ? Ne sont-elles pas astreintes à mener une existence « à côté » ? L’écho des rumeurs des partis ne s’arrête-t-il pas au seuil de leurs couvent ? Il me paraît donc, à moi, simple profane, qu’elle trahissent, en s’occupant d’élections, la pensée suprême de leur divin mari. Mais sans doute suis-je décidément trop profane pour comprendre jusqu’où peuvent aller les accommodements de l’Église avec « le siècle ».
Candide