Le cinéma : art nouveau, facteur social.
Cette simple phrase contient tout notre programme. En cette première chronique, développons-le quelque peu.
Le cinéma : art nouveau. Il faut entendre par là, le cinéma pur. Soit : le cinéma tirant de lui-même et de lui seul toutes les possibilités émotives. Nous aurons donc à pourfendre la littérature cinématesque et le cinéma littéraire ; et aussi, le son, la parole, les couleurs et le relief, en tant qu’employés dans la vision cinégraphique. Nous prônerons le cinéma pur, art nouveau.
Cela seul constitue déjà programme suffisant. Faire comprendre et aimer le cinéma : oui, beau programme et qui pourrait suffire.
Mais il y a plus.
Il y a peut-être, plus important.
Si vous êtes partisan du « tout ou rien », inutile, certes, de s’intéresser au cinéma facteur social ; il n’y a qu’à œuvrer pour le bouleversement du régime social que nous subissons, pour l’instauration d’un monde anarchiste. C’est un point de vue qui peut se soutenir.
Ce n’est pas le nôtre.
Sans engager en rien l’avenir sur lequel nous n’avons prise, personnellement, que d’un façon bien médiocre, nous constatons qu’il existe, présentement, un certain nombre de facteurs sociaux qui, par destination, devraient faciliter la bonne harmonie interhumaine et qui, accaparés par des esprits malfaisants, sont source d’abrutissement. Le cinéma est de ceux-là.
Il pourrait ne pas en être.
Le cinéma pourrait être indépendant.
Nous essaierons ici, dans la mesure de nos forces, à travailler à cette libération. Nous aurons à parler des scénarios, des « combines », des vedettes, des salles de projections et des salles spécialisées. Et de la censure. Et aussi de cette autre stupidité : le contingentement. Et même d’une certaine initiative que nous pourrions réaliser à Paris et qui serait prodigieusement intéressante.
Cette rubrique ne sera donc pas une rubrique d’actualités. Critique amateur, nous n’assisterons pas aux présentations des films nouveaux. Comme neuf fois sur dix, ces films sont des « navets », nous n’y perdrons rien, et nos lecteurs pas davantage. Critique amateur, nous payons notre place dans les salles où nous allons. Quand nous n’aurons aucun bon film à louer ou aucune idiotie filmée à critiquer utilement, nous parlerons du cinéma en général,(et, par ce qui précède, vous pouvez augurer qu’il y a fort à dire ; et fort à faire).
Mais nous ne traiterons pas du cinéma en technicien. Pas plus que critique professionnel, nous ne sommes cinéaste « qualifié ». Mais nous sommes assez au courant de la production cinégraphique pour ne pas être gêné par notre position de cinémane profane.
Ainsi s’achève notre déclaration de principe.
Si elle vous plaît, amis lecteurs, au mois prochain !
Léo Claude