« La Marche de la France au socialisme » est une plaquette présentée par l’institut Maurice-Thorez (Éditions sociales, Paris, 1966, 3 F). Il y est traité des « possibilités d’un passage pacifique » de la France au régime socialiste. Possibilités qui se fondent, « d’une part, sur le développement des forces démocratiques à l’échelle internationale et l’affaiblissement de la bourgeoisie mondiale, et, d’autre part, sur les particularités historiques de la situation nationale et les espoirs de la lutte des masses en France ».
On y cite Lénine qui, constatant que les possibilités d’un développement pacifique de la révolution étaient épuisées, préparait le parti bolchevik à l’insurrection armée pour répondre à la violence du pouvoir bourgeois. « Mais même dans cette période nouvelle, Lénine continuait à guetter les possibilités d’un emploi des formes pacifiques. » Et l’actuel parti communiste français peut ainsi justifier sa nouvelle tactique, et s’exprimer de bien curieuse manière : « La possibilité allait s’offrir de constituer tout à fait pacifiquement un gouvernement responsable devant les soviets qui assurerait la progression non violente de la révolution russe…”
Progression non violente de la révolution !
Mais ne nous y trompons pas, le parti communiste français n’a pas encore choisi la non-violence, mais refuse seulement, étant donné les conditions actuelles de la France, la méthode révolutionnaire classique de l’insurrection armée. Par-là, il ne craint pas de se mettre en contradiction avec « l’orthodoxie marxiste », avec Engels (voir en particulier « le Rôle de la violence dans l’histoire »), avec Maurice Thorez citant Guesde : « L’histoire fait à chaque classe qui s’élève au rôle dirigeant dans la société l’obligation de recourir un jour aux armes pour balayer le vieil ordre social condamné à disparaître. » On pourrait croire que nous sommes en plein dans le problème du choix entre deux méthodes : la violente et la non-violente. Erreur ! nous en sommes au parlementarisme, à la légalité, à la réalité de l’étape qu’il faut franchir dès à présent : l’instauration, de la démocratie réelle…
Nous pensons que certains de nos amis non violents non anarchistes seront intéressés par cette brochure politique, ils y retrouveront quelques-unes de leurs conceptions ; quant aux autres, ceux pour qui la non-violence implique une voie libertaire, cette brochure devrait leur permettre de se défendre contre certains abus de langage, de prendre conscience clairement de leurs objectifs propres et ainsi de se situer concrètement dans notre société pour la marquer, efficacement.
A. Bernard