La Presse Anarchiste

Présentation

Dans le numéro 6 de notre revue, trai­tant plus pré­cisé­ment de la vio­lence et de la non-vio­lence chez les anar­chistes au tra­vers de leurs écrits et de leurs actes, il nous a paru, à tort ou à rai­son, qu’une sorte de pro­gres­sion chronologique se fai­sait vers une prise de con­science du phénomène de non-vio­lence, et que, comme à par­tir de 1890 les anar­chistes entrèrent dans les syn­di­cats, actuelle­ment, une ten­dance s’esquisse vers l’utilisation de la non-vio­lence comme moyen. Nous ne nions en aucune façon la per­sis­tance de mou­ve­ments anar­chistes vio­lents et ne pré­ten­dons pas qu’ils sont périmés. Si main­tenant nous nous tournons vers une réal­ité pré­cise, l’Afrique du Sud, et si nous analysons rapi­de­ment son évo­lu­tion depuis un peu moins d’un siè­cle, nous sommes amenés à déclar­er avec tout le monde : « L’Afrique du Sud est l’exemple pré­cis de l’échec fla­grant des tech­niques non violentes. »

Si nous par­tons de la pre­mière expéri­ence non vio­lente de Gand­hi, pro­longée par l’African Nation­al Con­gress avec un car­ac­tère dif­férent, plus mod­éré, qui se ter­mine avec l’emploi du sab­o­tage restreint puis la pré­pa­ra­tion à la guéril­la, nous dirons que la réal­ité de ce proces­sus his­torique con­tred­it notre con­clu­sion quant au mou­ve­ment anar­chiste. Dans quelle mesure cepen­dant pou­vons-nous trac­er ce par­al­lélisme ? Qu’en est-il exacte­ment ? Il n’est sans doute pas pos­si­ble de répon­dre totale­ment. Cepen­dant nous ten­tons aujourd’hui une approche en ouvrant ce dossier et nous esquis­sons quelques réflex­ions vers ce qui serait notre solution.

Quelques textes d’Albert Luthuli et de Nel­son Man­dela, une dou­bleé­tude sur le boy­cottage et le sab­o­tage, une analyse un peu plus pré­cise d’une expéri­ence de boy­cottage, d’autre part un doc­u­ment sur l’échec de la non-vio­lence en Afrique du Sud sont les élé­ments qui com­posent ce numéro. Nous voudri­ons que ce tra­vail prélim­i­naire devi­enne le début d’une réflex­ion plus éten­due et plus pro­fonde avec la col­lab­o­ra­tion de nos lecteurs. L’expérience sud-africaine doit servir de leçon pour toute action future en France ou ailleurs. Toute con­clu­sion, si peu for­mulée soit-elle, implique un engage­ment dans un sens ou un autre. On pour­ra nous dire qu’un prob­lème plus impor­tant devrait nous occu­per, le Viet­nam, mais nous ver­rons que toute con­clu­sion sur le boy­cottage à pro­pos de l’Afrique du Sud ouvre des pos­si­bil­ités d’application au prob­lème vietnamien.

Quelques dates

La non-vio­lence de Gandhi :

  • 1893. Gand­hi a 24 ans, il part pour l’Afrique du Sud.
  • 1896. Fon­da­tion de la com­mu­nauté de Phœnix d’où il se pré­pare à l’action future.
  • 1898. Nais­sance de Luthuli, 30 ans de dif­férence d’âge avec Gandhi.
  • 1906–1913. Pre­mier satya­gra­ha indi­en dirigé par Gand­hi pour lut­ter con­tre la restric­tion des droits et des lib­ertés des colons indi­ens (plusieurs mil­liers de combattants).

La non-vio­lence mod­érée dans la légalité :

  • 1912 Créa­tion du Con­grès nation­al indigène de l’Afrique du Sud qui décide d’utiliser les voies légales en faveur du peu­ple africain opprimé, il réclame la dis­pari­tion de la bar­rière de couleur au par­lement, à l’école, dans l’industrie et dans l’administration. En 1925, le CNIAS prend le nom d’ANC : African Nation­al Con­gress. Pen­dant trente-sept ans, l’ANC s’en tient stricte­ment à une lutte dans le respect de la Constitution.
  • 1918. Nais­sance de Nel­son Man­dela, 20 ans de dif­férence d’âge avec Luthuli.

La non-vio­lence par l’action directe :

  • 1949. Les mem­bres de l’ANC se ren­con­trent pour éla­bor­er un pro­gramme d’action qui représente un change­ment fon­da­men­tal des méth­odes de l’ANC. Tout en restant paci­fiques, ils choi­sis­sent l’illégalité.
  • 1952. La Cam­pagne de défi.
  • 1960. Fusil­lade de Sharpeville : l’ANC, hors la loi, entre dans la clandestinité.

Le sab­o­tage :

  • 1962. Procès de Mandela.