La Presse Anarchiste

L’estampage

Nous extrayons de « l’A­vant-Garde Cos­mopo­lite » l’en­tre­filet suivant :

Pour arriv­er à la démo­li­tion de la vieille Société qui croule, tous les moyens sont bons aux anar­chistes. L’e­stam­page, élevé à la hau­teur d’une insti­tu­tion publique a déjà pro­duit ses effets.

Par­mi les dif­férentes organ­i­sa­tions libres, for­mées à ce sujet par les com­pagnons, la tribu des Pieds-Plats peut compter comme une des plus effectives.

L’empilage du légendaire Gamey vient d’avoir son pendant.

Tra­vail­lant dans le quarti­er de la Porte Denis, la tribu avait établi sa table com­mune chez un marc­hand de vins du quartier.

Bona­partiste enragé, se tar­guant d’une haute intel­li­gence, prou­vée par la mon­naie dont il peut dis­pos­er, trai­tant de haut les employés à son ser­vice en leur déni­ant toute intel­li­gence, ce mon­sieur réu­nis­sait en sa mesquine per­son­ne toute la bêtise crasse par­ti­c­ulière à sa classe.

En présence de la facil­ité avec laque­lle ils pou­vaient arriv­er à démon­tr­er à ce piètre indi­vidu que : 

« L’or n’est qu’une chimère »

l’empilage fut décidé.

Tant bien que mal la tribu vécut mod­este­ment pen­dant trois semaines aux croûtes du nou­veau Gamey. — L’e­sprit de fra­ter­nité les avait bien oblig­es à la récep­tion de quelques com­pagnons dans le besoin ; chaque repas voy­ait grossir le nom­bre des affamés : l’empilé ray­on­nait, voy­ant, en rêve, rebondir les tiroirs de sa caisse.

Mal­heureuse­ment tout a une fin en ce monde ; les vict­uailles dis­parais­sant et l’ar­gent n’ap­pa­rais­sant pas, le mas­tro­quet se déci­da à faire quelques représentations.

Sen­tant le ter­rain crouler la tribu leva le camp, empor­tant sans tim­bre de quit­tance la note qui s’él­e­vait à la mod­este somme de 850 fr.— Cette somme ne sera pas per­due pour tout le monde. Une bonne part en sera affec­tée à la pro­pa­gande et à entretenir les liens de sol­i­dar­ité néces­saires entre les compagnons.


Publié

dans

par

Étiquettes :