Pologne
Un des aspects de notre activité est l’édition et la diffusion de textes présentant les idées libertaires vers l’Est. Si nous considérons que cette tâche est importante, il faut reconnaître qu’elle reste encore à l’état embryonnaire aujourd’hui pour plusieurs raisons (faible implantation des idées libertaires là-bas, grandes difficultés de diffusion, manque de personnes et de moyens…). Aussi nous avons très peu souvent des répercussions sur ces brochures, comme celle qui suit.
« Des groupes spécifiques anarchistes ou libertaires, Babar n’en a jamais eu connaissance : et il souligne plusieurs fois qu’il croit que c’est une erreur énorme, symptomatique d’une mentalité groupusculaire, de se consacrer exclusivement à la recherche d’un groupuscule, même inconsistant, d’anarchistes “purs” en Pologne, sans concentrer au contraire notre attention sur les aspects profondément libertaires, même inconscients, montrés par des secteurs et des méthodes de lutte adoptées par le mouvement d’opposition polonais. “(En dialoguant avec des polonais), si on leur parlait d’anarchie, ils répondaient que pour eux c’était un idéal trop abstrait, trop éloigné de la réalité polonaise de tous les jours, même s’il est beau et intéressant. Ce sont les mêmes réponses que j’avais généralement recueillies lors de mon deuxième voyage en Pologne, alors que j’avais amené clandestinement et distribué à de nombreuses personnes la brochure en polonais éditée par les camarades du groupe parisien d’Iztok (qui à mon avis font un travail extrêmement intéressant), brochure qui contient des écrits anarchistes sur l’état, etc. “Intéressant mais trop abstrait” m’avait-on dit à chaque fois”.» (Interview de Roger Noel, dit Babar, parue dans A. Rivista Anarchica n°110, mai 1983)
Cette abstraction de nos textes en polonais nous avait déjà été signalée par d’autres polonais. Dans la mesure où ils ont été écrits en France par des gens voyant la situation en Pologne de l’extérieur, il ne pouvait en être autrement. On touche là à un point très délicat : comment développer une certaine propagande dans ces pays sans apparaître comme des donneurs de leçon étrangers à la réalité de la vie quotidienne à l’Est ?
URSS
Le 4 mai 1983 a eu lieu à Leningrad le procès d’Alexandre Skobov, apparemment accusé selon l’article 70 du code criminel russe. Le juge président était N. S. Volzhanina. Le défenseur n’était pas présent au procès : Skobov avait été déclaré irresponsable après un examen médical et qualifié de « psychopathe paranoïaque ».
Parmi les témoins au procès il y avait V. Repin et L. Volokhonsky. V. Repin a affirmé que les activités de Skobov avaient « un caractère antisoviétique ». Pour illustrer ce fait, Repin a cité deux lettres « antisoviétiques » écrites par Skobov ― l’une adressée à G. Davydov, l’autre au docteur A. Tobak de l’Hôpital Psychiatrique n°3 de Leningrad. L. Volokhonsky a affirmé que les documents et les enregistrements confisqués à Skobov lors d’une perquisition au village de Bylova Gora appartenaient en fait à lui, Volokhonsky. Il dit aussi qu’il ne partageait pas les convictions de Skobov puisque ce dernier est marxiste. Interrogé s’il considérait que Skobov était malade mental, Volokhonsky déclara qu’il ne le pensait pas, bien qu’il ait observé certaines particularités chez lui, à savoir ses croyances marxistes.
L’avocat commis d’office par la cour pour défendre Skobov exprima son accord avec l’évaluation des activités de Skobov faite par le procureur, mais il demanda à la cour de prendre en compte le fait qu’un homme mentalement malade était tombé sous l’influence d’«antisoviétiques » comme R. Yevdokimov et L. Volokhonsky.
Dans les attendus de la cour, il a été observé que les textes écrits par Skobov contenaient des « appels au renversement du pouvoir soviétique ». La cour a ordonné le placement de Skobov en traitement obligatoire dans un hôpital psychiatrique ordinaire. (URSS News Brief n°9, mai 83).
D’après des informations récentes (juillet dernier), Skobov est interné à Leningrad même et traité quotidiennement à l’Aminazine qui est un neuroleptique très puissant. (Sur Skobov, cf aussi Iztok n°3, n°6 et ce numéro p.35 )