Il est évident que la bombe atomique, la désintégration de l’atome, etc., ont fourni aux périodiques et à la Radio de la copie et du texte inespérés, et aussi l’occasion, tantôt de faire montre d’une allégresse hors de saison, tantôt d’émettre des considérations plus on moins utopiques, enfin, de se livrer à des lamentations intempestives. C’est surtout sur l’hypocrisie de celles-ci que j’entends m’arrêter, sur ce jésuitisme partagé par la grande masse de leurs lecteurs ou de leurs auditeurs On sait trop que ce conglomérat s’insoucie des douleurs individuelles et que ceux qui le constituent passent sur les rues ou déambulent sur les routes, indifférents aux tourments de ceux qu’ils croisent. Ils s’amusent, ils s’ébattent de mille façons et peu leur importe la souffrance morale — je choisis cet exemple entre cent — des malheureux de retour de captivité ou des camps de concentration qui, mis en présence de leur foyer déserté, se trouvent dans la nécessité de reconstruire leur vie. La société croit avoir tout réparé parce qu’elle leur a jeté l’os à ronger de quelques billets de mille francs-Pléven ! Hélas ! Pour en revenir aux beaux jours que nous promet l’utilisation de la désintégration atomique, les prophètes Tant-mieux oublient vite que sans progrès moral, le progrès scientifique est en fiasco. S’il y a casse — et sérieuse, cette fois — ce sont, comme toujours, les menés qui la paieront. Au moins, pourrons-nous dire, quoi qu’il arrive, que nous n’avons été ni des complices, ni des associés.
Lucy Sterne