La Presse Anarchiste

La décadence bourgeoise (3)

Jacques Roux, très popu­laire dans les fau­bourgs, héber­tiste éner­gique et zélé pro­pa­ga­teur d’une socié­té com­mu­niste, est accu­sé de vol, indi­gné de la lâche­té de ses calom­nia­teurs, il se tue dans sa pri­son. C’é­tait la pré­face du drame.

Après lui, Robes­pierre fait guillo­ti­ner en bloc les prin­ci­paux héber­tistes : Rous­sin, Hébert, Vincent, Clootz, etc., etc. en tout 17. Trois mois après ce fut le tour des dan­to­nistes : Dan­ton, Des­mou­lin, Phi­lip­peaux Wes­ter­mann, de Sechelles, etc., etc. Puis Chau­mette, Gobel, Beys­ser. Bref, tout ceux qui contre­car­raient les menées dic­ta­to­riales de Maxi­mi­lien furent sup­pri­més ou pros­crits. Telle est la consé­quence funeste mais fatale du prin­cipe d’autorité.

« Robes­pierre après la mort de Dan­ton est au plus haut de sa puis­sance. Le voi­la pour ain­si dire, au som­met d’une mon­tagne dont chaque étage est for­mé des cadavres d’une des grandes géné­ra­tion poli­tique de la Révo­lu­tion : les Consti­tuants au bas ; sur les Consti­tuants, les Giron­dins ; sur les Giron­dins, les Dan­to­nistes. Robes­pierre à frap­pé à la fois les vrais et les faux révo­lu­tion­naires, les repré­sen­tants légi­times de la Révo­lu­tion et les fac­tieux qui la désho­norent. Il a abat­tu tous les par­tis, tous les groupes. »1Hen­ri Mar­tin. — Hist. de France

Au point de vue social et poli­tique quel est le résul­tat de ce régime Jaco­bin : « La cor­rup­tion s’est intro­duite dans les comi­tés révo­lu­tion­naires ; la cor­rup­tion est par­mi ceux qui doivent sur­veiller et punir les cor­rom­pus. Les Jaco­bins ont enva­his par­tout les fonc­tions publiques : de sur­veillants ils sont deve­nus admi­nis­tra­teurs ; c’é­tait inévi­table et fatal beau­coup s’y dépravent. On revoit les tyrans de vil­lage : le meneur de comi­té a rem­pla­cé le sei­gneur. »2Id.

Enfin, le 9 ther­mi­dor met fin au des­po­tisme de Robes­pierre et à la Révo­lu­tion. De ce jour la Bour­geoi­sie ten­dra de plus en plus à s’af­fir­mer en classe dis­tincte du pro­lé­ta­riat. Voi­ci ce que pen­sait de cette mémo­rable jour­née, P.-J. Prou­dhon, le publi­ciste qui, de nos jours, a le mieux com­pris ce qu’est la Liber­té et son incom­pa­ti­bi­li­té avec tous gou­ver­ne­ment quel qu’il soit :

« Admi­rez la puis­sance des prin­cipes. À peine réunis pour ven­ger la Révo­lu­tion des par­jures de la royau­té, ces hommes furent sai­sis d’une véri­table fureur de gou­ver­ne­ment. Des mesures de saluts publics, affran­chies des for­mules légales, étaient deve­nues néces­saires ; bien­tôt le bon plai­sir des dic­ta­teurs fut toute leur rai­son ; ils ne sur­ent que pros­crire et guillo­ti­ner. Ils étaient le pou­voir, ils agis­saient comme des rois. L’ab­so­lu­tisme reve­nait dans leurs décrets et dans leurs œuvres. C’é­taient des phi­lo­sophes pourtant !

Il fal­lut réagir contre cette fré­né­sie des­po­tique : le 9 ther­mi­dor fut un aver­tis­se­ment don­né par le pays a l’au­to­ri­té conven­tion­nelle. Tant que peuple avait craint pour les conquêtes de la Révo­lu­tion, pour l’in­dé­pen­dance du ter­ri­toire et l’u­ni­té de la Répu­blique, il avait tolé­ré la dic­ta­ture des comi­tés. Le jour où la ter­reur devint un sys­tème, où ce pro­vi­soire de sang parut vou­loir deve­nir défi­ni­tif, où l’u­to­pie péné­tra dans les conseils, où Robes­pierre, l’homme des ven­geances plé­béiennes, ne fut plus qu’un chef de secte, ce jour là une crise devint inévi­table. La logique du ver­tueux réfor­ma­teur le pous­sait a sup­pri­mer les hommes en même temps que les abus c’est le pou­voir qui a per­du le Jaco­bins. »3P.-J. Prou­dhon. — Confes­sions d’un révolutionnaire.

(À suivre)

G.D.

  • 1
    Hen­ri Mar­tin. — Hist. de France
  • 2
    Id.
  • 3
    P.-J. Prou­dhon. — Confes­sions d’un révolutionnaire.

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