La Presse Anarchiste

Le jubilé de Victoria

Sa majesté la reine d’An­gleterre, d’É­cosse et d’Ir­lande, impéra­trice des Indes à reçu, il y à quelques jours, majestueuse­ment assise sur son trône, les hom­mages et les vœux de ses biens aimés sujets et vas­saux, à l’oc­ca­sion de sa cinquan­tième année de règne.

Hon­ni soit qui mal y pense !

Les Pas­teurs :

Gra­cieuse majesté ! Depuis un demi-siè­cle que tu gou­vernes, tu as don­né à la vertueuse Angleterre l’ex­em­ple de toutes les ver­tus ; trop laide pour tromper le prince-con­sort tu ne lui fis pas d’in­fidél­ité et tu te con­so­las de sa perte avec du wisky, liqueur essen­tielle­ment anglaise ! God save the queen !

Les Paysans :

Vive la reine ! Depuis qu’elle est sur le trône du Roy­aume-Uni, l’a­gri­cul­ture est floris­sante, les céréales poussent toutes seules, les impôts sont légers, et comme les dettes que fait le prince de Galles sont moins lour­des que ne seront celles que fera le roi d’An­gleterre, God save the queen !

Les indus­triels et les marchands :

Que votre majesté daigne recevoir nos respectueux hom­mages ; grâce à votre intel­li­gente et auguste pro­tec­tion, nous sommes tran­quilles, nous pou­vons inon­der tous les marchés du monde de mau­vais­es marchan­dis­es sous de fauss­es mar­ques de fab­rique, sous la pro­tec­tion du pavil­lon de la Grande-Bre­tagne, nos ouvri­ers doivent se soumet­tre sans mur­mur­er à toutes nos fan­taisies, grâce aux baïon­nettes de vos sol­dats et nous réal­isons ain­si ces prodigieux béné­fices qui nous per­me­t­tent d’a­cheter des gamines de dix ans pour en faire des grues. God save the queen !

Les sol­dats et les marins :

Vive la reine ! Vive la gloire, les habits rouges, le thé et le gin ! Vivent les Zoulous et les Indi­ens que nous bat­tons ! Vive l’É­gypte que nous avons achetée ! Vive le Mah­di qui nous bat ! Vivent les Boërs qui nous nar­guent ! Vivent nos généraux tout cou­verts d’or et vive le fou­et à neuf queues avec lequel on nous schlague ! God save the queen !

Les ouvri­ers : (grave­ment) God save the queen ! (à part) Gare à toi vieille taupe ! et gare à ton fils !

Le prince de Galles : Ma mère ! votre majesté doit être bien fière de l’amour et du respect de ses sujets. Hur­rah ! Hur­rah ! Hurr…

Un Indi­en : Reine, ces com­pli­ments aus­si hyp­ocrites qu’in­téressés, n’empêchent pas l’ex­ploita­tion éhon­tée de tes marchands de faire crev­er de faim tes sujets indi­ens dans le pays le plus riche et le plus fer­tile du monde, alors même qu’une poignée de riz par jour leur suf­fi­rait pour vivre. Rap­pelle-toi la révolte des cipayes ; tu nous à fait attach­er par cen­taine à la gueule de tes canons, tu nous a fait assas­sin­er par mil­liers ! Bien­tôt nous vengerons tous ces martyrs.

Gare au réveil ! Les Russ­es approchent tou­jours et Boud­dha veille, nou­velle impéra­trice des Indes !

L’Ir­lande : que Dieu sauve la reine, s’il le peut ! mais la reine n’est rien. L’op­presseur d’Erin, c’est l’Anglais ! Mort à l’Anglais ! Mal­gré les endormeurs du par­lement, je con­tin­ue à boy­cotter tes land­lords et tes policemans.

La Feni­an­isme, comme le phœnix, renaît sans cesse ; c’est à Lon­dres qu’il te frap­pera bien­tôt, au milieu de ton orgueil et de ta richesse, Angleterre maudite !

Patrick


Dans le même numéro :


Thèmes


Si vous avez des corrections à apporter, n’hésitez pas à les signaler (problème d’orthographe, de mise en page, de liens défectueux…

Veuillez activer JavaScript dans votre navigateur pour remplir ce formulaire.
Nom