La Presse Anarchiste

La décadence bourgeoise Période progressive (1792–1830)

Il en a été de même pour les con­ven­tion­nels. Au début, ils sup­pri­ment la roy­auté, mais, mal­gré cela, se croient, eux, indis­pens­ables au bon­heur de la France ; alors chaque intel­li­gence, sec­ondée par des intel­li­gences moins bril­lantes ou moins auda­cieuses, forme un par­ti, cherche à détru­ire toutes celles qui ne se rangent pas sous son scep­tre et à con­quérir la dictature.

De là une oli­garchie créée pour le bon fonc­tion­nement de la meilleure expres­sion des parlements.

Puis, peu à peu, la cor­rup­tion gagne les légiférants : ils sont despotes par intérêt ou ambi­tion, — c’est l’ex­pres­sion ordi­naire des assem­blées législatives.

La Con­ven­tion a passé par ces deux phas­es, qui, dans leurs effets, sont presque sem­blables. Nous en avons subi et en subis­sons encore les con­séquences ; pourquoi cela ne détourne-t-il pas la masse du gou­verne­men­tal­isme dont elle est si entichée ? Pourquoi?…

III

Le nou­veau régime se com­po­sait de cinq directeurs, d’un con­seil des Cinq-cents et d’un con­seil des Anciens. À cette époque, Babœuf fai­sait une active pro­pa­gande com­mu­niste avec son jour­nal Le Tri­bun du Peu­ple. C’é­tait un autori­taire absolu rêvant une égal­ité uni­forme, sans se douter que son com­mu­nisme sup­pri­mait toute indi­vid­u­al­ité et ini­tia­tive. Quoique son erreur soit partagée encore aujour­d’hui — sous une autre forme — par les social­istes autori­taires, nous le salu­ons ici comme l’un des précurseurs du social­isme sci­en­tifique et libertaire.

Le 7 ven­tôse, plusieurs clubs furent fer­més, entr’autres le club du Pan­théon, ren­dez-vous des babouvistes.

En réponse aux per­sé­cu­tions, le man­i­feste des Égaux est lancé ; ils dis­ent : « La Révo­lu­tion française est l’a­vant-cour­rière d’une autre révo­lu­tion qui sera la dernière. — Péris­sent, s’il le faut, tous les arts, pourvu qu’il nous reste l’é­gal­ité réelle. — Point de partage : c’est une calom­nie ! Calom­nie ! — La terre n’est à per­son­ne ; les fruits sont à tout le monde. — Tous les hommes ont les mêmes besoins et les mêmes fac­ultés »1Certes, ce man­i­feste ren­ferme d’ex­cel­lentes choses : il restera dans l’his­toire comme la protes­ta­tion des hon­nêtes gens con­tre les empiète­ments d’une bour­geoisie rapace ; seule­ment, la loy­auté, la juste indig­na­tion n’empêchent pas d’apercevoir le doc­tri­nar­isme autori­taire. En effet, la destruc­tion des œuvres d’art retarderait le Pro­grès, et la solu­tion du prob­lème social n’est pas der­rière mais devant nous : ce serait donc la reculer d’au­tant ; d’un autre côté, il n’est pas vrai que les hommes aient les mêmes besoins et les mêmes fac­ultés : voilà pourquoi le com­mu­nisme est impos­si­ble. Nous le répé­tons, sauf ces deux erreurs, le man­i­feste des Égaux était juste..

Le 6 prair­i­al an IV, Babœuf, Darthé et sept autres furent con­damnés à mort. C’é­tait logique, le priv­ilège se cimen­tant dans le sang.

Avant la chute des derniers social­istes la France se trou­ve la proie de Bar­ras, La Réveil­lère. Sieyès et Bona­parte. Les con­ju­ra­tions d’an­ticham­bre, et d’al­côves ne ren­trant pas dans le cadre de notre tra­vail qui est moins une œuvre his­torique qu’une œuvre philosophique et sociale, nous passons.

Les Cinq-cents votent, le 6 ther­mi­dor, l’in­ter­dic­tion pro­vi­soire (?) de toute société par­ti­c­ulière s’oc­cu­pant de ques­tions poli­tiques. Les Anciens sanc­tion­nent ce vote. La France était encore dépos­sédée d’une de ces lib­ertés que le peu­ple avait con­quis­es les armes à la main et que ses députés lui reti­raient au nom de son bon­heur et de la liberté.

Puis, après cette réac­tion, la course à la dic­tature est reprise de plus belle.

Dans la nuit du 17 fruc­ti­dor, les Tui­leries sont envahies par 12,000 sol­dats et 40 canons com­mandés par Augereau. Barthéle­mi, le plus libéral des directeurs, est arrêté ; Carnot « l’or­gan­isa­teur de la vic­toire » s’en­fuit en Suisse.

Les Cinq-cents veu­lent se réu­nir : ils sont dis­per­sés et plusieurs sont arrêtés. C’est le règne du sabre qui com­mence. C’en est fait de la liberté !

Le 20 fruc­ti­dor, les Cinq-cents votent un décret de dépor­ta­tion con­tre les directeurs et rédac­teurs de quar­ante-deux journaux.

Les élec­tions eurent lieu en l’an VII et les absten­tions furent très nom­breuses. L’in­dif­férence est l’a­vant-cour­rière du despotisme.

(à suiv­re)

G. D.


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