La Presse Anarchiste

Échos

Nos bons militaires

Après une vie active consa­crée à la défense de la patrie, nos vieux géné­raux et ami­raux du cadre de réserve conti­nuent à ser­vir le pays dans la mesure de leur force. Après la gloire mili­taire, le déve­lop­pe­ment éco­no­mique ! Leurs uni­formes et leurs croix servent à enjo­li­ver les pros­pec­tus de réclames finan­cières. Un der­nier exemple typique. La Socié­té le Nickel de la Nou­velle-Calé­do­nie, fon­dée le 25 mars 1897, compte par­mi ses admi­nis­tra­teurs le vice-ami­ral Charles Bayle, G.O. de la légion d’honneur et le géné­ral Niox, éga­le­ment G.O. Féli­ci­tons ces braves de savoir s’as­su­rer quelques vieux jours douillets en aug­men­tant un peu la faible retraite que leur sert l’État.

Demande d’explication

Il y avait une fois une Bourse du Tra­vail à Dijon (Côte-d’Or). Le maire, le socia­liste Bara­bant, la fer­ma, trou­vant, dit-on, qu’elle était mal com­po­sée. Quelques jours après, il la rou­vrit avec de nou­veaux élé­ments, qui le satis­fai­saient davantage.

La presse poli­tique ou cor­po­ra­tive a été assez avare de ren­sei­gne­ments sur ces divers incidents.

Notre curio­si­té n’est pas com­plè­te­ment satisfaite.

Les Bourses du Tra­vail sub­ven­tion­nées sont-elles assi­mi­lées par les maires socia­listes à des théâtres qui, sui­vant leur fan­tai­sie, joue­ront ou feront relâche, et dont la troupe sera remer­ciée dès qu’elle aura, ces­sé de plaire. Est-ce la concep­tion du citoyen Bara­bant ? Qu’en pensent les syn­di­qués socia­listes de Dijon et d’ailleurs ?

Miracle réformiste

Cela se passe dans les Ardennes. Deux mille cinq cents ouvriers sont en grève. Le bureau de bien­fai­sance, la muni­ci­pa­li­té étant socia­liste, donne aux gré­vistes la jolie somme de 10.000 francs. Tout était donc pour le mieux en ces cir­cons­tances dif­fi­ciles, et ce n’est pas nous qui blâ­me­rons la muni­ci­pa­li­té de son acte de soli­da­ri­té. Mais, écou­tez un peu. Voi­ci venir la mul­ti­pli­ca­tion des pains par le saint esprit réfor­miste. « La grève dura trois mois, conti­nue celui qui nous don­nait ces ren­sei­gne­ments au Conseil natio­nal, et nous n’eûmes plus besoin de secours de l’extérieur. » 10.000:2.300 = 4.4 francs pour trois mois ! Heu­reux gré­vistes qui savent se conten­ter de si peu. Quel besoin ont-ils de la soli­da­ri­té géné­rale du pro­lé­ta­riat ? Quel besoin de se syn­di­quer, fédé­rer, confédérer ?

La brochure à lire

Le Socia­liste, organe offi­ciel du Par­ti Socia­liste (S.F.I.O.) recom­mande avec une géné­reuse ardeur la nou­velle édi­tion de la bro­chure du « citoyen Des­li­nières », Qu’est-ce que le Socialisme ?

Le départ de l’U­ni­té du « citoyen Des­li­nières » rend, en effet, quelque actua­li­té à son centre de pro­pa­gande. Et on ne peut que féli­ci­ter le Par­ti de choi­sir cette occa­sion de recom­man­der une bro­chure exquise, où les cama­rades trou­ve­ront de sages conseils mili­ta­ristes (pour plus de déve­lop­pe­ment voir l’Appli­ca­tion du Sys­tème Col­lec­ti­viste) et appren­dront que la socié­té col­lec­ti­viste se carac­té­ri­se­ra sur­tout par la libre acces­sion de tons les fils de pro­lé­taires aux fonc­tions de Pré­sident de la Répu­blique. Doux rêve d’avenir !

Dédié à S.E. le Garde des Sceaux

Scènes de Flo­rence au XIVe siècle :

« Michel Lan­do, ce révol­té, eut peur de la vic­toire. Les Ciom­pi l’ac­cu­sèrent de tra­hi­son. On lui repro­cha la rente de 100 flo­rins qu’il s’é­tait attri­buée, et ses armoi­ries impro­vi­sées, et le hau­bert sous lequel il che­vau­chait. Les bour­geois se ral­lièrent à lui ; alors il dut char­ger « le peuple de Dieu » et faire pendre des amis de sa jeu­nesse. Il ne réso­lut pour­tant point pour cela la ques­tion sociale. Les par­tis l’en­jam­bèrent comme on passe un pont. Lors­qu’il fut jugé sans foi par les uns et sans uti­li­té par les autres, on l’exi­la dédai­gneu­se­ment. »

(Le Temps, 16 jan­vier 1908.)

Policier Réformiste

Extrait du Réveil du Nord du 16 jan­vier 1908. Confé­rence de Dési­rat à Lié­vin, sous les aus­pices de la Socié­té répu­bli­caine des Confé­rences populaires.

« Une grève, dit-il, ne devrait avoir lieu que lorsque les patrons ont refu­sé l’arbitrage et lorsque les mineurs ont des res­sources néces­saires pour affron­ter de longues semaines de chô­mage. Tan­dis que, bien sou­vent, les grèves sont com­men­cées par des gens sans aveu, des gens qui ne tra­vaillent que de temps en temps, qui ont inté­rêt à faire la grève ou qui sont payés pour la faire. Ce sont ces gens-là qui brisent les machines, mal­traitent les gens, et incen­dient les mai­sons ; non, ces indi­vi­dus-là ne sont pas de vrais tra­vailleurs. Ce sont des incons­cients ou des cri­mi­nels s’ils savent le mal qu’ils font aux ouvriers. Il est inutile de vous les nom­mer, vous les connais­sez tous et vous les avez vus tous à l’œuvre : l’exemple est d’hier ».

C’est ce même ins­ti­tu­teur Dési­rat qui fut can­di­dat à la Com­mis­sion admi­nis­tra­tive de la Bourse du Tra­vail sur la liste du Pré­fet de la Seine, oppo­sée à celle de l’U­nion des Syn­di­cats. Il est donc syn­di­qué et socia­liste. Mais, hélas ! quel socia­liste ! quel syndiqué !

Toujours le Cabinet Viviani

Nous signa­lions dans notre der­nier numé­ro la pré­sence et l’at­ti­tude au Congrès de Stutt­gart d’un atta­ché au Cabi­net Vivia­ni, délé­gué de la Fédé­ra­tion du Nord. Le Cabi­net Vivia­ni se mêle de tout. Nous appre­nons aujourd’­hui que par­mi les can­di­dats pro­po­sés par la 19e sec­tion du Par­ti pour les élec­tions au Conseil muni­ci­pal figure le citoyen Segue­las, atta­ché lui aus­si au même Cabi­net. Que va faire la Fédé­ra­tion de la Seine ? Les atta­chés sont les col­la­bo­ra­teurs poli­tiques des ministres. Pour­quoi exclure ces der­niers si l’on livre le Par­ti à leurs hommes de confiance ?

Réclame pour « Prolétaires »

L’Échotier a com­mis une gaffe la semaine der­nière. Il s’en excuse hum­ble­ment auprès de ses lecteurs.

II avait sim­ple­ment oublié de jeter un coup d’œil sur la « quatre » du Pro­lé­taire.

La « quatre » de ce bon « Pro­lo » est, en effet, tout un poème.

Brousse y recom­mande la biblio­thèque des « Ser­vices publics » et Lajar­rige sa « Grande Impri­me­rie ouvrière ».

Mais l’an­nonce modèle, l’an­nonce type de cet étrange Pro­lé­taire n’est même pas celle où une « Taverne du Nègre — à toi, bon pro­lo — annonce des déjeu­ners à 3 fr. 50, café compris.

L’an­nonce type, dis-je est celle du « Café de l’Industrie », que le Pro­lé­taire recom­mande aux pro­los, ses lecteurs.

Dans cet éta­blis­se­ment modèle, natu­rel­le­ment ils sont sûrs de ne trou­ver que bonne com­pa­gnie. Pas de sabo­teurs, ni de ces infâmes par­ti­sans de « l’action directe ».

C’est la bonne socié­té qui se ren­contre au Café de l’In­dus­trie, « ren­dez-vous des com­mer­çants et indus­triels du quartier ».

Consom­ma­tions de pre­mier choix, liqueurs de marques et téléphone.

« L’union des classes » par le café et le bouis-bouis.

Pro­lé­taire, mon ami, m’est avis que tu as trou­vé là une solu­tion toute pos­si­bi­liste à la ques­tion sociale.

Rapports cordiaux entre Parti et Syndicats

Au Conseil Natio­nal, on par­la inci­dem­ment de la déci­sion de la Fédé­ra­tion du Pas-de-Calais, obli­geant ses membres à ne pas adhé­rer à un Syn­di­cat de mineur, qui, à l’é­poque, était le seul Confé­dé­ré. Fer­rand, délé­gué du Pas-de-Calais, pro­tes­ta contre les cri­tiques et pro­cla­ma le droit de la Fédé­ra­tion d’empêcher les socia­listes d’aller dans un Syn­di­cat, qua­li­fié de Syn­di­cat, d’a­nar­chistes. O uni­té syn­di­cale ! O auto­no­mie des orga­ni­sa­tions ouvrières !

Un pur entre les purs

Dans l’Aube, dont il est depuis hier secré­taire de la Fédé­ra­tion dépar­te­men­tale socia­liste, Clé­vy est gues­diste tous crins. C’est un pur, enne­mi de « toute dévia­tion », il est contre la « par­ti­ci­pa­tion » et stig­ma­tise les « lâches qui votent le bud­get en gros et en détail» ; il appelle, enfin, Briand « l’ex-anar­cho », et Vivia­ni un « traître au parti ».

Mais Clé­vy est aus­si « membre du Conseil supé­rieur du Tra­vail », can­di­dat et élu par la Fédé­ra­tion gues­dite du tex­tile. Comme tel, Clé­vy vient de temps en temps à Paris assis­ter aux « ses­sions » dudit Conseil — j’al­lais écrire Mon­tage de coup — supé­rieur du Travail.

Pen­dant ces « ses­sions », Clé­vy a soin de lais­ser à Troyes sa veste « lutte de classes » et, comme le pre­mier « por­te­foin » venu, il encaisse — sans mot dire — les dis­cours de Vivia­ni le traître, ou ceux de Briand, alors que « l’ex-anar­cho » en était membre dési­gné par le Ministre.

Débar­ras­sé de sa veste « lutte de classes », Clé­vy file alors le par­fait amour de la « col­la­bo­ra­tion des classes » et, dans l’urne du « Conseil supé­rieur », la voix du secré­taire de la Fédé­ra­tion de l’Aube se ren­contre avec celles de ses col­lègues patrons qui, de retour à Troyes, rede­viennent « d’in­fâmes exploiteurs ».

Oh ! qui nous dira toute la dupli­ci­té de l’in­tran­si­geance — de parade — d’un pur d’entre les purs, du pur guesdisme.

Des noms, S.V.P.?

Le Socia­lisme ose écrire : « les lois scé­lé­rates votées soi-disant contre les anar­chistes et appli­quées à peu près exclu­si­ve­ment contre nous ». Affir­mer pareille chose est bien, mais le prou­ver est mieux. On demande en consé­quence les noms des gues­distes condam­nés en ver­tu des lois scé­lé­rates. Vite la liste.

Pour un plat de lentilles

Par­vy, prin­ci­pal client du res­tau­rant coopé­ra­tif de Limoges, donne ses impres­sions sur un voyage fait auprès des potiers de Vallauris.

Natu­rel­le­ment, res­pec­tueux du décret gues­diste, il vitu­père contre l’action directe, dont il fut cer­tain jour le cham­pion. Les Limou­sins ont sou­ve­nir d’une réunion où Ber­trand et Par­vy étaient aux prises. Ber­trand médi­sait de l’action directe. Par­vy en disait du bien. À ce moment-là, les deux cham­pions étaient adver­saires. Aujourd’­hui, ils sont com­pères et Par­vy a chan­gé, tout en jurant de son immuabilité.

Sou­hai­tons que les cir­cons­tances nous ramènent le Par­vy d’alors. Il était plus amusant.

Mais ! j’y songe, le voyage à Val­lau­ris était il fait pour per­mettre à Par­vy d’ap­pré­cier sur place la valeur, en digne géné­ral, d’un nou­veau ter­rain de manœuvre ? J’ai connais­sance d’un cer­tain pro­jet gues­diste en vue de créer une fabrique de pote­rie. Par­vy pour­rait en être le direc­teur très représentatif.

Marche en avant ?

De C. Bon­nier, dans le der­nier numé­ro du Socia­lisme :

« Cer­tains se plaignent de l’in­dif­fé­rence du pro­lé­ta­riat pour la poli­tique socia­liste. Que l’on reprenne la marche en avant de la légis­la­ture de 1893 et l’on ver­ra le pro­lé­ta­riat ouvrier recon­naître et sou­te­nir ses défen­seurs à la Chambre. »

Ce brave Bon­nier est plu­tôt dur pour ses amis, qui n’a­vaient jamais été aus­si nom­breux au Par­le­ment. Et Guesde n’y serait-il ren­tré que pour méri­ter les cri­tiques de Bonnier ?

Mais au fait, qu’est-ce que Bon­nier regrette si amè­re­ment, dans la légis­la­ture de 1893 ? Est-ce Mil­le­rand ? Vivia­ni ? Four­nière ? Sont-ce les pro­jets de loi plus ou moins tein­tés de paix sociale ?

Il regrette peut-être seule­ment qu’on lui ait refu­sé au Socia­lisme un article trop nationaliste ?

Petit commentaire grammatical

Encore une citation :

« J’en­tends bien » — dit un filet du Socia­lisme — à pro­pos d’un article de la Voix du Peuple, « que l’auteur s’empresse d’ajouter que l’action directe, ce n’est pas les bancs cas­sés ni les vitres brisées.

« Per­sonne n’en doute d’ailleurs ; des bancs ou des vitres, cas­sée ou non, ne peuvent pas être une action directe ou indi­recte, l’action directe, c’est le geste qui casse les bancs et brise les vitres. »

Çà, c’est un bel exemple de défor­ma­tion… gues­diste. Heu­reu­se­ment que les lec­teurs de la Voix du Peuple, qui ne sont ni des avo­cats manuels, ni des lit­té­ra­teurs manuels, ni des jour­na­listes manuels, ni des mil­lion­naires manuels ; ont par­fai­te­ment com­pris ce que c’est que l’ac­tion directe et s’ils sont un peu moins forts sur la syn­taxe que les rédac­teurs du Socia­lisme, ils sont peut être plus dif­fi­ciles en fait de pro­bi­té intellectuelle.

Le « Socialisme » contre le « Socialisme »

À la pre­mière page du der­nier numé­ro du Socia­lisme, Bracke vante, à bon droit, le mou­ve­ment enga­gé par les socia­listes alle­mands. Il s’en réjouit. Mais vous oubliez de dire, lui crie la page 7 du même numé­ro, si après « l’emploi de cette action directe, les socia­listes alle­mands sont res­tés ce qu’ils étaient avant ». Or, la réponse n’est pas dou­teuse. Il n’y a aucun chan­ge­ment. Par consé­quent, tu radotes, Bracke, tu racontes « des stu­pi­di­tés » si tu crois « que les gami­ne­ries de potaches » de tes amis alle­mands vont sup­pri­mer demain la pro­prié­té indi­vi­duelle. Far­ceur, va !


Dans le même numéro :


Thèmes


Si vous avez des corrections à apporter, n’hésitez pas à les signaler (problème d’orthographe, de mise en page, de liens défectueux…

Veuillez activer JavaScript dans votre navigateur pour remplir ce formulaire.
Nom

La Presse Anarchiste