La Presse Anarchiste

Lettre familière aux cinq mille abonnés possibles qui recevront ce numéro

Que veut être cette revue ? allez-vous vous deman­der à la récep­tion de ce pre­mier numéro.

La Vie Ouvrière sera une revue d’ac­tion. Une revue d’ac­tion ? Par­faite­ment ; si bizarre que cela puisse sem­bler. Nous voudri­ons qu’elle rendît des ser­vices aux mil­i­tants au cours de leurs luttes, qu’elle leur four­nisse des matéri­aux util­is­ables dans la bataille et dans la pro­pa­gande et qu’ain­si l’ac­tion gag­nât en inten­sité et en ampleur. Nous voudri­ons qu’elle aidât ceux qui ne sont pas encore par­venus à voir clair dans le milieu économique et poli­tique actuel, en sec­on­dant leurs efforts d’investigation.

Nous n’avons ni catéchisme ni ser­mon à offrir. Nous ne croyons même pas à la toute puis­sance de l’é­d­u­ca­tion ; car nous croyons que la véri­ta­ble édu­ca­trice c’est l’action.

Les cama­rades qui se sont ren­con­trés autour de la Vie Ouvrière — et en for­ment le noy­au — ne parta­gent pas toutes les mêmes opin­ions. Il en est qui appar­ti­en­nent au Par­ti social­iste et y mili­tent active­ment ; d’autres con­sacrent tout leur temps et toute leur activ­ité au mou­ve­ment syn­di­cal — c’est la majorité ― ; d’autres, enfin, sont anar­chistes et ne s’en cachent nulle­ment. Mais tous, nous sommes unis sur le ter­rain syn­di­cal­iste révo­lu­tion­naire et nous procla­m­ons net­te­ment antipar­lemen­taires. Tous aus­si, nous croyons qu’un mou­ve­ment est d’au­tant plus puis­sant qu’il compte davan­tage de mil­i­tants infor­més, con­nais­sant bien leur milieu et les con­di­tions de leur indus­trie, au courant des mou­ve­ments révo­lu­tion­naires étrangers, sachant quelles formes revêt et de quelles forces dis­pose l’or­gan­i­sa­tion patronale, et… par dessus tout ardents !

C’est pour ces mil­i­tants que nous avons fondé la Vie Ouvrière et c’est eux qui en rédi­geront la plus forte par­tie, par­lant, au fur et à mesure des événe­ments, de ceux aux­quels ils auront été mêlés. Ain­si se pro­duira un échange extrême­ment prof­itable de con­nais­sances pré­cis­es sur chaque région, sur chaque industrie.

Dans ce pre­mier numéro, on lira une étude de Schmitz, le secré­taire du syn­di­cat de la maçon­ner­ie de la Seine, sur la dernière grève des maçons parisiens. Dans le prochain, le com­mence­ment d’une grosse mono­gra­phie sur la grève des Bou­ton­niers de l’Oise par le comité exé­cu­tif des Tabletiers de l’Oise et un arti­cle de H. Nor­mand sur le Con­grès des Maîtres-Imprimeurs. Dans les suiv­ants, dés études de Mer­rheim sur les sar­diniers bre­tons ; de Savoie sur la sup­pression du Tra­vail de Nuit dans la Boulan­gerie ; de P. Marie sur le Sub­ven­tion­nisme et les Syn­di­cats ; de G. Yve­tot sur les unions régionales de syn­di­cats ; de L. Mon­nier sur le Lock-Out des ver­ri­ers de Nor­mandie ; de Viller­oux sur la grève des chape­liers de la région d’E­spéraza ; de Bled sur la grève des maraîch­ers de Seine-et-Oise ; de Paul Ader sur le Trust du Vin ; de Hum­bert sur les grèves de coupeurs en chaus­sures. à Nan­cy et le rôle de l’« Unit­ed Shoe Machin­ery » ; de G. Dumoulin sur les Con­ven­tions d’Ar­ras ; de Maraux sur la grève des typos de 1906 ; de Ch. Delzant sur la sup­pres­sion du Tra­vail de Nuit dans la Ver­rerie ; de L. Vig­nols sur les Terre-Neu­viens, etc., etc.

À côté de ces mono­gra­phies de grèves et de ces études de ques­tions syn­di­cales ou économiques, nous fer­ons une large place aux ques­tions morales, aux ques­tions d’é­d­u­ca­tion, d’hy­giène, etc.

Pic­ton, qui est insti­tu­teur, par­le dans ce numéro des pro­grès que fait par­mi les insti­tu­teurs l’idée de l’adap­ta­tion de l’en­seigne­ment pri­maire aux besoins de la classe ouvrière. Cette idée nous est chère. Au prochain numéro, Léon Clé­ment exam­in­era les essais d’é­d­u­ca­tion de l’en­fance ten­tés dans les groupes anar­chistes, les syn­di­cats, les coopéra­tives. Puis, puis… bien des choses sur ces sujets qui nous sont promis­es et d’autres qui ne le sont pas caté­gorique­ment encore.

Nous nous fai­sions une joie de pub­li­er dans ce pre­mier numéro un réc­it des événe­ments de Barcelone qu’Ansel­mo Loren­zo, sur la demande de notre ami James Guil­laume, avait promis d’écrire. Loren­zo, mal­heureuse­ment, fut par la suite arrêté et empris­on­né. Pour remédi­er à cette lacune, Cratès qui désha­billera pour nous les ques­tions diplo­ma­tiques et en mon­tr­era le corps économique, nous a don­né une étude d’un gros intérêt sur les dessous financiers de la guerre au Maroc et nous en don­nera une nou­velle pour le prochain numéro sur l’ex­plo­sion pop­u­laire qui répon­dit à la lev­ée de troupes en Catalogne.

Nous pub­lierons, dans les numéros suiv­ants, des arti­cles de Wintsch sur la lev­ée du boy­cott Vau­ti­er qui a mis aux pris­es, en Suisse, révo­lu­tion­naires et réformistes ; de Chr. Cor­nelis­sen sur l’ori­en­ta­tion générale du syn­di­cal­isme ; d’un cama­rade sué­dois sur le lock-out de Suède ; de Brup­bach­er, sur le syn­di­cal­isme à Zurich, etc.

Nous tâcherons, en somme, de faire de la Vie Ouvrière une revue intéres­sante et vrai­ment pré­cieuse pour les mil­i­tants ouvriers.

Il faut qu’elle vive ! Il importe pour cela de recueil­lir 1000 abonnés.

Jamais vous n’y parvien­drez, nous ont dit des amis pes­simistes : on ne lit pas dans les milieux ouvri­ers ; ou bien on ne lit que ce qui est bruyant et épicé. Or vous ne serez ni l’un ni l’autre. Puis, c’est une somme : dix francs par an !

Des cama­rades au courant de la librairie nous ont dit, eux : dix francs par an, une revue de 64 pages tous les quinze jours ; mais vous êtes fous ! Vous avez donc de l’ar­gent à jeter à la rue ?

Nous ne sommes pas opti­mistes ; nous ne sommes pas fous ; nous n’avons pas d’ar­gent à jeter dans la rue. Et nous savons que nous n’at­tein­drons jamais qu’un pub­lic restreint. Mais ce pub­lic de mil­i­tants, de sym­pa­thiques, d’hommes désireux de s’in­former vien­dra sûre­ment à nous si nous lui présen­tons une revue sérieuse­ment doc­u­men­tée, vivante, pas­sion­née même.

Nous y tra­vail­lons à une demi-douzaine de cama­rades depuis deux mois ; d’autres ne nous ont pas ménagé leur con­cours occa­sion­nel ; que ceux qui le peu­vent se joignent au noy­au. Que les autres nous aident dans la mesure de leurs moyens et du temps dont ils dis­posent. Que cha­cun s’ef­force et la Vie Ouvrière reflétera exacte­ment notre vie sociale si tumultueuse, si riche de force et d’e­spoir ; et la Vie Ouvrière attein­dra son 1000e abon­né, bouclant son bud­get, ne deman­dant à cha­cun pour vivre que le mon­tant de son abonnement.

Pour le « noyau » :
Pierre Monatte


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