À la suite de l’acte de notre camarade Duval, alors que dans leur ensemble les anarchistes parisiens applaudirent à cet acte, autant qu’à l’exemple révolutionnaire qu’il donnait, le journal le Révolté, — que l’âge a rétréci et qui, depuis longtemps, attendait une occasion favorable pour tancer les partisans de l’action et, sans doute, pour jeter la division parmi eux, — profita de cette circonstance pour ouvrir une campagne contre tous ceux qui ne partageaient point son extrême modération, modération qui, d’ailleurs, lui a valu des journaux bien pensants et réactionnaires plusieurs certificats de sagesse, entre autres de Gil Blas et de l’Événement.
Cette campagne, commencée à coups d’articles et d’entrefilets parus sous divers titres : « À propos du vol », « la loi de la force », « l’organisation », « à propos d’organisation », etc., a été jusqu’à ce jour fidèlement continuée dans les groupes par les insinuations, aussi bêtes que malveillantes, dont les quelques hommes du Révolté ont abreuvé quiconque se refuse d’accoupler cette choquante contradiction : Communisme et Anarchie, et qui surtout refuse d’accepter tout programme, tout credo.
Les petits moyens ne leur répugnent pas. C’est ainsi qu’a l’apparition de l’Action révolutionnaire de Nîmes ces doctrinaires circonvinrent habilement un grand nombre de camarades des départements en leur écrivant : « Ce journal n’est pas sérieux », ou « nous n’en connaissons pas les rédacteurs », etc. Pour faire tomber l’Autonomie individuelle ils circonvinrent également notre premier gérant, le compagnon Lucas, qui démissionna sur leurs affirmations mensongères.
Ce premier insuccès ne les a pas découragés. N’étant pas comme eux aidés par la générosité d’un prince et d’un savant, nos ressources pécuniaires sont des plus modestes, aussi, pour y parer dans la mesure du possible, notre collaborateur Deherme se proposait, il y a un mois, de faire gratuitement notre composition avec les caractères d’imprimerie dont le Révolté est détenteur, — caractères qui, achetés péniblement, sou a sou par quelques compagnons dévoués, appartiennent aux groupes anarchistes. Mais quel ne fut pas l’étonnement de Deherme lorsque Monsieur le compagnon Grave lui reprocha, en les interprétant a sa façon, lui qui ne les avait pas entendu prononcer, les quelques paroles que notre ami publie un peu plus loin.
Autre chose. Sous la rubrique : « La loi de la force », le Révolté disait en mai dernier que ceux qui ne voient dans l’Anarchie que la satisfaction de leurs intérêts personnels sont des bourgeois ; eh bien, nous, qui sommes las de satisfaire les intérêts d’autrui, nous disons que ceux qui ont le plus nui à l’existence de l’Action et qui compromettent par leur tartuferie celle de l’Autonomie sont pires que les bourgeois ; nous disons plus : ceux qui, comme eux, par esprit de secte ou dans un but mercantile, peut-être les deux, nuisent à la création des organes révolutionnaires sont les pires ennemis de la Révolution.
Anarchistes nous sommes, anarchistes nous voulons rester. Forts de nos convictions et de nos sacrifices la Révolution sociale, nous ne prendrons personne pour juge de nos actes, pas plus que nous ne jugerons ceux de nos compagnons ; mais, comme aujourd’hui, chaque fois que des personnalités, en quête de réclame ou de bénéfices pour leurs affaires, porteront atteinte la propagande, nous les démasquerons.
Nous les démasquerons, parce que nous croyons qu’il est nécessaire de dévoiler les turpitudes des hommes qui n’ont d’anarchiste et de révolutionnaire que l’étiquette collée dans la manche de leur journal.
Nous démasquerons enfin tous ceux qui, à l’aide de subterfuges et de mensonges, dans les groupes libres de l’Anarchie, chercheront à créer une secte dont ils seraient les pontifes.
Dès ce jour nous les attaquerons franchement et au grand jour, convaincus que les sympathies de nos compagnons ne nous feront pas défaut pour l’accomplissement de cette besogne, que notre profond amour pour l’entente et l’harmonie entre les groupes nous avait empêché de commencer plus tôt.
L’Autonomie Individuelle