La Presse Anarchiste

Les fortes cotisations

Depuis quelques mois, cer­tains mili­tants se sont effor­cés d’ap­pa­raître comme les seuls ardents pro­pa­gan­distes de l’or­ga­ni­sa­tion syn­di­cale. Le trem­plin est celui des fortes coti­sa­tions. À les en croire, les syn­di­ca­listes révo­lu­tion­naires seraient adver­saires des coti­sa­tions, pour ne tenir compte que de la valeur agis­sante de chaque ouvrier.

Et, sur ce ter­rain façon­né à leur guise, ces mili­tants vont leur che­min, recou­rant à la plus arbi­traire des confu­sions pour mieux faire écla­ter l’ex­cel­lence de leurs procédés.

Jus­qu’à ce jour, nous nous sommes gar­dés de dis­si­per la confu­sion, nous bor­nant à faire dans notre sphère tous nos efforts pour que s’é­le­vât la coti­sa­tion syn­di­cale et fédé­rale. Le moment nous paraît venu de mon­trer la manœuvre. De brèves expli­ca­tions suffiront.

Tout d’a­bord, fixons les attri­bu­tions qu’à nos yeux ont les Syn­di­cats et celles que nos adver­saires leur donnent. Le Syn­di­cat est un grou­pe­ment créé pour la conquête d’a­mé­lio­ra­tions ; il appelle à la lutte des tra­vailleurs devant béné­fi­cier de ces amé­lio­ra­tions. Pour être à même de lut­ter, le Syn­di­cat doit fonc­tion­ner. Donc, fonc­tion­ner et lut­ter sont les rai­sons d’être du Syndicat.

Les moyens de fonc­tion­ner et de lut­ter sont for­més par l’ef­fort per­son­nel de chaque adhé­rent et par les res­sources ver­sées par cha­cun d’eux afin de faire face aux dépenses néces­si­tées par le fonc­tion­ne­ment et la lutte. La coti­sa­tion assure ces res­sources. Plus la coti­sa­tion est forte, davan­tage il est ver­sé et mieux il est pos­sible de mettre en mou­ve­ment l’ef­fort de chaque ouvrier. Les syn­di­ca­listes révo­lu­tion­naires sont pour les fortes coti­sa­tions affec­tées au fonc­tion­ne­ment, à la pro­pa­gande et à la lutte. Leur but est d’o­rien­ter les Syn­di­cats et les Fédé­ra­tions vers un déve­lop­pe­ment ren­du plus facile par la somme de sacri­fices consen­tis par chaque syndiqué.

Les congrès des Fédé­ra­tions clas­sées par­mi les révo­lu­tion­naires marquent une élé­va­tion conti­nue de la coti­sa­tion fédé­rale fai­sant suite ou entraî­nant l’é­lé­va­tion de la coti­sa­tion syndicale.

Les va-t-en-guerre des fortes coti­sa­tions veulent sur­tout que les Syn­di­cats, la Fédé­ra­tion soient une agence assu­rant l’ou­vrier contre tous les risques : mala­die, chô­mage, via­ti­cum et décès. Ces risques sont de dif­fé­rents ordres. Les uns sont du domaine de la lutte, les autres sont du domaine de l’as­sis­tance. Il va de soi que pour assu­rer tous ces risques, il faut de plus fortes coti­sa­tions. S’en suit-il que les membres, ain­si garan­tis, font de plus grands sacri­fices que les syn­di­qués consa­crant tous les efforts à la pro­pa­gande et la lutte ? Non pas. Le ver­se­ment est certes plus éle­vé, mais les charges de l’or­ga­ni­sa­tion vis-à-vis de l’adhé­rent sont plus éle­vées, elles sont pro­por­tion­nelles. Il y a entre cer­taines Fédé­ra­tions, équi­libre. Le syn­di­qué qui verse 1 franc à son Syn­di­cat, le Syn­di­cat qui verse à sa Fédé­ra­tion, sur ce franc, 25 ou 30 cen­times pour une œuvre de pro­pa­gande et de lutte donnent autant pour l’ac­tion syn­di­cale que le syn­di­qué qui verse 2 francs à son Syn­di­cat, que le Syn­di­cat qui verse sur ces 2 francs, 1 franc ou 1 fr. 50 en vue d’ins­ti­tuer des caisses d’assistance.

La véri­té est que les mili­tants plus sou­cieux de faire du cor­po­ra­ti­visme que du syn­di­ca­lisme veulent faire des Syn­di­cats mutua­listes et non des grou­pe­ments de lutte et de résis­tance. Il va de soi que les ver­se­ments doivent être plus éle­vés. Mais de là à conclure qu’eux seuls sont pour les fortes coti­sa­tions, il y a un grand pas.

Par­mi les Fédé­ra­tions clas­sées modé­rées, deux seule­ment ont des coti­sa­tions éle­vées pour le ser­vice d’as­sis­tance : le Livre et les Méca­ni­ciens. Les autres ont des coti­sa­tions très faibles. Par­mi celles qui sont clas­sées comme révo­lu­tion­naires, il y en a qui pré­lèvent 20, 25, 30, 40 cen­times par membre et par mois. Et celles-là ne déses­pèrent pas de la faire éle­ver encore pour accroître la force d’ac­tion et de résistance.

Il est inté­res­sant de noter la coti­sa­tion du Tex­tile. Cette Fédé­ra­tion est une de celles qui pré­lèvent le moins. La coti­sa­tion y est de 5 cen­times. Le der­nier Congrès n’a pu la rele­ver. Aus­si, est-il plai­sant de lire Renard pré­co­ni­sant chez les autres ce qu’il n’a pu réa­li­ser dans son milieu.


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