La Presse Anarchiste

Avertissement

Pour­quoi « Témoins » – le mot et la chose ?

Disons-le dès l’abord : tant par modes­tie que par manque de suf­fi­sante affi­ni­té, l’on ne pré­tend point, ici, prendre ce mot de témoins dans le sens, infi­ni­ment res­pec­table mais gros de cer­ti­tude infuse, que lui confèrent les heu­reux pos­ses­seurs d’un cre­do admis une fois pour toutes.

Témoi­gner pour – pour sa véri­té par exemple – sup­pose, implique la pré­sence déjà don­née de ce pour quoi l’on témoigne.

Ain­si a‑t-on pu, ailleurs, par­ler de témoi­gnage chrétien.

Mais à défaut de cette grâce, de cette évi­dence, du moins peut-on témoi­gner de ; de ce que l’on voit ou pense : faits, idées, valeurs.

C’est en ce sens volon­tai­re­ment res­treint que les pré­sents cahiers s’efforceront d’être, à leur humble façon, des témoi­gnages de ce temps-ci et du reste de pen­sée libre qu’il daigne tolé­rer encore.

En quelque domaine que ce soit – vie de l’esprit, créa­tion d’art, pro­blèmes de la cité – notre monde moderne (et qui se vante de l’être!) de plus en plus est asser­vi, non seule­ment aux vel­léi­tés tota­li­taires des uns ou au tota­li­ta­risme des autres, mais encore, même chez beau­coup d’entre ceux-là qui vou­draient réagir, aux for­mules toutes faites des dogmes ou sys­tèmes, à tout ce qui, par ido­lâ­trie, soit de la tra­di­tion, soit de l’histoire, soit de la rai­son dés­in­car­née, relève de la déduc­tion et de l’abstrait.

Règne de l’ersatz ; règne du pseu­do. Sur toute la ligne.

Car si le choix, assu­ré­ment, s’impose entre les liber­tés encore pos­sibles du monde dit libre (d’intention) et l’autre, la réa­li­té, ici et là-bas chaque jour moins humaine, se mys­ti­fie et, dès avant la lettre, s’atomise.

Qui sait, par­mi la foule de tant de décer­ve­lés et d’idéo­lo­gues, si une poi­gnée de témoins n’est pas aujourd’hui, quelque pré­caire que puissent en être les faibles moda­li­tés à nous per­mises, l’un des seuls moyens de res­tau­rer tant soit peu la réa­li­té de l’homme ?

Ou bien est-ce déjà deman­der trop ?

Moyen en tout cas, moins ambi­tieu­se­ment, encore que sans rési­gna­tion aucune, bien au contraire, de mesu­rer la marche du cata­clysme qui nous tient lieu de civilisation.

Comme en cas d’inondation tels repères – cailloux ano­nymes, bois de for­tune ou marques tra­cées à la hâte sur le sable ou la pierre – per­mettent, sinon d’entraver, tout au moins de connaître les pro­grès du fléau.

Repères que jus­te­ment l’usage veut qu’on appelle aus­si témoins.


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