La Presse Anarchiste

Mécontentement paysan

Une fois de plus il y a trop de pommes de terre en France. Et trop de fruits — de pêch­es, d’abri­cots, de raisin, etc. Et les pro­duc­teurs protes­tent. Comme si c’é­tait la faute du gou­verne­ment ! Ils n’ont pas le courage d’aller jusqu’au bout de leurs con­clu­sions. Car celles-ci met­tent en cause l’or­gan­i­sa­tion même de la société actuelle. Dans un monde basé sur de justes principes, l’ex­cé­dent de pro­duc­tion serait rever­sé sur les régions moins bien partagées. On ferait séch­er les fruits et les pommes de terre, on ferait des con­fi­tures qu’on enver­rait aux peu­ples affamés. Les paysans français ne s’en soucient guère.

Ce qu’ils veu­lent, c’est que l’État achète leurs excé­dents, peu importe s’il les détru­it ensuite. Ils se sont même, en Bre­tagne, chargés de jeter et de laiss­er pour­rir des mil­liers de tonnes de pommes de terre que le gou­verne­ment leur avait payées. Et ils con­tin­ueront à pro­duire davan­tage — comme il arrive aux U.S.A. pour les céréales — si l’État con­tin­ue d’acheter.

Les vignerons nous posent des prob­lèmes sem­blables. Leurs lead­ers ont beau vouloir nous con­va­in­cre du con­traire, le pinard qu’ils pro­duisent est, dans une large mesure, franche­ment mau­vais, et les coupages de vin d’Al­gérie se jus­ti­fient ample­ment. Certes, ces coupages restreignent, en par­tie, la vente de la pro­duc­tion exclu­sive­ment française. Main­tenant que l’Al­gérie est indépen­dante, on exploite le nation­al­isme français pour se débar­rass­er des con­cur­rents d’outre-Méditer­ranée. Tant pis si les acheteurs en sont vic­times. Dans ce cas comme dans les autres, ce sont les con­som­ma­teurs, c’est-à-dire la total­ité de la nation qui paient pour les dif­férentes cor­po­ra­tions de pro­duc­teurs, lesquelles ne sont que des minorités.

Dis­ons car­ré­ment que de tels mou­ve­ments ne nous intéressent pas. C’est par la social­i­sa­tion de la pro­duc­tion et la répar­ti­tion équitable des biens pro­duits qu’on trou­vera une solu­tion cor­recte. C’est, pour com­mencer, par l’or­gan­i­sa­tion du cir­cuit direct de la dis­tri­b­u­tion. Le reste n’est que dém­a­gogie, solu­tion de facil­ité, manque de respon­s­abil­ité. Quand ce n’est pas spécu­la­tion sur la faib­lesse du pour­voir et la résig­na­tion de la pop­u­la­tion qui paie toutes ces mesures par l’aug­men­ta­tion des prix et des impôts.


par

Étiquettes :