La Presse Anarchiste

Catégorie : Témoins n°24 (septembre 1960)

  • Hiver

    Blan­cheur à n’en plus finir. Pré­sence de l’absence. Le mirage est dans tes yeux clos, l’immobilité dans la danse Des flo­cons un à un qui referment le piège De ce bon­heur au-des­sus du monde et dans le monde. Il neige. Blan­cheur du ciel obli­té­ré, de ces draps où tu lis dans la blanche ubi­qui­té du jour. Blan­cheur pré­sente absente,…

  • Automne

    Automne, — dire, ah com­ment le pou­voir encore ? Quelle sai­son de la récolte nous t’avons cru et quelle aurore, Automne russe, octobre rouge, « dix jours qui ébran­lèrent le monde », Ago­nie, que rien, nous en tenions la cer­ti­tude, n’arrêterait plus désor­mais, de tout ce qui est immonde. Com­ment, com­pa­gnons d’univers, sans remords eût-on dou­té ? Ici, dans cette grande petite…

  • Été

    Quand ren­tré le matin vers les deux heures je lui eus dit la foule en fièvre des boulevards, Les flics qui nous tapaient dedans, les yeux hagards De ceux qui criaient « à Ber­lin ! », « vive la Ser­bie ! », « vive la revanche ! », Lui, revoyant sou­dain le soixante-dix de ses quinze ans et les équipes payées des blouses blanches,…

  • Printemps

    « Quand mon père, à la cas­bah de Bône, pré­pa­rait son évasion…» Ain­si com­men­çait grand-mère. Nous les gosses, nous écoutions Ces mots que nous savions par cœur, car si sou­vent nous avions deman­dé, insa­tiable, exi­geant public : « Dis, grand-mère, raconte encore tes his­toires d’Afrique. » Et tou­jours se dérou­lait la même épo­pée lamen­table et grandiose : Les mas­sacres de…

  • Décembre

    Voi­ci Décembre. Longue et brève L’année à regret va finir Et n’est déjà plus que le rêve D’un rêve, à peine un souvenir. Si tout s’achève, tout commence, Car du fond même du néant Noël chante son espérance : Il est né le divin enfant ! Et vous tous à qui son message Demeure légende, chantez Païen­ne­ment : le nou­vel âge De l’hiver…

  • Novembre

    Temps d’amour fri­leux est Novembre, De la lumière qui s’éteint, Du vain mirage, à s’y méprendre, De l’été de la Saint-Martin. Mais gar­dant au front ce mensonge Il en fait votre vérité. Dans la brume gran­dit un songe Encor bien plus beau que l’été. Tout s’apprête à mou­rir. C’est l’ambre Des chry­san­thèmes, la Toussaint… Le feu…

  • Octobre

    Des temps pré­cé­sa­riens je garde, Octobre, le hui­tième rang D’entre les mois, et je regarde Ache­ver de mûrir, ô grand Dio­ny­sos, le fruit de ta vigne Qui fit la honte de Noé Mais per­met que l’âme, enfin digne De mon retour, clame « Evohé ! », Comme au com­mu­niant il donne Par le sang l’œuvre de l’amour De ce dieu-là qui tout pardonne Du pre­mier…

  • Septembre

    Longs soirs dorés où se remembre Ce qui brille d’avoir été, En vous les roses de Septembre Res­sus­citent le plein été. Dis­crets mes­sa­gers de l’automne, Les zinias dans les jardins Mettent leurs feux sourds. On s’étonne De devi­ner que tout n’est rien. En vain la splen­deur se prolonge. Les hiron­delles vont partir. Faut-il pré­fé­rer au mensonge La…

  • Août

    Ah ! j’ai l’air malin dans la bande, Moi le mois d’août, soleil, chaleur, D’être affu­blé, je vous demande Un peu ! de ce nom d’empereur. Bah, tout cirque a bien son auguste ; Ça me récon­ci­lie un peu. Et puis le sort, faut être juste, Sous mon règne a fait naître Goe- The — un beau vingt-huit ! Son­nez musettes Même si le…

  • Juillet

    Juillet je suis depuis que Rome, Fon­da­trice de vos hasards, Pour un homme traî­tresse à l’Homme, De moi fit offrande à César. Cruel, mon soleil règne en maître Impé­rieux sur la moisson ; Mais sa flamme même fait naître Dans les cœurs une autre chanson : Car c’est, reje­tant les béquilles Mau­dites de l’autorité, Un qua­torze qu’à la Bastille…

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