En nous attachant à donner des exemples d’actions originales, nous avons été amenés à parler de provos, du mouvement pacifiste anglais, de radicalisme non violent américain, de « flower people ». Ces mouvements (il est entendu que l’on donne à ce mot un sens très large qui ne le limite pas à un cadre structuré mais lui donne figure de « courant ») font preuve d’originalité pour nous. Il serait donc intéressant de confronter tous ces styles. Ce serait hors de propos quant à ce numéro, cependant nous pourrions donner dès maintenant quelques éléments quant à cette confrontation (étant bien précisé l’aspect limité de ces éléments).
Un intérêt de cette confrontation serait de nous bien faire percevoir l’impasse des mouvements qui, en France, déclarent s’intéresser à la santé des individus ou de l’humanité.
Une nécessité de cette confrontation serait de semer le doute, car l’existence même de ces mouvements (ceux de la vieille France) en impose a bien des personnes au point de se croire obligées de créditer, ne serait-ce que moralement, ces fantômes qui hantent leur conscience. Il est compréhensible qu’un adolescent qui accède à une conscience sociale se prenne d’enthousiasme pour ce qui est de gauche, pour ce qui est humain (et pour lui cette direction dans sa conscience sociale prime sur les distinguos à faire entre les multiples plates-formes idéologiques ou organisationnelles). Mais il n’est plus compréhensible qu’un soi-disant adulte se mette à la remorque d’une locomotive, avec le grand mépris des autres locomotives – il y a là une erreur originelle à l’impasse en question et la cause a beau être noble et belle, il n’empêche pas qu’elle est défrisée.
Ces mouvements peuvent aisément se scinder en deux courants, le courant dit de gauche (formule partis politiques, formule syndicaliste, formule groupements politiques francs-tireurs s’autoqualifiant de révolutionnaires) et le courant humaniste (formule groupements chrétiens, formule pacifiste, formule non violente). Cette séparation de fait est la preuve indéniable de leur impasse. Ces deux courants ont pourtant deux points communs : les archaïsmes et le mensonge.
Développer ces quelques remarques nous entraînerait fort loin et dépasserait le cadre de ce numéro. Les mouvements abordés dans la première partie de ce numéro nous apportent-ils la solution ? Certainement pas, car celle-ci se trouve dans le comportement des individus qui accèdent à une conscience.
Cependant, l’observation de ces mouvements, différents de ce que nous côtoyons habituellement, peut nous apporter quelques enseignements qui pour être fragmentaires ne sont peut-être pas inutiles.
C’est à quoi visent les paragraphes suivants, étant entendu :
– Que les éléments concernant ces mouvements ne prétendent nullement au « reportage » précis, déterminant (ne serait-ce que par le fait qu’ils nous sont extérieurs, que nous ne sommes pas impliqués dans leur course) ;
– Que les éléments critiques ne sont pas des idées arrêtées, mais s’inscrivent dans une recherche de compréhension ;
– Que tous ces éléments restent épars et ne visent pas à une analyse complète.