La Presse Anarchiste

Avec le sourire

Un soir, après avoir ver­sé à ses chers-z-audi­teurs leur ration quo­ti­dienne de Zap­py Max, Radio-Dura­ton affi­cha ce clas­sique de Cour­te­line : Le Train de 8 h 47.

L’auditeur allait enfin — une fois n’est pas cou­tume — échap­per à ce « radio-cro­chet », où d’abusifs com­mer­çants orga­nisent sur les ondes, pour la plus grande gloire d’une bonne-tisane-pour-le-foie ou d’une nou­velle les­sive-qui-lave-plus-blanc, des spec­tacles indignes d’une salle de patro­nage de chef-lieu de canton.

Mais le même poste, dont le mau­vais goût ne cesse de s’affirmer avec un suc­cès crois­sant à tra­vers ces émis­sions-concours d’une vul­ga­ri­té qui ne s’explique que par le désir de s’aligner au plus bas niveau de la masse, réser­vait une sur­prise de taille à son fidèle public. Un cen­seur vigi­lant avait sou­dain décou­vert, à la lec­ture des péré­gri­na­tions de Cro­que­bol et La Guillau­mette, que les deux cava­liers en virée n’allaient rien moins qu’à une pre­mière communion.

 

 

Dilemme sha­kes­pea­rien : jouer ou ne pas jouer ? Et c’est là que s’affirma le génie de ce père Soupe ano­nyme. Certes, nos deux héros ne pou­vaient décem­ment se rendre où vous savez. Il fal­lait donc inven­ter un biais qui ména­geât les chastes oreilles des audi­teurs, habi­tués comme cha­cun sait à l’humour fin et déli­cat des boni­men­teurs du Télé-Cir­cus et du Radio-Théâtre.

Il eut donc cette trou­vaille : nos deux mili­taires en goguette échoue­raient non au « grand 16 » mais… dans un repaire de faux-mon­nayeurs ! Avouez que cette petite astuce mène­ra loin son auteur si les petits cochons ne le reniflent pas trop fort avant qu’il ne retombe en enfance.

Ces « dames » ayant ain­si été priées de faire valoir leurs attraits ailleurs que sur les ondes, M. Fré­dé­ric, leur grand patron, deve­nait pro­ba­ble­ment, pour les besoins du scé­na­rio, un redou­table chef de gang exer­çant dans l’ombre d’une cave sa cou­pable indus­trie. (Je dis « pro­ba­ble­ment » car — et je m’en repen­ti­rai toute ma vie — je n’ai pas enten­du cette incroyable ver­sion due aux médi­ta­tions labo­rieuses d’un « rewri­ter » visi­ble­ment sous-alimenté.)

 

 

Cha­cun goû­te­ra comme moi, je pense, « l’hénaurmité » de cette adap­ta­tion qui abou­tis­sait à pri­ver La Guillau­mette et son com­père d’un plai­sir que le bon Cour­te­line n’avait pas cru devoir leur refu­ser et qui était le but même de leur équi­pée sous la pluie à tra­vers les rues de Bar-le-Duc.

Si le brave capi­taine Hur­lu­ret était à l’écoute ce soir-là, il a dû en avoir le souffle coupé !

Chris­tian Gatinais


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