La Presse Anarchiste

En Italie

La lutte de classe revêt, en Ita­lie, un carac­tère nou­veau. C’est, un peu par­tout, la guerre civile qui met aux prises, quo­ti­dien­ne­ment, révo­lu­tion­naires et fas­cistes. Par le cou­teau, le revol­ver et la bombe, les adver­saires, s’af­frontent sans cesse. Il faut dire que le fas­cisme se montre de plus en plus violent et arro­gant. Hypo­cri­te­ment sou­te­nu par le Gou­ver­ne­ment, il entend faire la loi.

C’est ain­si que, tout der­niè­re­ment, à Ber­giole, aux envi­rons de Car­ra­ra, un conflit entre anciens com­bat­tants et fas­cistes, conflit sus­ci­té par ces deniers, se ter­mi­na dans le sang : trois fas­cistes et un répu­bli­cain furent tués ; il y eut des bles­sés par­mi les cara­bi­niers et la popu­la­tion. À Cam­pi­tel­lo, aux envi­rons de Sie­na, un pareil conflit, pro­vo­qué par une bande de fas­cistes, leur coû­ta trois bles­sés. Des faits plus graves ont eu lieu à Pra­to ; tou­jours les fas­cistes, qui, sous la conduite d’un dénom­mé Flo­rio s’en prirent aux com­mu­nistes. Flo­rio fut bles­sé griè­ve­ment ; un groupe de fas­cistes incen­dia la Bourse du Tra­vail et dévas­ta l’im­pri­me­rie où se tire le jour­nal socia­liste Il lavo­ro.

Le socia­liste Cia­pi­ni, de la Bourse du tra­vail de Flo­rence, de pas­sage à Pra­to, fut assailli et bles­sé griè­ve­ment. La ville a un aspect de désert : tous les éta­blis­se­ments publics sont fer­més, les ouvriers, en signe de pro­tes­ta­tion, ont aban­don­né le tra­vail. À Padoue, les natio­na­listes ita­liens ont par­cou­ru les rues fouillant et bas­ton­nant toutes les per­sonnes sur qui ils trou­vaient des jour­naux sub­ver­sifs. À Este, le socia­liste Pane­bianes, alors qu’il fai­sait une confé­rence, fut sérieu­se­ment mal­me­né. Tous ces faits se sont pas­sés sous le regard bien­veillant de l’autorité.

Les pro­vo­ca­tions fas­cistes ont ame­né la sec­tion socia­liste de Milan à pré­sen­ter, à la pro­chaine assem­blée du par­ti, un ordre du jour par lequel, consi­dé­rant que le moment pré­sent est tra­gique, ils invi­te­ront la direc­tion du par­ti, en com­plet accord avec la C.G.T. et les dépu­tés socia­listes, à obte­nir du Gou­ver­ne­ment, l’o­bli­ga­tion, pour les fas­cistes, de répa­rer tout ce qu’ils ont sac­ca­gé : bourses de tra­vail, coopé­ra­tives, etc., etc…

Dans le cas où satis­fac­tion ne serait pas don­née, les tra­vailleurs seront invi­tés à faire la grève générale.

Uma­ni­ta Nova fait obser­ver à ce sujet, que, depuis dix-huit mois, le fas­cisme, sous la pro­tec­tion du Gou­ver­ne­ment, domine une grande par­tie de l’I­ta­lie et sème, l’in­quié­tude et la mort par­tout où il sévit. Pen­dant ce temps-là, le par­ti socia­liste qui, avec la C.G.T., pour­rait sou­le­ver 3 mil­lions de tra­vailleurs et comp­ter sur la soli­da­ri­té des mino­ri­tés plus avan­cées, lar­moie en rece­vant les coups.

Nos cama­rades, les anar­chistes ita­liens, trouvent, qu’au lieu de deman­der au Gou­ver­ne­ment aide et pro­tec­tion, il serait pré­fé­rable d’a­battre, une fois pour toutes, non seule­ment le fas­cisme, mais celle qui le paie et le pro­tège, c’est-à-dire la bour­geoi­sie. Obte­nir satis­fac­tion serait, d’ailleurs, créer des forces poli­cières consi­dé­rables et don­ner plus d’au­to­ri­té à l’É­tat capi­ta­liste, bien plus dan­ge­reux que le fascisme.

Ain­si, en Ita­lie, comme en France, comme par­tout ailleurs, les socia­listes se res­semblent. Ils se conduisent en enne­mis avé­rés d’une révo­lu­tion fran­che­ment prolétarienne.

L’af­faire Sac­co-Van­zet­ti. ― Le pro­lé­ta­riat ita­lien a repris, avec ardeur et enthou­siasme, la cam­pagne en faveur de Sac­co et Van­zet­ti. Nos deux cama­rades injus­te­ment condam­nés à mort par la « jus­tice » amé­ri­caine sont aus­si en péril qu’ils l’é­taient avant le 1er novembre. Les lec­teurs de la Revue Anar­chiste qui se rap­pellent, sans doute, l’o­dieuse machi­na­tion du trop fameux pro­cès, seront cer­tai­ne­ment émus en appre­nant que les tra­vailleurs d’I­ta­lie mani­festent quo­ti­dien­ne­ment pour la libé­ra­tion des condam­nés que le capi­ta­lisme d’Outre-Atlan­tique entend sour­noi­se­ment livrer au bourreau.


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